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MessagePosté: 19 Mai 2024, 18:43 
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Membre des forces spéciales, Aaron Hallam rentre traumatisé par ses opérations au Kosovo. Après qu'il a tué deux hommes venus le chercher dans la forêt, L.T. Bonham, un traqueur, est embauché par le FBI pour les aider à retrouver le tueur. Bonham reconnaît alors la signature d'un des ses anciens élèves, Aaron Hallam. S'engage alors un redoutable jeu du chat et de la souris.

Coupons court au suspense d'emblée : j'avais tort.

Après, je suis loin d'estimer le film aussi haut que ne le font ses plus ardents défenseurs tels Déjà-Vu ou Castorp, mais j'étais plus ou moins passé à côté la seule fois où je l'avais vu, à sa sortie il y a plus de 20 ans (et c'est amusant parce que j'ai eu le même revirement sur un film similaire de la même époque, Apocalypto). Je pense qu'à l'époque, j'étais beaucoup moins réceptif à ce genre de récit épuré alors que c'est justement ce qui fait la force du film bien qu'il s'agisse, en partie, d'une relecture de First Blood.

Le poids de cet héritage évident m'a paru beaucoup moins lourd cette fois-ci grâce aux quelques divergences entre le film de Kotcheff et celui de Friedkin. Chez son prédécesseur, le soldat rentrait dans un pays pour lequel il s'était battu et qui le rejetait, la guerre de Rambo était dirigée contre la société même et non contre ceux qui l'avaient envoyé au casse-pipe. Ici, le PTSD de l'antagoniste (parce que notre protagoniste est davantage le personnage de Tommy Lee Jones, dans une variation de son rôle de The Fugitive) nourrit directement sa colère contre ceux qui ont fait de lui celui qu'il est aujourd'hui. Ses victimes sont ses bourreaux. Pas de simples flics du coin mais les assassins envoyés pour le tuer (même si les pauvres agents du FBI en pâtissent également dans un deuxième temps).
En un sens, The Hunted ne rejoue pas seulement Rambo mais...Rules of Engagement.

Une fois de plus, il est question d'une opération durant laquelle un soldat réputé aurait tué des gens que ses supérieurs du gouvernements qualifient d'innocents tandis que lui prétend qu'ils étaient armés. Néanmoins, cette fois, Friedkin a l'intelligence de ne rien montrer de ces événements, nous laissant dans le doute, comme il se doit. Et in fine, la vérité sur cet incident importe peu, la responsabilité demeure en partie celle de ceux qui l'ont formé, représentés par Bonham donc, l'instructeur qui a fait de Hallam une machine à tuer et qui a ignoré ses lettres. Des preuves que l'on détruit en les jetant dans un feu de cheminée...comme la VHS des images de surveillance dans Rules of Engagement. Friedkin exploite donc des éléments similaires non plus pour défendre l'armée de façon faussement complexe mais pour dresser un portrait plus ambivalent de personnages plus humains dans leur caractérisation (sans pour autant créer d'empathie pour Hallam comme on peut en avoir pour Rambo). En gros, c'est First Blood mais un First Blood où le Colonel Trautmann lui-même serait aux trousses de Rambo...et où Rambo est davantage un Kurtz à éliminer qu'à consoler (d'ailleurs, autant je trouve Jones assez juste en vieil homme alourdi par la culpabilité, autant je goûte peu au surjeu de Benicio Del Toro).

Là je retrouve le Friedkin de l'ambigüité et de la nuance (alors même que le film s'ouvre et se ferme sur la grandiloquence frisant le ridicule de la Bible revisitée par Bob Dylan et Johnny Cash, et la nécessité pour un père de tuer son fils), tout comme je le retrouve dans la sécheresse redoutablement efficace de son découpage, notamment dans l'action.
De l'introduction apocalyptique (seul souvenir - positif qui plus est - que je gardais du film) nous plongeant en enfer au duel final, en passant par la première confrontation déjà intime et cette poursuite au climax assez foufou dans le métro, le film incarne la traque d'une culpabilité à expier.

Le récit accuse tout de même quelques coups de mous à partir du moment où Hallam est capturé, l'exposition freinant la propulsion narrative, comme ce détour cliché et inutile auprès de la femme et de la gamine. Le scénario aurait gagné à radicaliser son approche et à donner les informations non pas immobile dans des bureaux mais sur le chemin, dans l'action. Le film ne fait qu'1h34 mais aurait pu encore être resserré. Et je trouve le film plus fort dans la traque (et l'affrontement) de Hallam par Bonham que dans les meurtres d'autres par Hallam (genre les agents du FBI dans l'usine).

Mais c'est bien.

Diantre, vais-je réévaluer Bug que j'avais détesté???

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MessagePosté: 19 Mai 2024, 18:55 
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Sir Flashball
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Et on est d'accord sur à peu près tout : les forces et les faiblesses du film. C'est pas un chef d'oeuvre, mais c'est un des films les mieux montés/mieux découpés du monde.

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MessagePosté: 19 Mai 2024, 19:11 
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Oui et Friedkin y retrouve un peu de sa weirdness (certaines apparitions de Del Toro) après une série de films anonymes.

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MessagePosté: 19 Mai 2024, 20:58 
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Film Freak a écrit:
Coupons court au suspense d'emblée : j'avais tort.

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Citation:
Après, je suis loin d'estimer le film aussi haut que ne le font ses plus ardents défenseurs tels Déjà-Vu ou Castorp

C'est effectivement peu dire puisqu'il y a des moments qui ne peuvent pas me rendre plus admiratif, il est entièrement contenu dans ses fulgurances et ses ellipses, avec des raccords dingues, aussi fluides que brutaux, ou atmosphériques que poétiques (c'est dit). Il y a un lancer de couteau dont je ne me remettrai jamais, il synthétise d'ailleurs bien le film, aiguisé et furtif.

Citation:
Je pense qu'à l'époque, j'étais beaucoup moins réceptif à ce genre de récit épuré alors que c'est justement ce qui fait la force du film bien qu'il s'agisse, en partie, d'une relecture de First Blood.

Même le fait que ce soit une relecture de Rambo participe de l'épure puisque c'est juste un canevas sur lequel broder avec des personnages archétypaux.

Citation:
De l'introduction apocalyptique (seul souvenir - positif qui plus est - que je gardais du film)

Étonné que tu aies gardé un souvenir positif de cette intro puisqu'elle sent bon le studio et que le côté factice/cheap peut rebuter d'emblée. Cela étant, là aussi, le décalque de l'imagerie d'Apocalypse Now permet de poser les choses rapidement et de s'en contenter, et elle dit bien la nature du film, sur le fil du rasoir entre caricature et épure.

Citation:
Le scénario aurait gagné à radicaliser son approche et à donner les informations non pas immobile dans des bureaux mais sur le chemin, dans l'action.

Ce qui arrive pendant un trajet de Tommy Lee Jones avec les flash-backs de la formation de Del Toro, mais c'est vrai que ce ne sont pas à proprement parler des informations. Après, on peut arguer que les interrogatoires montrent un aspect non négligeable, celui d'une forme de guerre psychologique qui s'exerce aussi bien sur les serviteurs de la patrie que sur les ennemis désignés, à l'abri du "théâtre des opérations".

Citation:
Le film ne fait qu'1h34 mais aurait pu encore être resserré.

En théorie c'est toujours possible mais franchement je sais pas, ça me semble reposer sur un équilibre un peu fragile et au mieux de ce qu'on peut faire dans le cadre d'un film mainstream alors que le geste relève déjà pour moi de l'abstraction.

Castorp a écrit:
C'est pas un chef d'oeuvre, mais c'est un des films les mieux montés/mieux découpés du monde.

Je vois bien en quoi on peut considérer que ce n'est pas un chef-oeuvre, sauf que... C'est un des films les mieux montés/mieux découpés du monde. CQFD.


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MessagePosté: 20 Mai 2024, 08:11 
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Sir Flashball
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Déjà-vu a écrit:
Je vois bien en quoi on peut considérer que ce n'est pas un chef-oeuvre,


Comme le dit Freak, le scénario aurait gagné à être encore plus au cordeau. C'est un gros 5/6 quand même, mais manque un truc pour que je sois complètement à fond.

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