J'ai trouvé cela supérieur à
Margin Call, parce que plus ambitieux (McKay ne se contente pas de nous montrer les répercussions de la crise des subprimes sur un simili Lehman Brother et de la course à l’échalote qui s'ensuit) et portée par une vraie volonté pédagogique. Comme boultan j'ai apprécié l'intelligibilité du film, je trouve les racines de cette crise bien expliquées et suffisamment accessibles pour un néophyte pour ce que ce soit un minimum compréhensible (c'est vraiment le but des vignettes avec Margot Robbie, Anthony Bourdain et Selena Gomez que d'imager le plus possible ces manipulations financières). Impossible par contre de s'affranchir totalement du jargon de la finance (et McKay fait l'effort à chaque nouveau terme de l'expliquer avec des inserts à l'écran), parce qu'une note triple A ben c'est une note triple A, et que c'est la fraude (ou à minima la malhonnêteté) associée à l'obtention de cette note qui est une des racines du mal (la démonstration de Gosling dans les bureaux de FrontPoint avec sa tour infernale est de ce point de vue très éclairante). Je n'étais pourtant pas la cible du film, je n'y ai rien appris que je ne savais déjà, mais je trouve néanmoins louable qu'un réalisateur hollywoodien décide de s'atteler à une tâche qui peut paraître aussi ingrate. Riche de son exhaustivité et de ses efforts de vulgarisation, j'ai vraiment eu l'impression qu'au-delà de faire un film sur la crise des subprimes, c'est bien plus une mise en garde à l'attention de l'américain moyen (voir au-delà) que McKay a souhaité faire : Méfiez-vous de tous ses escrocs qui mettent en péril votre vie et celle de vos enfants. Et rien que pour ça, je suis prêt à passer sur certains moments qui frise la vulgarité (comme c'était encore le cas avec
Vice plus récemment), parce que je trouve la nature du geste plus importante que son esthétique.
S'il y a malgré tout un point qui retient ma totale adhésion, c'est l'angle choisit pour traiter ses personnages principaux.
Gontrand a écrit:
Le contenu est celui d'un bon reportage télé, mais McKay a l'air politiquement sincère, et Bale et Carrell m'ont touché (j'aime bien les séquences sur leur enfance, qui rendent leur vocation de justiciers cyniques opaques plutôt qu'elles ne l'expliquent).
Burry, Baum, Geller et Shipley ne sont absolument pas des justiciers, ce sont des requins d'une autre espèce mais des requins tout de même. Ce qui les motive n'est pas différent de ce qui motive les autres présidents de hedge fund, faire du pognon, le plus possible pour que leur fond grandisse et attire toujours plus de clients. Leur initiative consiste ici à tirer profit d'une situation qu'ils sont peu à avoir analysé correctement, absolument pas à venger le contribuable américain des méfaits des institutions financières. Le seul qui semble avoir une vraie réputation de "justicier" c'est Baum/Carrell, mais lorsque l'occasion se présente de vraiment se mettre en marge du système, il fait comme les autres, il vend ses titres et s'en met plein les fouilles. C'est là où le film montre le plus clairement ses limites, puisqu'ils opposent les bons gérants de hedge fund au méchant banquier qui au travers de la titrisation ont regroupé leurs pires titres pour en faire une merde explosive. Mais c'est pourtant la même engeance, tout aussi nuisible d'un bout à l'autre de la chaîne. McKay ne peut malgré tout pas s'empêcher de nous faire ressentir de l'empathie pour ces quatre là, peut-être aussi que le système hollywoodien n'aurait pas permis qu'il n'y ait aucun héros dans cette histoire, que cela rende le film trop hermétique. Je pense que d'une certaine manière il s'en rend compte, et c'est le rôle dévolu à Brad Pitt, qui permet aux deux plus jeunes de s'enrichir malgré tout le dégoût qu'il ressent pour ce ce milieu.
4/6