Forum de FilmDeCulte

Personne n'avait vu venir le deuxième film du scénariste des Promesses de l'ombre après un Jason Statham movie qui lui a valu son galop d'essai, et à ma grande stupéfaction c'est celui-là qui a été déclaré vainqueur à l'applaudimètre de la dernière Mostra. Pourtant, le concept demeure très rudimentaire: 90 minutes avec le seul Tom Hardy au volant de sa bagnole en mode conference call. Locke, père de famille responsable promis à une brillante carrière, est dans une sacrée mouise: Il roule en temps réel vers Londres assister à l'accouchement prématuré d'un one night stand afin de reconnaître l'enfant, alors qu'il devrait à la fois être dans son canapé avec sa femme et ses deux gosses pour regarder un match de foot à la télé, et à son taf en urgence pour boucler un dossier brûlant incluant des fermetures de route et des plans nucléaires. Et sinon, il a aussi de petits accès de schizophrénie à parler à son père absent sur le siège arrière. Tom Hardy a beau délivrer une performance beckettienne ne passant que par la voix et le regard car littéralement encastré au volant (il aurait d'ailleurs fait un bien meilleur prix d'interprétation si le film avait été en compétition que le bidochon grec avec son rôle crapoteux), l'asphyxie des appels se succédant à un rythme effréné a beau se faire avec une confondante fluidité, il faut passer sur pas mal d'éléments un tantinet foireux du scénario (le plus gros étant qu'un personnage aussi lucide et exemplaire puisse décider de tout raconter à sa femme au téléphone sur l'autoroute, et d'envoyer valdinguer son job) pour ne pas être freiné par l'artificialité de l'exercice de style, d'ailleurs au final pas si original que ça (remember Buried avec Ryan Reynolds il y a deux ans), avec une mise en scène limitée à des halos de lumière nocturnes en pleine circulation.
3/6

Bon moi j'ai trouvé que c'était pas loin d'être un petit miracle.

Locke c'est une écriture remarquable qui applique un traitement de thriller high concept à un drame humain pour mieux exacerber la façon dont la vie d'un homme s'écroule (ne lisez rien sur l'intrigue, pas même l'avis ci-dessus) et ce sans jamais tomber dans le simple exercice de style vaguement creux.
S'il existe bien une destination où le protagoniste doit se rendre au plus vite, le scénario ne crée pas vraiment de ticking time-bomb artificiel pour ajouter de la tension. Au lieu de ça, Knight laisse les révélations et les confrontations naissant d'une situation tristement commune créer des enjeux dramatiques engageants.
Même l'intrigue secondaire, articulée autour d'une galère professionnelle et qui paraît initialement hors sujet, n'est pas là par hasard. Non seulement elle participe à la caractérisation exemplaire de ce personnage animé par sa rationalité à toute épreuve, mais elle fournit également un parallèle pertinent au parcours de ce Ivan Locke, soucieux de construire convenablement alors qu'il s'auto-détruit simultanément.

La performance de Tom Hardy en M. Tout-le-monde, prouvant une fois de plus qu'il est LE caméléon de sa génération, est absolument parfaite, avec cet accent gallois et cette diction super calme qui participe à la création d'un protagoniste relativement atypique. Pas de cabotinage, pas de show, et ça sert tant la prestation que le personnage, ce mec guidé par sa logique et son envie de faire les choses bien.

Knight enferme Locke dans cette voiture, qui roule sans jamais n'arriver sur les autoroutes dans une ambiance nocturne comme une version réaliste et hors genre de Drive, l'isolant du reste du monde (on ne voit pas le moindre bout d'un autre être humain) et multipliant les voix au téléphone comme autant de responsabilités qui se rappellent sans cesse au personnage.
Le seul bémol de l'écriture sont ces quelques passages schizo, plus grossiers alors que les dialogues sont d'un naturel incisif le reste du temps.

La mise en scène aurait sans doute pu être davantage verrouillée également (j'ai l'impression que le montage alterne les angles sans réellement se demander si c'est l'axe ou l'échelle de plan qui va servir au mieux le moment présent) mais demeure des plus efficaces dans cette forme mi-spleen mi-claustro, sublimée par la photo au lampadaire orange.

Alors attention, je ne veux pas monter la tête de quiconque, même si ce sera inévitablement le cas, et le film reste ce qu'il est, avec les limites du genre (qui, désolé DPSR, n'a pas été inventé par Buried) mais raconter autant avec une telle épure, c'est un vrai tour de force. Et parvenir à toucher avec ça, encore plus.

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Plans nucléaires? Ok.
Bon, c'est très anglais, c'est du kitchen sink drama en sourdine et qui se passe dans une voiture, ça fait fi de toute vraisemblance, le héros est impossiblement suave, quand un personnage lui dit à quel point ils sont différents, qu'elle aime les livres, contrairement à lui, ce genre de choses, on y voit rien d'insolite, on l'imagine davantage lire un bouquin chez lui que de regarder un match de foot en buvant de la bière avec ses enfants. En même temps, c'est le sujet du film, un héros qui n'est plus censé être lui-même. Il est d'une décence rare en tout cas.
C'est pas mal, malgré quelques fautes de goût, c'est du mélodrame, mais avec une distance inhabituelle;

Très juste, et ça marche vraiment bien.



Ce type est phénoménal. Je me rends compte que je n'ai quasi rien vu de lui (Inception, Bronson, Layer Cake, TDKR), mais quelle puissance dans le calme. Vais me regarder fissa le reste de sa filmo, à commencer par Warrior. Je suis amoureux, putain. Et quelle voix il a... c'est ouf. Le même genre de coup de foudre tardif à la Farrell dans Phone Game (pas vu Burried).



C'est pas trop gênant. J'aurais préféré qu'il se parle à lui-même à la rigueur, ou mieux, qu'il y ait de vrais silences pesants.
Pareil pour la musique, qui donne une touche Collateral (sans le cachet singulier de Mann/Beebe à l'image), un mood de virée nocturne et de mâle solitaire... mais j'aurais bien tenté quelque chose de dénudé, de plus sec.



J'aime bien la photo, mais la mise en scène est en mode shuffle, effectivement.


C'est le gros point noir du film je trouve, même si forcément, vu le dispositif, Knight retombe sur ses pattes grâce à la cohérence de l'ensemble. Dommage qu'il néglige à ce point l'impact que peut avoir un découpage. Mais je comprends aisément qu'il ait préféré plonger et faire avec les contraintes du tournage (la route, la nuit etc.).

Le scénario patine un peu dans le derniers tiers (le fils teubé avec son match... bref tout le monde qui décompense tandis qu'il garde la tête froide) mais j'aime beaucoup quand même, comme tu le dis en grande partie grâce à l'écriture du perso de Locke. Voilà un vrai personnage, original, fort, qui donne immédiatement envie de s'identifier. Ça marche à fond.

Un bon 4/6 qui passe tout seul

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I think we're gonna need a helmet.

Yes!

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Légers spoilers.

Super cool. Personnage en béton. Je me suis un peu reconnu en lui à certains moments : le moment ou le mec gère (potentiellement mal) deux trucs graves en même temps en mode bats-les-couilles/get-shit-done sans montrer une émotion, avec sa femme qui lui demande comment il peut se préoccuper de son taff et qui le démonte, c'est du vécu. Après, le portrait du perso reste assez gentil pour que ça permette l'empathie et que chacun se retrouve (ou croit se retrouver) dans un des traits de caractère du mec.

Effectivement la réa est en mode shuffle. Surtout les fondus enchaînés dans tous les sens, on dirait un algo qui mixe les plans en fonction du son. Dommage.

4.5/6

Je ne savais rien hormis le concept, donc j'y allais en m'attendant à un film de genre. D'ailleurs (loup-garou) lorsqu'il parle de béton au début, je pensais que ça avait rapport à cacher un cadavre, ou un truc dans le genre.

Mais peu à peu j'ai bien sûr compris qu'on était quasiment dans un film français. J'ai été sidéré de voir à quel point le film joue sur des petits rien. Peu d'esbroufe scénaristique ou visuelle (les possibilités de filmage de la voiture sont d'ailleurs à peine exploitées), pas de cache-misère, juste l'enchaînement des coups de fils et des lampadaires. On réussit à être captivés, hypnotisés, par cette successions d'interlocuteurs et la voix douce de Tom Hardy qui finit par nous bercer, mais je me suis quand même un peu ennuyé et j'ai trouvé que ça manquait de catharsis sur la fin. C'est bien mais c'est au final trop ouaté, trop fermé, trop secret.

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Liam Engle: réalisateur et scénariste

Il y a un dtv qui date de l'an dernier avec Paul Walker, Vehicle 19 et qui partage son concept avec Locke, ça se passe intégralement dans une voiture. La mise en scène n'a rien de spécial, mais pour ceux qui aiment Paul Walker, le film vaut le détour.

Quelle indulgence ici. J'ai trouvé ça chiant à mourir. Le film tellement écrasé par son dispositif.

Je pense que le dispositif est un leurre.

Le film, c'est avant tout un comédien, un personnage et une voix. Imparable.

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I think we're gonna need a helmet.

Clair, la bagnole est absolument pas exploitée.

+1, parfait dans le genre long-métrage qui aurait du ne rester qu'un court.
Sérieux...