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MessagePosté: 10 Jan 2022, 22:24 
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Alors qu’il traverse une mauvaise passe, le charismatique Stanton Carlisle débarque dans une foire itinérante et parvient à s’attirer les bonnes grâces d’une voyante, Zeena et de son mari Pete, une ancienne gloire du mentalisme. S’initiant auprès d’eux, il voit là un moyen de décrocher son ticket pour le succès et décide d’utiliser ses nouveaux talents pour arnaquer l’élite de la bonne société new-yorkaise des années 40.

Dire que chez Guillermo del Toro, les vrais monstres sont les humains tient désormais d'une lapalissade mais il est tout de même intéressant de voir l'auteur surenchérir sur cette idée dès les premières minutes de son dernier opus, nouvelle adaptation du roman Le Charlatan, porté à l'écran une première fois en 1947, et première excursion hors de zone de confort. Troquant le fantastique pour le film noir, Del Toro garde toutefois son œil et son goût pour les univers autres.

Le récit a les deux pieds ancrés dans l'horrible réalité mais le monde interlope qu'il nous fait visiter durant sa première moitié baigne dans une atmosphère autre, avec cette esthétique de film d'horreur, notamment dans la direction artistique à tomber et la photographie de Dan Laustsen, sans doute la plus belle depuis que le metteur en scène est passé au numérique. Il ne s'agit pas juste de l'underworld du crime mais d'une fête foraine où les freaks sont truqués, comme cette femme-araignée. D'ailleurs, il est intéressant de voir comment Del Toro, qui a ouvert plusieurs de ses scénarios avec des professions de foi comme "Les fantômes/les sorcières existent" s'amuse à montrer que tout est faux, avec notamment ses explications des techniques du mentalisme utilisés par des artistes se faisant passer pour des médiums. Néanmoins, les ogres prédateurs sont bien réels, tel ce Monsieur Loyal qui explique comment transformer un honnête homme en véritable animal, et c'est lorsque l'on se met à croire à ses propres illusions que l'on se perd.

Ainsi le cinéaste prend-il le temps de construire le microcosme cruel qui va forger son protagoniste et raconter justement comment l'humain devient monstre. Du mystérieux vagabond muet des débuts, Stanton Carlisle devient peu à peu un homme fatal, usant de son apparence et de ses charmes pour apprendre et se hisser au-delà de son statut. C'est évidemment ce que le film propose de plus original vis-à-vis du genre qu'il travaille, cette exposition qui se permet un détour, un autre décor, un arc élaboré, engageant et une subversion de son archétype-phare.

Malheureusement, si l'élégance persiste quand on passe de l'enfer forain à la séduction du luxe art déco, le récit précipite sa conclusion. Le personnage malin qui nous avait tant charmé devient trop négligent, le scénario ayant recours à des raccourcis pour le justifier.
Pourquoi ce mec qui a toujours pris le plus grand soin à ne jamais boire décide de boire d'un coup?
Les nouveaux personnages qui apparaissent tardivement, de l'antagoniste joué par Richard Jenkins à la femme fatale incarnée par Cate Blanchett, sont réduits à des clichés, ne dépassant justement jamais leurs archétypes. Alors qu'il a passé un temps fou à composer des protagonistes multidimensionnels (cf. le personnage secondaire de voyante interprétée par Toni Collette et le ménage atypique qu'elle fonde avec son mentaliste de mari et Stanton), le film se contente soudainement de tropes creux.

Tombant alors petit à petit dans les schémas attendus, ce troisième acte appauvrit le film et laisse la désagréable impression que Nightmare Alley se cantonne à n'être au final que Le Petit Guide du Film Noir Illustré, gâchant même cette fin qui sonne horriblement juste mais apparaît simultanément si téléphonée qu'elle peine à satisfaire.

J'avais déjà été déçu par La Forme de l'eau que je trouvais riche mais un peu évident mais là, si j'ai trouvé la première moitié supérieure à son précédent, je reste à nouveau sur ma faim.

J'espère que le deuxième Del Toro de 2022, son Pinocchio en stop motion, sera plus abouti.

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MessagePosté: 11 Jan 2022, 13:18 
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Film Freak a écrit:
si j'ai trouvé la première moitié supérieure à son précédent, je reste à nouveau sur ma faim.


Ouch.

Film Freak a écrit:
son Pinocchio


Ouch.

Film Freak a écrit:
en stop motion


Ouch.

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MessagePosté: 21 Jan 2022, 10:55 
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Assez partagé sur le film. Je trouve que Del Toro fait un film assez lisse où tu sens que c'est son film "post oscar", où les aspérités de son cinéma sont cantonnées dans des bocaux au formol. Tout est très bien fait, que ce soit cet univers de fête foraine vintage où tout est bien à sa place avec son ambiance Freaks et ce virage inattendu (qui m'a sincèrement surpris) vers le film noir art déco baroque là encore visuellement parfait mais avec un travail de copiste dévitalisé et presque artificiel (Cate Blanchett en fait des caisses en femme fatale). Du coup je regarde ça d'un peu loin, cependant le film finit par m'avoir un peu à l'usure, d'une part parce que son récit est plutôt malin dans sa construction en deux parties que j'ai trouvé réussie. Et d'autre part je trouve assez passionnant ce que dit le film sur le cinéma même de Del Toro, sur l'illusion, le commerce du fantastique, le mensonge pour rassurer les âmes en peine.... Et j'ai absolument adoré le dernier plan (que j'avais pas tellement vu venir perso). Et c'est que vers la fin que le vernis finit par craquer un peu et qu'il se lâche avec deux trois moments de violence bien Del Toro assez kiffants.

Donc j'ai pris du plaisir à voir le film, les 2h30 passent très vite, le casting est excellent (même si j'aurais adoré voir ce que Di Caprio, qui devait le faire à l'origine, aurait apporté), c'est très beau, pleins de plans iconiques. Mais il y a quelque chose qui me laisse un peu à la porte, j'aurais aimé quelque chose de plus sale, de plus trouble. Sinon fascinant générique final où il ne peut pas s'empêcher
de plonger enfin dans le bocal à formol


4/6

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MessagePosté: 21 Jan 2022, 19:33 
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Je découvre que c’est co-écrit/co-adapté par Kim Morgan que je connais pour :

"Kim Morgan has written for The New Beverly, Sight & Sound, The Criterion Collection, Playboy, The Los Angeles Review of Books and many other outlets. She's presented films for Turner Classic Movies, FilmStruck, sat in for Roger Ebert, served as short films juror at the Sundance Film Festival and was co Guest Director at the 2014 Telluride Film Festival."

Étonnant !


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MessagePosté: 22 Jan 2022, 16:13 
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Il me semble que Kim Morgan est sa compagne actuelle. Del Toro à divorcé de sa femme il y a quelques années. Kim Morgan a aussi écrit pour Del Toro sur La forme de l'eau.


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MessagePosté: 22 Jan 2022, 20:46 
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Sans être créditée ou tu confonds avec Vanessa Taylor ?

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MessagePosté: 22 Jan 2022, 21:19 
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Assez d'accord avec Freak et Art. Film bien foutu, dense mais un peu lisse. Ca reste très reccomandable mais depuis 3 films Del Toro me déçoit. Pas très fan de son tournant vers un cinéma plus "classique" à qui il manque le grain de folie présent dans ses précédents films. Ca reste un honnête hommage aux films noirs et à Tod Browning mais c'est du cinéma trop propre et je n'en garderais pas un gros souvenir.

Art Core a écrit:
le casting est excellent (même si j'aurais adoré voir ce que Di Caprio, qui devait le faire à l'origine, aurait apporté)
C'est clair. Entendons nous, Bradley Cooper est très bon mais Di Caprio aurait amené ce grain de folie qui manque au film. C'était vraiment un rôle taillé pour lui.


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MessagePosté: 25 Jan 2022, 11:20 
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Marrant ça même si je vois pas du tout l'intérêt (d'ailleurs jamais vu le Mad Max en N&B) :

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MessagePosté: 25 Jan 2022, 11:52 
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Art Core a écrit:
(d'ailleurs jamais vu le Mad Max en N&B)

Aucun intérêt. Tu perds, de fait, toute la palette du film.


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MessagePosté: 25 Jan 2022, 12:07 
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Ah ben flûte je comptais le voir cette aprèm. Du coup j’hésite...

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Liam Engle: réalisateur et scénariste
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MessagePosté: 25 Jan 2022, 12:11 
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Qui-Gon Jinn a écrit:
Ah ben flûte je comptais le voir cette aprèm. Du coup j’hésite...

Pour le coup le côté "film noir" peut faire hésiter oui.

Citation:
Art Core a écrit:
(d'ailleurs jamais vu le Mad Max en N&B)

Aucun intérêt. Tu perds, de fait, toute la palette du film.

Pas plus convaincu par celle de Logan d'ailleurs.


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MessagePosté: 25 Jan 2022, 12:19 
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MessagePosté: 25 Jan 2022, 12:47 
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Un film noir qui se passe dans les années 40, c'est un peu plus raccord quand même. La comparaison avec Mad Max est bizarre. (je trouve la photo assez laide, si je me base sur la bande-annonce, donc peut-être cela m'intéresserait-il).


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MessagePosté: 25 Jan 2022, 14:32 
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Ça a un sens si c’est la volonté d’origine du réalisateur. Pour The Mist c’était justifié.

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Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)


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MessagePosté: 25 Jan 2022, 14:38 
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Pour ce film, il semblerait que Del Toro ait vu les "dailies" en noir et blanc et que ça lui ait plu comme ça.


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