Forum de FilmDeCulte

Je vais essayer je le rattraper d'une manière ou d'une autre.
Il est vaguement sorti en salle en Belgique cet été mais n'importe comment, je l'ai raté.

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Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"

Oui c'est évident pour la position, mais le lieu ne semble pas correspondre.

Mate au moins un Reichardt pour voir si tu accroches au style. Il faut reconnaitre que c'est une cinéaste assez unique dans le cinéma actuel.

Je suis un grand fan de Reichardt et j'attendais naturellement beaucoup de ce film-ci et elle a réussi à me surprendre.

Le scénario est en effet plus retors que beaucoup de ses films même si Night moves donnait déjà dans l'intrigue. Après 20 minutes très lentes, même pour moi, j'ai été subjugué par la matérialité intense avec laquelle Reichardt filme l'époque: les pièces et "coquillages", les bottes, les chapeaux des indiennes au travail qui sont cois devant l'arrivée de la première vache, la cabane comme premier foyer américain où les silhouettes de ses membres se découpent chacun dans l'encadrement de la porte et la fenêtre, réunies dans le travail...

Rarement le partage matériel à la base de toute amitié n'a été rendu avec plus de vibration à l'écran: la bouteille de whisky, la cabane, les biscuits et l'or.

J'adore aussi l'idée que leur solidarité n'empêche pas que leur réussite se base, ô surprise dans le capitalisme, sur le vol - film proudhonien s'il en est puisque ce vol n'est là que pour réparer l'injustice de la propriété.

La fin m'a pris à rebours mais avec le recul c'est très ingénieux - on a l'impression d'un film court, qui fait pourtant deux heures.

Il passe au Méliès de Villeneuve-d'Asq (pratiquement le dernier cinéma non UGC d'un territoire grand comme la moitié de la Belgique)

Oui c'était là où j'étais allé voir son précédent Certaines femmes, déjà le seul ciné du coin à le faire! Des résistants...

Tu connais donc le Triolo, ses cubes d'habitation, sa bretelle d'autoroute, sa station de métro, sa cité U et sa ZUP excentrées sans un café ni une épicerie qu'ils auraient mis dans les champs en Belgique pour éviter des mai 68 s'ils l'auraient pu, l'immense parking du Leroy Merlin à traverser pour aller à pied vers la ville, et sa salle labellisée arts et essais, ces endroits magiques...

Alors je n'y suis allé que pour cette fois-ci mais effectivement maintenant que tu le dis j'ai trouvé l'endroit très bizarre et le cinéma isolé... Avec un charme étrange somme toute, mais j'aurais pas envie d'y habiter - pauvres étudiants.

Oui quand tu y passes, l'endroit peu revêtir le mystère évocateur de Buffet Froid et certaines stations du métro de Lille ont un côté THX 1138, mais j'ai un ami qui a préféré faire deux ans d'armée, que le semestre dans cette cité U qui lui aurait permis de terminer rapidement une licence. Sa bourse ne lui permettant pas d'aller ailleurs, c'est paradoxalement la contradiction entre l'aide et l'endroit réel qui a alors fortement contribué à le sortir du système.
Et c'est Oxford, face à son équivalent de la fac de sciences de Reims que j'ai été amené à fréquenter plus tard (Didier Eribon ne raconte pas des conneries).
Certes, elles ont été un peu réhabilitées il y a 15 ans, ce qui était la moindre des choses

Un peu déçu par l'épisode de La gêne occasionnée sur le film. Ça dure 1h et pourtant pas l'impression qu'ils aient dit quoi que ce soit que je n'avais lu ailleurs (même si c'est très bien dit). En fait je crois que c'est plus intéressant quand Begaudeau n'aime pas le film.

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CroqAnimement votre

En effet, le rejet est très souvent une manière, voire une technique, renforçant la valeur spéculative du commentaire au détriment du film...c'est vieux comme le monde.

Je trouve les podcasts de France, Drive my car, Caché ou Conte de cinéma tous très intéressants, et ce ne sont que des films qu’il a apprécié

Il a des réserves sur le Dumont et le Hamaguchi et c'était probablement les parties les plus intéressantes.

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CroqAnimement votre

Indéniablement le meilleur film de Reichardt que j'ai vu, et les deux acteurs sont très bons (surtout Orion Lee je dirais), c'est classieux et intelligent mais je me suis un peu fait zzzzz zzzzzz zzzzz. C'est un peu le couple de Gerry de Gus van Sant chez les cow boy de Dead Man de Jarmusch (on pense aussi à John McCabe d'Altman).
C'est vrai que l'on retrouve des motifs et que ses films dialoguent entre eux (rôle central des chiens qui sont des passeurs comme dans Wendy et Lucy, mais cette fois-ci on est de l'autre côté de la forêt, là où un lien à deux possible, mais aussi terminal : la jouissance chez Reichardt soit on n'y accède pas comme Wendy et Lucy, soit on n'en revient pas comme ici ou dans Night Move, elle s'identifie un peu au politique, soit on la devance, soit on la rate, c'est d'ailleurs plus ou moins explicité par les personnages). C'est presque une génealogie critique du capitalisme, c'est aussi presque érotique et presque sexuel, comme si chez Reichardt filmer le lien amoureux revenait à filmer d'un même mouvement le désir de justifier idéalement et politiquement le lien social et la mort réelle et "écologique" de cette même société, ce que ne film entreprend de faire sans non plus le réaliser complètement (le capitalisme et l'obsession du bénéfice à immédiatement réinvestir du commerce sont finalement l'écart jamais comblé entre ces deux dimensions : les deux hommes évoluent, entre perte et point se repère, dans leurs fantasmes de business qui devient une sorte de métaphore de la forêt réelle, qui n'a pas d'extérieur - comme la blague sur l'arbre d'Otis).

Sinon pour ceux qui ont aimé le film, je recommanderais vivement la Cecilia de Jean-Louis Comolli

Le lien avec MrCabe et Mrs Miller est conscient car il s'agit du dernier film de René Auberjonois (acteur emblématique d'Altman, son rôle le plus connu est probablement celui du conférencier dont les interventions ponctuent Brewster McCloud) et qu'il a pratiquement les mêmes vêtements dans les deux films. Dans First Cow c'est l'ermite dans la cabane aux limites du camps, hagard mais capable de toiser du regard Figowitz et King Lu...