alors on a vu le même film. tout ce dont tu parles, c'est là, je sais de quoi tu parles. mais on n'a pas vu la même chose.
joseph il vit pour le cinéma, avec des images dans sa tête. il a commencé très jeune, directement par des clips, et est devenu un monstre stakhanoviste du clip et de la pub. il n'est arrivé au cinéma, à la narration que tard, et avec torque... donc il n'a rien de particulier à dire, il n'a jamais vraiment vécu en dehors du cinéma, le fait qu'il ait prospéré dans des formats courts et à la narration alternative n'est pas un hasard. il n'a jamais essayé de capter quoi que ce soit. il créé dans sa tête, intégralement, une situation, en fusion avec sa caméra. même dans ses trucs les moins inspirés, avec des clips au concept faible ou avec un déficit d'idées, ses plans sont sûrs d'eux, triomphants, et toujours situés dans ce qui n'est pas un movie-verse, ni le clip-verse, ni le pub-verse, mais le khan-verse.
c'est à mon sens la raison de son parcours compliqué au cinéma, et la raison pour laquelle je ne le regrette pas. profondément son art, son style ne sont pas compatibles avec une narration normale, je pense qu'il a un inintérêt profond, structurel pour les autres êtres humains, et que la musique qu'il entend dans sa tête et qu'il voit avec ses yeux est juste trop unique pour être soluble dans le style normal des autres films. (j'irai pas jusqu'à dire que le mec a transformé son trouble autistique en art, mais bon...).
on est en plein dedans ici, mais avec un fond beaucoup plus mainstreams que ses autres. effectivement, j'ai pensé à the faculty, j'ai pensé que ça pourrait être n'importe quelle connerie netflixables, c'est vraiment un récit extremement basique (mais sympa) sur une substance maléfique qui s'attaque et décime une petite ville et un groupe de lycéens. ce récit là, je l'ai trouvé tout à fait marrant, j'adore the faculty, j'ai carrément aimé le concept du ick, j'ai aimé les grosses scènes.
alors dans l'absolu, je peux etre tout à fait client de ces trucs mais ils m'assomment à cause du formatage débile, la certitude qu'on pourra dire que ça a été fait par ia, les personnages industriels, la nullité assumée, tout l'aspect formel torché et manufacturé, tout.
mais là, du coup, c'est à sa sauce. ça commence dès le début, où la présentation de la storyline du mec est filmée comme un rip-off de l'intro de up par un pubard hors de contrôle. et c'est donc ce que c'est, et du coup c'est rapide, créatif, déstabilisant, et le passage obligé - dont il se branle autant que nous d'habitude dans ces machins industriels - devient un morceau de cinéma efficace et stimulant visuellement et tellement inhabituel (à part dans detention, quoi) avec ce rythme et ce ton qu'il te force à te plonger dedans. pas de visionnage passif pour ça, netflix le déteste.
ça continue tout du long, avec ses plans signatures, son obsession du rythme à l'intérieur des scènes. j'étais fasciné et émerveillé par ce style tellement personnel pour un récit tellement mainstream débile. ce style qui s'épanouit au service de mediums très populaires - la pub et le clip - mais qui au cinéma le condamne à la marginalité. mais du coup, à une version tellement créative et vive d'un truc qui pourrait être si basique.
il y a aussi le "fond" dont parle ff. je ne pense pas que rien ne soit fondamental. il y a d'un côté son bashing de l'amérique maga (avec le mal qui est là pour on ne sait pas combien de temps, 4 ou 8 ans ahah), et d'un autre côté son festival de blagues anti-wokes qui auraient provoqué des "yeah !!!" de qui-gon s'il avait été dans la salle, en chaussettes au deuxième balcon du max linder. tout ça ne sert un peu à rien, rentre au chausse pied, n'a pas d'incidence sur le reste du récit, et représente donc deux facettes de sa pensée "politique". et en même temps, c'est très drôle (même si beaucoup trop online pour son propre bien) et là encore tellement personnel que ça le condamne à la marginalité alors que dans l'absolu, ça pourrait être aux halles et faire son petit score, sur netflix et faire son gros score, mais non, il veut sa blague sur jk rowling, ou plutôt sur le mec qui déteste jk rowling.
du coup je suis à la limite d'avoir adoré, j'étais content de pouvoir m'amuser devant des lycéens décimés par une créature maléfique sans que ce soit dans un emballage navrant, j'adore son style ses plans vraiment un régal de chaque instant, j'adore ses blagues vraiment il m'a toujours fait rire dans ses clips ses tweets tout, j'adore le côté kamikaze du truc. il y a des problèmes, plein, mais généralement je sais que j'aime un film quand je me dis "oui non ça ça va pas mais on s'en fout" et je me le suis dit 10 fois dont acte.
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