PINOCCHIO de Winshluss aux Requins Marteaux.
Gros livre très beau donc (j'en parle plus haut) qui relate les aventures modernes du petit Robot Pinocchio (et un peu Jiminy Cafard, et un peu Blanche Neige aussi).
Le dessin de Winshluss est à son meilleur niveau, un style "gros nez" très détaillé, qui tire vers un réalisme grotesque parfait pour cette histoire assez cynique et cruelle où l'homme est soit un lâche soit un salaud (soit une victime). En fait c'est le style de l'auteur porté à sa perfection, la structure narrative est hyper travaillée, assez complexe, le rythme de lecture est hyper précis, et on se rend compte que l'oeuvre de Winshluss n'a été qu'une longue maturation pour en arriver jusque là. C'est le même travail que Smart Monkey ou que Mr Ferraille mais en plus abouti, en plus maitrisé. Reste pour Winshluss à chercher ailleurs pour la prochaine fois, parce que dans le genre il vient d'atteindre son sommet.
A signaler qu'il est aidé sur ce livre par une équipe de pote issue de la revue Ferraille, et dans les couleurs par exemple ça se sent vraiment, c'est impressionnant.
Ce livre là on en a déjà parlé avant mais j'avais pas tout dit :
LE ROI DES MOUCHES tome 2, de Pirus et Mezzo chez Drugstore (Glenat).
(Mezzo a fait des dessins pour Picsou, Nijal doit connaitre). Comme pour le tome 1, ce qui frappe en premier c'est la forte proximité de style avec les américains Burns ou Clowes. Mais dans la narration on est parfois proche de Moore aussi, et de Neaud dans les rapports de symboles textes/images. Ce qui frappe en second, c'est que toutes ces références ne gênent pas, que tout est parfaitement digéré et que le style au bout du compte est singulier.
Dans ce tome 2, le changement majeur est que les auteurs entrent en empathie avec leurs personnages qui ne sont plus seulement des petits cons drogués qui baisent pour tuer l'ennui, les sentiments font leur apparition, une certaine poésie aussi, une douceur entre certains personnages là où le tome 1 était principalement clinique et froid.
Et le dessin est toujours aussi classe, avec des couleurs vraiment inventives, des teintes sombres, proches du noir et blanc, avec des touches de couleurs vives, des trucs osés (comme le rose) qui sont parfaits dans ce livre.
Apparition d'une touche de fantastique aussi, bien intégrée.
Pour finir :
LOCKGROOVE COMIX tome 2, de JC Menu, à L'Association.
Menu fait un comix de geek du rock, ou plutôt de geek du vinyle de rock, ou plutôt de geek du lockgroove sur les vinyles de rock.
Le lockgroove, c'est le sillon infini qui termine les vinyles. Certains sont enregistrés, ce qui donne une boucle sonore de 1,8 secondes qui se répète à l'infini. Menu fait la revue des lockgrooves qu'il connait, et déborde sur des récits de concert, sur son rapport à la musique et la place que ça a dans sa vie, sur son enfance et les cassettes enregistrées de son père...
On connait mal le Menu auteur (son rôle d'éditeur prend plus de place dans les médias), et son style peut laisser perplexe, mélange d'influences de l'enfance (ligne claire école Marcinelle, le scrameustache et tout ça) et de la scène punk. Un truc très gaston sous ecsta.
Son dessin privilégie le sentiment d'ensemble, l'élan de la lecture, aux détails fignolés. On a l'impression d'un truc bâclé et pourtant tout est très bien senti, dans les exagérations des visages et des postures, dans les constructions embouteillées mais fluides des cases.
Et puis cette histoire intime du rock est passionnante. J'hésite entre le livre mineur et très sympa, et le livre majeur à profil bas. Chez moi c'est plutôt la deuxième, mais ça dépendra des sensibilités.
Pour faire plaisir à Rotary, la page sexe qui fait vendre le Pinocchio pour noël est saphique.