La Rivière Subarnarekha ou La Rivière Subarna (Subarnarekha, Ritwik Ghatak, 1962-65)Difficile de parler de ce qui fait la "patte" de ce film, dont plusieurs qualités sautent pourtant au yeux : une douce et étrange abstraction, ou encore les chansons qui arrivent et repartent subtilement, avec naturel, conférant à l'ensemble une dimension rêveuse. Cette approche limite expérimentale renouvelle le récit social attendu (qui devient moins automatiquement pathétique), nous faisant rentrer dans ces éternelles histoires de castes comme "de biais"... Même si depuis la vision l'enthousiasme est un peu retombé (j'en retiens en fait surtout deux grandes scènes : la déclaration en forêt, et le face à face nocturne final tétanisant), ça se pose avec évidence comme une alternative solide à Satyajit Ray - dont Ghatak semble être, sur un même terreau thématique, l'exact inverse dans le style. Si par hasard quelqu'un sait ce que vaut l'image de l'édition DVD française, j'aimerais bien savoir, y a aucune info sur le net...
Daratt (saison sèche) (Daratt, Mahamat Saleh Haroun, 2006)Classe et aussi sec que son titre, pour une histoire qui semble rejouer en miroir celle du Fils des frères Dardennes. Et bien c'est mieux que le Dardenne ! Il y a une certaine tension entre l'extrême simplicité d'une histoire balisée, qui pourrait se blottir rapidement dans l'excuse du film-fable, et un traitement conceptuel qui va travailler le récit la moelle (pas de fioriture, juste l'essence fiévreuse). Le regard honnête évite que l'ensemble vire au petit dispositif clinique. C'est vraiment un beau film, à quelques dérapages près, avec un dernier plan en mode grande claque dans la gueule (rien à voir sinon : la photo est magnifique).
Despair (Rainer Werner Fassbinder, 1978)Fassbinder est toujours aussi virtuose, mais il n'évite pas l'un des écueils des films décrivant la folie : nous perdre moins par le travail narratif qu'en entretenant une confusion soûlante qui finit par épuiser le spectateur. Ce n'est pas constant, notamment dans toute la brillante première partie qui image l'avènement du trouble, et le talent immense de Bogarde, comme le comique ambiant (notamment via la femme débile), font office de fil rouge pour tenir la suite. Mais entre les éclats, l'ennui n'est pas toujours loin.