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MessagePosté: 13 Mai 2013, 23:32 
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Déjà-vu a écrit:
Abyssin a écrit:
La pire faute de goût qui dénote de toute la poésie du film.

Le sauna ? Bof, la chair est triste, comme dans beaucoup de ces "films sensoriels". Un comble, non ?


Pas aussi sévère, c'est pas ce qui m'a le plus emballé mais c'est pas non plus à jeter même si je vois pas trop le sens de tout ça. Le rugby, si on s'est endormi, on a clairement l'impression de se réveiller dans une autre salle de cinéma. C'est totalement à côté de la plaque. C'est comme si on passait d'une scène d'un film de Michael Bay à une scène de comédie avec des acteurs français sans aucune raison. Bref, c'est nawak.

On critique, le film est inégal mais il y a quand-même des bons moments et Reygadas n'est pas un manchot. Mais bon dans le même genre, ils auraient pu récompenser Holy Motors à Cannes.


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MessagePosté: 13 Mai 2013, 23:56 
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Déjà-vu a écrit:
Bof, la chair est triste, comme dans beaucoup de ces "films sensoriels".

A quels films penses-tu ?

Abyssin a écrit:
Le rugby, si on s'est endormi, on a clairement l'impression de se réveiller dans une autre salle de cinéma. C'est totalement à côté de la plaque.

Il y a certes un peu de pose dans tout ça, mais l'effet de décalage n'est pas une maladresse là, il est clairement recherché, posé là comme une énigme. Dans l'explosion de lieux et de temps qui caractérise le film, et qui nous pousse de fait à chercher ce qu'ont tous ces fragments en commun (où est le diable dans tout ça ? qu'est-ce qu'il y a fait ?), ce genre d'effet de rupture ne me semble pas absurde au vu du reste du projet.

Maintenant, comme je le disais dans mon premier message, je trouve aussi que sur l'ensemble du film, ça crée souvent un effet de "mur" un peu fier et aléatoire, pas toujours pertinent, qui décourage tout investissement du spectateur.


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MessagePosté: 14 Mai 2013, 00:33 
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Tom a écrit:

Maintenant, comme je le disais dans mon premier message, je trouve aussi que sur l'ensemble du film, ça crée souvent un effet de "mur" un peu fier et aléatoire, pas toujours pertinent, qui décourage tout investissement du spectateur.


Tout à fait d'accord avec toi. Je suis un peu méchant, il y a des trucs très réussis dans le film mais le rugby je vois même pas le lien avec les autres fragments du film. Pour moi, ces séquences sont ratées même si je vois les intentions.


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MessagePosté: 14 Mai 2013, 08:21 
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Une équipe unie (l'encouragement final) face à la dislocation familiale et individuelle vue avant ? Il y a une tentative d'ouverture louable vers le "hors film" avec ça, mais ces scènes sont ce que j'aime le moins dans le film, c'est trop frontal. Je note quand même que le gamin de "Sept" s'appelle Duncan, à un moment donné je me demandais si l'un des joueurs désigné porterait ce nom :)

Au MK2 Beaubourg hier on était 15 à 19h45 (il ne va pas faire long feu dans ses deux salles) mais personne n'est sorti pendant le film. En ce qui me concerne le film m'a touché assez profondément sans avoir envie de tellement parler formalisme à son sujet. On est dans cette veine du post tarko associé à une envie de toucher à des choses assez primale, et ici ça tient à tout ce qui tient à ce regard d'enfant primitif (utilisé dans le fond aussi bien pour capter un abandon dans le noir d'une gosse de deux ans que l'exploration d'un sauna libertin par deux adultes). Les effets de lentille ce pourrait être aussi bien un troisième oeuil du mal qu'une sorte de vortex qui plane sur le film, un temps aspirateur qui transforme tout en rève. ce qui tiens du mal insidieux qui plane au dessus du familial, ces classes sociales aux porosités trompeuses chez les alcooliques anonymes, et puis surtout ce rapport assez violent avec les animaux et la nature, ça me touche infiniment plus que ce que fait le père Terrence... Puis je trouve que ça largue et que ça se la pète quand même moins qu'un "Faust" (que j'aime assez, mais qui est quand même bien écrasant et après lequel on court en permanence). Chez les post Tarko il y a ce fantasme d'élan unique chez Sokourov, je lui préfère l'éclatement relatif de ce film qui est tout de même bien plus narratif qu'on veut bien nous le vendre. Par rapport à "Lumière silencieuse", il n' y a pas le contrepoint spirituel, donc l'harmonie est moins pré-établie, mais c'est un "cubisme" moins raide que dans "Bataille dans le ciel".


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MessagePosté: 14 Mai 2013, 08:32 
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Mr Chow a écrit:
ce film qui est tout de même bien plus narratif qu'on veut bien nous le vendre.


C'est justement dans la narration que le film échoue. Je comprends l'intention de Reygadas d'adopter une structure un peu bordélique et à la chronologie éclatée mais au final ça dessert son film. La première demie-heure, c'est un enchaînement de belles scènes visuelles mais dont on a du mal à comprendre le lien.


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MessagePosté: 14 Mai 2013, 09:11 
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Abyssin a écrit:
On est dans cette veine du post tarko associé à une envie de toucher à des choses assez primale, et ici ça tient à tout ce qui tient à ce regard d'enfant primitif (utilisé dans le fond aussi bien pour capter un abandon dans le noir d'une gosse de deux ans que l'exploration d'un sauna libertin par deux adultes).

Oui voilà, c'est exactement ça (c'est en ça d'ailleurs que le sauna me semble moins provoc que "curieux" dans l'approche, au début en tout cas, la fin de la scène étant plus quelconque)

Mr Chow a écrit:
je lui préfère l'éclatement relatif de ce film qui est tout de même bien plus narratif qu'on veut bien nous le vendre

Clair, c'est pas la révolution. C'est vraiment dans l'implication émotionnelle (quelque soit le chemin) qu'il y a un manque selon moins (la famille me touche pas des masses, en gros).


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MessagePosté: 14 Mai 2013, 09:49 
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Oh je me transforme en Abyssin grâce à Tom :mrgreen:

Pour Cannes sinon j'avais cru entendre que Moretti a fait à son jury un "Rien à cirer de ces films, mais je veux bien laisser un os à Carax ou Reygadas pour vous faire plaisir. Mais pas les deux, faudra que vous choisissez "


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MessagePosté: 14 Mai 2013, 20:06 
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Reygadas est pour moi un cinéaste essentiel. Je tiens Bataille dans le Ciel comme un des films les plus beaux et les plus forts de la décennie passée. Et j'avais adoré son dernier d'une mélancolie mystique métaphysique. Et malgré la réputation du film après son passage à Cannes, je m'attendais à un gros morceau.

Mais c'est une déception. Je pense que c'est son film le plus faible alors que paradoxalement il y crée ses plans les plus beaux. Il y manque un sentiment de cohérence, une unité, tout simplement un fil rouge pour emporter le morceau. Pourtant en guise de fil rouge on a ce personnage fantastique qui apparaît dès la deuxième scène chez ces personnages que l'on ne verra qu'à ce moment là. Il est sans doute garant du thème du film, il est le virus qui en contamine les pores, les plans et surtout le montage. Par son pouvoir d'omniscience il coupe à tout va, nous transporte dans le futur, change de continent en un raccord. Et il pose ce regard torve, aux bordures floues qui forcent les yeux à se recentrer en permanence sur le coeur du plan. Le résultat est un peu inégal mais l'effet fonctionne sur quelques scènes clés.

Et bien sûr il faut évoquer cette scène d'ouverture absolument renversante. Filmée à hauteur d'enfant dans une nature toute puissante et une lumière déclinante c'est un moment de cinéma absolument unique comme on en voit qu'une ou deux fois par an. Le plan d'ouverture de Lumière Silencieuse m'avait déjà profondément bouleversé. Il partage avec Bela Tarr, le génie des ouvertures de film (chaque plan d'ouverture des films de Bela Tarr est un putain de chef-d'oeuvre). Et puis il y a cette avant dernière scène et cette
auto-décapitation
saisissante qui nous laisse un peu démuni face à cette violence tournée vers elle-même, comme le film un peu fermé sur lui-même.

Il creuse ce cinéma ou sourd la violence en permanence au coeur d'une société qui paraît malade au plus profond de ses tripes. Certaines scènes surnagent (la scène cauchemardesque et hallucinée du sauna, dont l'issue est magnifique d'ailleurs) dans un ensemble où trop de décrochages viennent gâcher le plaisir. Je dois d'ailleurs reconnaître avoir totalement raté le monologue de Juan m'endormant précisément à ce moment là. Mais ce n'est pas très grave car la parole chez Reygadas est sans doute ce qui a le moins d'intérêt.

Bref c'est une certaine déception quand on voit ce dont il est capable et surtout les quelques fulgurances qui le lézardent de ci de là comme ces éclairs tout puissants qui déchirent l'image et découpent sur le plan la silhouette de l'enfant lors de la sublime scène d'ouverture.

4/6

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MessagePosté: 14 Mai 2013, 23:07 
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Je vous trouve super indulgent. Les acteurs ne sont pas dirigés, c'est volontairement abscons, c'est de l'épate cinéphile sur le plan narratif. Bon, j'avais déjà détesté Bataille dans le ciel pour les mêmes raisons.


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MessagePosté: 15 Mai 2013, 00:20 
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Karloff a écrit:
Je vous trouve super indulgent. Les acteurs ne sont pas dirigés, c'est volontairement abscons, c'est de l'épate cinéphile sur le plan narratif. Bon, j'avais déjà détesté Bataille dans le ciel pour les mêmes raisons.


Peu de souvenirs de Bataille dans le ciel que j'avais pourtant aimé, juste l'épatante scène du trajet en voiture, mais j'avais l'impression d'une plus grande maîtrise narrative et que c'était plus ancré dans le réel, qu'on avait une vision de la société mexicaine, peut-être pour ça qu'il touchait plus d'ailleurs.


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MessagePosté: 15 Mai 2013, 08:45 
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Karloff a écrit:
Je vous trouve super indulgent. Les acteurs ne sont pas dirigés, c'est volontairement abscons, c'est de l'épate cinéphile sur le plan narratif. Bon, j'avais déjà détesté Bataille dans le ciel pour les mêmes raisons.


Oui mais malgré tout ça, les fulgurances sont tellement au dessus, le mec il tâtonne les sommets.

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MessagePosté: 15 Mai 2013, 08:54 
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Bataille dans le Ciel il y a des trucs énorme mais c'est celui que j'aime le moins (un peu trop dans le dispositif verrouillé), mais Lumière silencieuse c'est aisément mon numéro 1 2007... et celui là est bien partis pour cette année. C'est clairement au-dessus du lot rébarbatif de ce qu'on nous propose sur les écrans comme cinéma.


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MessagePosté: 18 Mai 2013, 09:51 
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Tom a écrit:
Déjà-vu a écrit:
Bof, la chair est triste, comme dans beaucoup de ces "films sensoriels".

A quels films penses-tu ?

Quatre jours après...

Chez Grandrieux ou Noé par exemple, pour citer deux exemples qui relèvent du cinéma expérimental, puisque cette catégorie des "films sensoriels" me semble floue, mais la généralité porte plutôt sur les "films de festival", où la sexualité est souvent morbide.

Pour un poisson-chat d'Uncle Boonmee, on se tape trois Seidl.


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MessagePosté: 18 Mai 2013, 10:02 
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Déjà-vu a écrit:
mais la généralité porte plutôt sur les "films de festival", où la sexualité est souvent morbide.

Ça m'évoquait plutôt ça aussi, or tout ce qui dérive d'un Haneke (pour résumer grossièrement) me semble quand même être d'une toute autre veine esthétique (une sorte de rejeton un peu poseur d'un certain cinéma moderne : plans longs, distants, cliniques...).

Déjà-vu a écrit:
puisque cette catégorie des "films sensoriels" me semble floue

Faudrait se faire un topic sur la question, et essayer de le définir, mais je sens que tout le monde va avoir la flemme et que je vais me retrouver à me débattre tout seul...

Pour aller vite (et pour moi) : si le cinéma classique pense ses objets comme des représentations, et le cinéma moderne comme des idées (des concepts), ce "troisième cinéma" les pense et les aborde d'abord comme de pures infos audio-visuelles (= telle lumière, tel son, telle matière). Et qu'à partir de là se déplie une nouvelle esthétique aux règles radicalement différentes.


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MessagePosté: 18 Mai 2013, 10:18 
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Tom a écrit:
Ça m'évoquait plutôt ça aussi, or tout ce qui dérive d'un Haneke (pour résumer grossièrement) me semble quand même être d'une toute autre veine esthétique (une sorte de rejeton un peu poseur d'un certain cinéma moderne : plans longs, distants, cliniques...).

Exact, une certaine frontalité, mais ça tient aussi à un penchant pour la subversion.


Citation:
Faudrait se faire un topic sur la question, et essayer de le définir, mais je sens que tout le monde va avoir la flemme et que je vais me retrouver à me débattre tout seul...

Je crois que ton intuition est bonne.

Citation:
Pour aller vite (et pour moi) : si le cinéma classique pense ses objets comme des représentations, et le cinéma moderne comme des idées (des concepts), ce "troisième cinéma" les pense et les aborde d'abord comme de pures infos audio-visuelles (= telle lumière, tel son, telle matière). Et qu'à partir de là se déplie une nouvelle esthétique aux règles radicalement différentes.

Je vois, mais j'ai beau aimer l'abstraction, cette conception d'un cinéma qui ferait valoir la matière "contre les autres" a tendance à m'agacer, parce que si j'osais, je dirais que les images ont toujours une plasticité.


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