Forum de FilmDeCulte

Le forum cinéma le plus méchant du net...
Nous sommes le 05 Nov 2024, 10:30

Heures au format UTC + 1 heure




Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 5 messages ] 
Auteur Message
MessagePosté: 10 Mar 2012, 18:38 
Hors ligne
Teacher

Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
Messages: 11667
Plus envie de poster dans le topic africain tout salopé, là...

Image

Diouana, une jeune Sénégalaise, suit ses patrons blancs lorsqu'ils rentrent en France. Mais sur place, écartée des enfants dont elle devait s'occuper, et devient bonne à tout faire...


C'est beaucoup plus motivant que je ne l'imaginais (n'étant pas un grand fan de Moolaadé, qui s'avère par comparaison beaucoup moins solide que ce premier long). La noire de évoque d'un côté la caricature qu'on pourrait se faire d'un cinéma politique des années 60, mais y appose cependant une ultra-sécheresse qui donne une couleur particulière à sa dimension militante (sécheresse qui se traduit par une absence de pathétique, par exemple : je me demande bien qui peut voir venir la résolution, tant l'enchaînement qui y mène est dépassionné - ce qui ne veut pas dire désinvesti). Pour le dire plus simplement, ça m'évoque encore une fois beaucoup la modernité : un rapport distant à la réalité, une façon d'approcher les protagonistes comme autant d'objets observés. J'ai ainsi l'impression d'un réalisateur en équilibre, le didactisme ambiant trouvant un jumeau inversé dans l'extrême littéralité du ton, comme si ces deux approches se disputaient la prise en charge de cette histoire, se neutralisant l'une l'autre.

Sembène réussit en tout cas vraiment un pan de son film : le dialogue qui naît de l'alternance entre l'abstraction discrète de l'appartement français (blanc, nu, linéaire, marqué par le silence et la parole à sens unique) et les flash-backs africains plus doux (discontinus, musicalisés, pris dans le liant de la voix-off continue). La façon dont le personnage de Diouana se referme, bloc de silence ambulant qui ne renvoie plus la balle aux interpellations pour laisser vagabonder sa pensée (répondant dans sa tête, se réfugiant dans les souvenirs), évoque en quelque sorte la posture du film vis à vis du drame qu'il raconte : un rejet en bloc du fait divers signifiant pour une approche presque conceptuelle, qui atteint son paroxysme lors des scènes du masque, objet-fil-rouge aux accents ancestraux devenu symbole identitaire, jusqu'à raccompagner le colon hors des terres.

Je conserve un gêne, dans l'ensemble : même si contrebalancée et canalisée, la caricature du trait est souvent pénible, la parabole politique est par de nombreux aspects naïve et facile. Mais globalement le film est convaincant, et surtout remarquable de précision pour un premier long.


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 12 Mar 2012, 11:32 
Hors ligne
Schtroumpf sodomite
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 22 Mar 2006, 22:43
Messages: 24601
Localisation: Arkham Asylum
Ma très médiocre et lamentable connaissance du cinéma africain se limite à deux films de Sembène (je compte pas Rouch) : Moolaadé et Camps de Thiaroye, que j'aime vraiment beaucoup. Je sais pas trop ce que tu entends pas "solide", mais je les trouve d'autant plus fort qu'ils sont extrêmement simples.

_________________
N'écoutez pas Film Freak


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 12 Mar 2012, 19:31 
Hors ligne
Teacher

Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
Messages: 11667
Solide parce qu'impression d'un projet esthétique plus conscient et maîtrisé, là où Moolaadé avait parfois un côté illustratif un peu hasardeux. Dur d'être plus précis, vu que la vision de Moolaadé date (c'est le premier film africain que j'avais vu), et que j'ai toujours autant mal à faire le tri entre ce qui relèverait d'une esthétique de ces pays (que j'aurais alors du mal à résumer à de la simplicité), ou ce qui relèverait de carences et de maladresses (et non, ce n'est pas un appel à relancer la discussion...)

Sinon là j'essaie de trouver Kodou, les images qui traînent sur le net suggèrent un truc très bien.


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 13 Mar 2012, 09:46 
Hors ligne
Schtroumpf sodomite
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 22 Mar 2006, 22:43
Messages: 24601
Localisation: Arkham Asylum
"Illustratif" c'est un qualificatif qui m'étonne beaucoup. Par "simple" j'entends direct, sans chichi, qui va droit au but (mais en prenant son temps, sans raccourcis). Je pense (mais ce n'est qu'une intuition) que c'est quelque chose de propre au cinéma africain. Et c'est ce que j'ai apprécié chez Sembène, cette capacité à ne pas s'embarrasser de petits effets de manche stylistiques ou à sur-dramatiser le récit. Il parle de chose grave sans gravité et n'hésite pas à emprunter la voix du téléfilm pour concentrer son regard sur ce qu'il a à dire (le revers pervers de la tradition) et à montrer (l'Afrique telle qu'elle est, loin du regard post-colonial) et dans ce cas précis, c'est la meilleure chose à faire. Camps de Thiaroye, j'ose même pas imaginer le gros pensum lourdingue (façon le dernier Kasso) que ça aurait été si ça avait été fait par des Français.

_________________
N'écoutez pas Film Freak


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 13 Mar 2012, 09:56 
Hors ligne
Teacher

Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
Messages: 11667
"Illustratif" faute de mieux pouvoir comprendre l'intérêt d'un travail dont j'ai du mal à sentir les traces. Ce dont je parlais dans le topic associé : le fait que tous les points de montage arrivent en début de dialogue par exemple, que tout soit dit et expliqué texto par la parole, qu'il y ait justement un danger de pensum politique (si on le prend sans le remettre en perspective, le film ressemble quand même méchant à une démonstration scolaire didactique, tout comme La noire de... d'ailleurs). Là je joue au béta, je sais bien que c'est une vision déformée liée à mes habitudes de cinéma occidental, et que les points que j'énumère sont justement les signes d'une esthétique propre. Mais "la voie du téléfilm", j'ai du mal à considérer que ce soit valable, la simplicité que tu évoques ne peut se résumer à un désinvestissement de la mise en scène (parce que dans ce cas c'est un avis qu'on peut copier-coller sans y regarder mieux à tous les films du continent sur quarante ans)... Attention, je ne cherche ni de chichi, ni maniérisme, ni romantisation, encore moins d'exotisme, mais dans le cas de Moolaadé, je trouve ce dépouillement pas assez affirmé, pas assez "travaillé" en un sens, pour qu'il soit réellement efficace sur moi.

De toute façon c'est comme tout, les films centre-africains, tant que j'en aurais pas vu à la pelle, il sera dur de bien sentir comment cela marche.


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 5 messages ] 

Heures au format UTC + 1 heure


Articles en relation
 Sujets   Auteur   Réponses   Vus   Dernier message 
Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Emitaï (Ousmane Sembène - 1971)

sponge

0

1242

15 Nov 2007, 23:58

sponge Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. La boite noire (Richard Berry - 2005)

Zaphod

0

1541

13 Nov 2005, 10:24

Zaphod Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Vénus noire (Abdellatif Kechiche - 2010)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2, 3, 4 ]

DPSR

59

6507

24 Juin 2015, 12:48

Karloff Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Boîte noire (Yann Gozlan, 2021)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2 ]

Art Core

21

2472

23 Oct 2023, 14:48

Arnotte Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. La Tulipe noire (Christian-Jacque - 1964)

FingersCrossed

5

178

19 Sep 2024, 06:34

Cosmo Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Pluie noire (Shoei Imamura - 1989)

DPSR

1

1472

05 Aoû 2007, 10:08

Karloff Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. La Forteresse noire (Michael Mann, 1983)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2, 3 ]

mannhunter

33

4601

12 Juil 2009, 17:21

Jericho Cane Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. OSS 117 : Alerte Rouge en Afrique Noire (Nicolas Bedos, 2021)

Fire walk with me

2

683

25 Fév 2022, 08:07

Müller Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Série noire pour une nuit blanche (John Landis, 1985)

Cyniquotron

0

204

24 Mar 2024, 12:56

Cyniquotron Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. L'Hirondelle d'or (King Hu - 1966)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2 ]

Tom

18

3044

29 Sep 2011, 11:02

Tetsuo Voir le dernier message

 


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Dorian et 29 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Rechercher:
Aller à:  
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction par: phpBB-fr.com
phpBB SEO
Hébergement mutualisé : Avenue Du Web