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 Sujet du message: 48 Hrs. (Walter Hill - 1982)
MessagePosté: 30 Jan 2022, 00:46 
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Après The Warriors, adapté d'un roman lui même inspiré de l'Anabase de Xénophon, Walter Hill s'attele à un genre qui prend ses racines dans l'Epopée de Gilgamesh : la buddy story.

L'ouverture renvoie au western, avec son chain gang en plein soleil et l'évasion brutale des deux criminels, James Remar et Sonny Landham, duo d'antagonistes parmi les plus dégueulasses et impitoyables du genre. Deuxième coup de marteau avec la fusillade dans l'hôtel de San Francisco, où l'on peut apprécier Jonathan Banks dans un rôle en négatif de celui de salaud sadique qu'il tient tout aussi bien dans Beverly Hills Cop. Comme d'hab, le reste tient du poncif : commissariats en open space avec un supérieur noir qui crie, personnages féminins soit pénibles (Nick Nolte répète le même schéma, triangle en moins, que dans Extreme Prejudice : "pourquoi tu me parles pas de ce qui va pas, pourquoi tu veux pas communiquer ?" "... j'ai du boulot."), soit pénibles et malveillants (les fausses lesbiennes), les filatures, les poursuites, les steeldrums complètement hors de propos de James Horner qui s'entraînait pour la B.O. de Commando...

Ce qui frappe encore aujourd'hui, c'est la manière dont les deux personnages principaux sont pour le coup radicalement opposés, et la violence immédiate, et à sens unique, de leur cohabitation : les humiliations, les brimades, la brutalité verbale, psychologique et physique du personnage de Nolte envers celui d'Eddie Murphy. Ca monte jusqu'à l'insulte raciste et la bagarre (dernier coup de poing gênant, même pour l'époque), après laquelle s'opère un virage disons plus "respirable" dans la relation. De tête, j'ai du mal à trouver un équivalent dans le genre buddy movie où ça démarre vraiment mal, et où ça dure aussi longtemps. Ce malaise est quand même tempéré par tout le passage dans le bar confédéré, jouissif, ou encore une des plus belles scènes d'excuses maladroites que j'ai pu voir à l'écran.

Les dialogues sont particulièrement bien ciselés même pour du Walter Hill qui est généralement, et jusqu'à un certain point dans sa carrière, exemplaire à ce niveau. Et comme à l'accoutumée à cette période pour le cinéaste, chaque ficelle est exploitée jusqu'au bout, avec ce côté très carré tout en restant par moments étonnant (le plan séquence dans le commissariat qui sort de nulle part et peut même passer inaperçu).

Moins "plus grand que nature" que les Lethal Weapon qui ont suivi, dopés aux performances de Mel Gibson et Danny Glover et à l'écriture de Shane Black, pur hommage aux pulps de Warren Murphy (à l'écriture pour LW2) et notamment à sa série de romans Razoni & Jackson, 48 Hrs. souffre surtout de son image de précurseur qui le rend d'office daté, alors qu'il tient toujours très, très bien la route, ce qui n'est pas, dans mon souvenir, le cas de sa suite. Heureusement entre les deux il y a eu Red Heat.

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MessagePosté: 30 Jan 2022, 16:36 
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Probablement mon Walter Hill préféré : à ajouter à tes louanges, je parlerai de la photo de Ric Waite qui rend la ville la nuit complètement irréelle (et qui contrate totalement avec les journées ternes) et qui marche totalement avec le genre de pseudo-western qu'utilise Hill. Ça ne s'arrête pas à la scène du début mais on a également le bar redneck où Reggie prend le chapeau de cow boy et annonce qu'un nouveau shérif est en ville, et l'attitude de Jack en mode John Wayne tout du long qui déteste la paperasse et voit San Francisco comme son fief où il traque deux desperados en quête d'un butin, traque où se multiplient les duels jusqu'à celui dans la ruelle.
Là encore super boulot de Waite avec des plans qui seront similaires à celui d'un autre cow-boy urbain, l'Inspecteur Harry de retour dans Sudden Impact :

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Totalement d'accord avec toi sur le côté "anti-buddy movie" où la formule "first they meet, then they fight, then at the end they fuck" passe plus de temps sur les deux premières étapes que sur la dernière.
Là encore, tout le brio de Hill, qui joue des stéréotypes raciaux mais les explose également : tu as le shérif raciste et le black grande gueule mais, par le biais d'une saine démonstration de violence et de bourre-pif, Hill les rend égaux. Il y a un bon essai (le seul bon épisode d'ailleurs) dans la série assez nulle de Netflix, Voir, qui est consacré à 48hrs et le commentateur décrit bien comment les deux styles des pugilistes participent de leur caractérisation.

Mine de rien Walter Hill a, en quelques années, donné le la de deux sous-genres différents : d'abord avec Alien et ensuite avec celui-ci où il reprend des formules classiques (en louchant vers Hawks notamment : The Thing From Another World pour l'un, El Dorado pour l'autre) mais les éloigne de la déconstruction critique des 70s à laquelle il a participé avec Peckinpah, pour en retrouver l'essence derrière le vernis reaganien.

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Dernière édition par JulienLepers le 30 Jan 2022, 17:12, édité 1 fois.

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MessagePosté: 30 Jan 2022, 17:11 
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Revu aussi avec grand plaisir cette semaine. Cela n'a pas vieilli. Comme un western.


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MessagePosté: 30 Jan 2022, 20:48 
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Tout ça fait chaud au coeur.

Citation:
Probablement mon Walter Hill préféré : à ajouter à tes louanges, je parlerai de la photo de Ric Waite qui rend la ville la nuit complètement irréelle (et qui contrate totalement avec les journées ternes) et qui marche totalement avec le genre de pseudo-western qu'utilise Hill.


La dernière scène avant le final showdown, où ils boivent un verre dans un bar, abattus, lessivés. Il y a un plan fixe de Murphy qui touille son verre, le regard perdu dans le vide. C'est du Hopper mâtiné de Rembrandt. Et je pèse mes références.

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MessagePosté: 31 Jan 2022, 01:29 
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Enfant, j'ai découvert le 2 avant, sans savoir qu'un 1 existait et c'est devenu un de mes films cultes. Quand j'ai découvert le 1 plus tard, je l'ai trouvé moins bien et daté (et plus tard encore, j'ai acheté le 2 en DVD et j'ai fini par le revendre parce que j'ai revu le film à la baisse) mais l'épisode de la série Voir sur Netflix consacré au film et son étude du racisme m'ont donné envie de lui redonner une chance.

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MessagePosté: 01 Fév 2022, 08:40 
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MessagePosté: 01 Fév 2022, 09:42 
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C'est honnête, 48 heures de plus. Ça a juste le problème d'être le clone du premier.

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MessagePosté: 01 Fév 2022, 15:17 
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Des gros soucis de coupe aussi, dont Brion James s'était plaint et visiblement à raison vu ce qui concerne son personnage.

Et puis Andrew "Wishmaster" Divoff en biker maléfique. C'est comme pour William Forsythe, je vole à lui tel le papillon de nuit vers la lampe halogène.

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MessagePosté: 13 Jan 2024, 21:26 
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Mes comparses ont tout dit.

Je m'attendais au début à un film de transition maladroit entre les polars urbains gritty des années 70 et les buddy movie fun et exacerbé des 80s. Et s'il y a un peu de ça, le film est déjà tellement chimiquement pur dans sa formule et le jusqu'au-boutisme avec lequel elle est appliquée qu'il en devient presque sa propre parodie. Sérieux, le trait est tellement forcé, entre les dialogues à base d'injures permanentes, les éructations du commissaire noir, Nolte et sa flasque de whisky, la montagne de mégots jetés par terre dans absolument chaque décor. Tout était déjà là.

Hard boiled mais avec une touche d'humanité pas forcée, jamais chiant, bien mis en scène (le oner invisible dans le commissariat). Et bourré de visages amis: Jonathan Banks, James Remar... et même Chris Mulkey de THE HIDDEN ! Un bon moment.

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MessagePosté: 04 Oct 2024, 09:20 
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Film Freak a écrit:
Enfant, j'ai découvert le 2 avant, sans savoir qu'un 1 existait et c'est devenu un de mes films cultes. Quand j'ai découvert le 1 plus tard, je l'ai trouvé moins bien et daté (et plus tard encore, j'ai acheté le 2 en DVD et j'ai fini par le revendre parce que j'ai revu le film à la baisse) mais l'épisode de la série Voir sur Netflix consacré au film et son étude du racisme m'ont donné envie de lui redonner une chance.

Et c'est donc chose faite et grand bien m'en a pris.

Je n'ai toujours pas vu Freebie & the Bean, considéré comme le premier buddy cop movie (précisons bien le "cop" parce que sinon la dynamique peut remonter au clown blanc et à l'auguste), mais il apparaît tout de même que c'est ce film-ci qui a vraiment instauré le modèle à suivre, bien qu'il soit sans doute plus radical que ses successeurs.

L'idée de changer le personnage du taulard de blanc à noir tient de la même simple idée de génie que de faire de Ripley une femme, ça donne une toute autre portée au film politiquement. Ici, le contraste n'est pas simplement superficiel mais profondément ancré dans le rapport de force au sein du duo, pas simplement parce qu'il s'agit d'un flic et d'un criminel mais d'un blanc et d'un noir et que leurs "professions" ne font que refléter leurs statuts respectifs au sein de la société, et c'est illustré tant par la sémantique utilisée que par les codes visuels. Il n'y a donc pas que les injures racistes à foison, dont les "boy" plus inoffensifs en apparence mais qui renvoient directement au jargon des esclavagistes, mais également un explicite "I own your ass!" que Cates assène au moment même où il menotte Reggie, convoquant une imagerie indécrottable.

Effectivement, c'est pas "tiens voilà ton nouveau partenaire/mais chef, je ne bosse qu'en solo!", ici c'est d'abord de l'asservissement. Et la fonction des menottes viendra d'ailleurs souligner le tournant quand, plus tard, après s'être fait engueuler par le capitaine, Cates menotte Reggie à son propre poignet pour quitter le commissariat. Maintenant, c'est son "égal". C'est vraiment l'histoire du rapport blanc/noir qui se joue à travers ce high concept, avec des séquences jubilatoires comme celle du bar de rednecks où c'est Django Unchained avant l'heure (c'est surtout Le Flic de Beverly Hills avant l'heure en fait, vraiment on ne dira jamais assez comme le Murphy des débuts - il a 20 ans ici! - était un diamant brut).

On ne saurait en dire autant des personnages féminins qui sont vraaaiiiiment pas reluisants dans l'écriture, soit des putes (lol pour le petit monologue "c'est temporaire, je veux récupérer mon fils"), soit des meufs dans des relations de merde (on va dire que ce sont justement les mecs qui ont le mauvais rôle) + la go prête à aller à l'hôtel malgré l'approche cash de Reggie.
Mais ça reste moins handicapant que l'écriture du bad guy qui n'est vraiment qu'un McGuffin humain prétexte à à l'intrigue. J'aime beaucoup James Remar mais il n'a vraiment pas grand chose à jouer. Dans mon souvenir, Divoff et sa bande dans le 2, bien qu'ils soient calqués sur ceux du 1, étaient plus charismatiques, plus flippants. Et pareillement, il y a un facteur mystère sur l'identité du grand méchant dans la suite qui rend l'intrigue un tant soit peu plus engageante là où celle du premier est d'une linéarité et simplicité confondante.

Ça ne gâche aucunement le plaisir mais c'est ce qui empêche le film, très classe au demeurant comme le montrent les captures de JulienLepers, de se classer au-dessus de beaucoup des films qui ont suivi dans ses pas.

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MessagePosté: 04 Oct 2024, 09:34 
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Film Freak a écrit:
On ne saurait en dire autant des personnages féminins


C'était pas une constante Joel Silver, ça, à l'époque ?

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Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)


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MessagePosté: 04 Oct 2024, 09:48 
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Possible. Les "femmes de" dans Die Hard ou L'Arme fatale sont quand même plus mémorables, moins fonctionnelles.

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MessagePosté: 04 Oct 2024, 11:18 
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Citation:
Freebie & the Bean


Qu'attends-tu, c'est génial. Tout y est. Les carambolages incroyables, le racisme entre le duo star etc...


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MessagePosté: 04 Oct 2024, 11:27 
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MessagePosté: 05 Oct 2024, 10:10 
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Film Freak a écrit:
Possible. Les "femmes de" dans Die Hard ou L'Arme fatale sont quand même plus mémorables, moins fonctionnelles.


Ah, Patsy...


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