Je vois qu'en fait il suffisait de passer par ce topic pour apprécier la polémique en long, en large et en travers... Ayant eu les deux options sous la main, j'ai finalement opté pour la version BR (donc restaurée) pour me faire un avis.
Bon bah que ça puisse être un équivalent de la version originale, en 1977, j'ai vraiment énormément de mal à le gober. L'image est très tendue, très désagréable, hyper fatigante : les détails sont dans les sombres, les médiums sont pauvres, les surexpositions quasiment l'affaire de chaque plan. Et ce n'est pas de la surex vivante de pellicule, hein : de la bonne et grasse surexposition d'étalonnage numérique, qui fait de bons aplats bien laids. Évidemment, l'ultra-coloré fait partie des caractéristiques du cinéma de genre à l'époque, ou même d'un certain cinéma baroque, mais je ne l'ai jamais vu avoir cette gueule-là : de Fellini aux films de la Shaw Brothers, ça ne se traduit jamais pas cette espèce de distorsion clinquante de l'image, qui pour le coup ressemble justement comme deux gouttes d'eau au tic plastique phare des années 2000. En bref, après avoir lu à peu près tout sur l'affaire, j'en viens à la conclusion que si l'édition Anchor Bay est sans doute un peu terne, ce nouvel étalonnage flashy tient simplement au fait que le chef-op et Argento ont découvert tous fous les joujous numériques devant la table de restauration (impossible d'avoir un truc pareil avec un étalonnage trois points optique à l'ancienne), et qu'ils se sont plus senti pisser. Évidemment je suis pas spécialiste, je peux me tromper, mais j'ai assez côtoyé de "spécialistes" par le boulot pour savoir que c'est tout sauf un gage de confiance sur la question.
Le film maintenant ! Que j'ai vu dans sa version anglaise...
Ca m'a assez moyennement convaincu. Je trouve ça beaucoup moins virtuose qu'
Opéra par exemple (même si c'est évidemment le seul référent que j'ai sous la main), dont l'ouverture aux corbeaux enterre à elle semble l'ensemble de
Suspiria. Bien sûr ce film reste très sympathique à suivre pour le plaisir de l’œil, pour l'imagerie, et puis pour quelques trucs bien sentis : les séquences d'horreur qui jouent toujours assez bien avec les sensations de souffrance, le côté "pensionnat et ses secrets" (surveiller aux portes, écouter les pas, sortir du dortoir la nuit, dormir ensemble dans la grande salle...) qui offre une belle porte d'entrée dans cet univers.
Mais au-delà de l'enveloppe sympathique, je trouve Argento assez peu convaincant dans la manière d'embrasser ce matériau. C'est pour tout dire assez mal mis en scène, assez impropre à maîtriser ce goinfrage visuel ; ça me semble particulièrement parlant dans l'utilisation de la musique (pas la musique en soi : le thème est bien, entre autres), qui arrive et repart n'importe comment, à l'emporte pièce, ne sachant absolument pas prendre en charge les séquences concernées. Ce côté grossier fait partie de l'esthétique du genre, mais il prend habituellement (je trouve) la forme d'un coup de brosse brouillon parce que rageur, énergique, préparant le terrain à des mises en scène justement savantes sous leur aspect brut. Rien de cela ici : la réalisation (et la tonalité qui en découle) me semble complètement bordélique et aléatoire sous son aspect élégant, même si quelques séquences s'en sortent mieux (la filature finale, notamment). Dur du coup d'en retenir quoique ce soit, et de dépasser l'impression de joli objet vide...
Rien de désastreux non plus hein, c'est en fait surtout une déception face à l'immense réputation. Vu le fossé avec
Opéra (sur lequel j'ai des doutes, du coup), ça vaudra de toute façon le coup d'explorer le reste de la filmo (j'ai
Ténèbres dans un coin, là).
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. Mais l'interprétation ne restera jamais le point fort de l’œuvre, malgré quelques prestations marquantes et attachantes de certains acteurs / actrices chez Argento.