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MessagePosté: 29 Sep 2015, 07:26 
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Sir Flashball
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Karloff a écrit:
:roll: :roll:


Non. J'attends que tu m'expliques, en termes de FICTION, en quoi il faudrait d'avantage traiter d'Auschwitz que de l'alcoolisme de Tony Stark.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 08:45 
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Je pense que quand tu vois un film comme Le fils de Saul, justement tu ne te poses pas cette question de l'abondance de films sur la seconde guerre mondiale. Parce que le film parvient à te montrer quelque chose d'inédit (aussi horrible que cela puisse paraître - vouloir de "l'inédit" sur un sujet pareil). Mais c'est comme quand j'ai lu Les Bienveillantes de Littel. C'est un autre point de vue sur une histoire que l'on connaît.

Sinon en ce qui concerne Le fils de Saul, ça a été pour moi une véritable claque, je ne m'attendais pas à un film aussi intense. Comme j'ai la flemme, je vous colle ce que j'avais écrit pour un site :

Comment filmer l'infilmable ? La question était sur toutes les lèvres ou presque depuis l'annonce par Thierry Frémaux de la présence en compétition de ce premier film d'un jeune cinéaste hongrois, Laszlo Nemes, ancien assistant de Bela Tarr (sur L'homme de Londres), ayant l'ambition de raconter les camps de la mort nazis du point de vue d'un membre des Sonderkommandos. Les Sonderkommandos étaient des prisonniers pour leur majorité juifs employés par les nazis pour effectuer les basses besognes des camps d'extermination. Des tâches dont la seule évocation plonge dans un abîme d'horreur : retirer les corps des chambres à gaz, brûler les cadavres dans les crématoriums... Des hommes à tout faire ayant des conditions de détention un peu meilleures que les autres pour les garder en bonne santé mais régulièrement assassinés pour ne pas que l'ignominie qui se déroulait dans les camps connaisse de témoins.

C'est un aspect de l'histoire de la seconde guerre mondiale qui n'avait jamais été véritablement vu dans l'histoire du cinéma. Le sujet est tellement dur, sa réalité tellement récente (des survivants des camps sont toujours en vie) que se permettre d'injecter de la fiction dans une déchirure historique si brûlante était, naturellement serait-on tenté de dire, considéré comme indécent. Peu s'y sont piqués et on se souvient avec effroi des pires maladresses de La Liste de Schindler de Spielberg où le cinéaste jouait sur un suspens ignominieux et intolérable lors d'une scène de douche de prisonniers. Comme quoi même les plus grands n'ont pas forcément les armes pour aborder un sujet aussi sensible.

Pourtant dès le premier plan, même dès l'ouverture de ce premier plan, le projet de Nemes apparaît limpide. Le film s'ouvre sur un paysage indéfini. Au loin, se découvre un personnage flou qui à mesure qu'il avance devient de plus en plus net. Quand il est face à nous, net, en plan épaule, le film commence. Cet homme sera de tous les plans et ne sortira jamais du cadre. Tout ce qui sera derrière lui sera flou et le plus souvent indistinct. C'est ainsi que Nemes impose d'emblée sa thèse pour filmer les camps de la mort, Il ne les filmera pas directement, il ne les mettra pas en scène devant la caméra. On sait que le plus important dans le travail d'un cinéaste c'est le regard, comment il regarde son sujet. Son regard ne se détournera pas de son personnage principal, nous vivrons l'horreur à travers lui, uniquement à travers lui. Bien évidemment nous verrons des cadavres, des exécutions, des violences et les atrocités de l'Allemagne nazie ne nous seront pas épargnées mais elles seront toujours validées en quelque sorte par ce point de vue unique sur son personnage. Le quitter, détourner la caméra de son corps serait céder à la complaisance, Nemes s'y refuse catégoriquement bien aidé par un format 1,37 étroit laissant très peu de place à l'arrière plan.

Cet homme qui est-il ? Il s'appelle Saul et se définit lui-même comme un « aüslander », un étranger, il est hongrois et travaille sous le joug des nazis dans les chambres à gaz et les crématoriums. Ce jour-là, alors que les cadavres sont extraits de la pièce après avoir été gazés, il reconnaît une des victimes, un enfant, son propre fils. Dès lors il fera tout ce qui est en son pouvoir pour dissimuler son cadavre et lui offrir une sépulture juive digne de ce nom. Il se met à la recherche d'un rabbin pour l'aider dans cette tâche. C'est un cauchemar halluciné qui débute. En temps réel, Saul est comme une fourmi dans une fourmilière apocalyptique et irrespirable, la caméra ne le lâche pas dans ses déambulations entre les crématoriums, les chambres à gaz, les scènes en extérieures d'exécution (car les crématoriums tournent à plein régime et il faut tuer toujours plus vite), la gestion des nouveaux arrivants déjà condamnés... Sans aucun moment de répit Saul ne cessera de tenter le tout pour le tout pour arriver à ses fins. Pour pouvoir dans cet enfer indescriptible retrouver un semblant de dignité, un semblant d'humanité.

Un film viscéral donc, une expérience sensorielle terrible, un tourbillon qui ne nous lâche pas pendant une heure cinquante. En plus d'être techniquement extrêmement impressionnant (le film fonctionne par plan-séquence agités et brutaux). Il trouve la distance parfaite, le regard idéal pour dire l'horreur avec une décence qu'on aurait cru impossible. Plaçant l'Homme littéralement au centre de son cadre, laissant le génocide en arrière plan… Nemes délivre un film âpre et aride (le personnage principal n'exprime presque aucune émotion ce qui participe également à cette distance juste par rapport à son sujet) qui laisse de profondes cicatrices mais sans jamais jouer avec l'outil cinéma dans le sens du spectacle. Un immense film sur la vie et la mort, sur un homme vivant, dans un univers de mort absolue.

Alors qu'on s'attendait à ce que le film fasse polémique il a au contraire été salué de manière quasi unanime, recevant même l'assentiment de ce grand monsieur qu'est Claude Lanzmann qui en connaît un rayon sur le sujet (il a réalisé le monument Shoah) qui s'est même permis une pique acerbe envers Steven Spielberg en déclarant que Le fils de Saul était « l'anti Liste Schindler ». Toujours est-il que Laszlo Nemes nous a mis un coup de poing dans l'estomac que l'on n’est pas prêt d'oublier. En réalité c'est même impossible, Le fils de Saul fait tout simplement parti de ces quelques films dont la vision est inoubliable.

5+/6

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 08:52 
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Castorp a écrit:
Arnotte a écrit:
MAIS JUSTEMENT


Justement quoi ?

(Tu m'as pas lu en fait - ou alors tu joues au con)
Ben, bien que le sujet ait été traité maintes fois, la réussite de Son of Saul tient aussi à avoir pu offrir un regard inédit, un traitement nouveau - qui plus est une expérience incroyable.

Refuser d'emblée de voir un magnifique film (par ailleurs primé, qui sera porté par la presse, etc.) juste parce que le sujet est selon toi trop connu, c'est.... *me retiens*.... dommage.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 08:56 
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Arnotte a écrit:
Tu m'as pas lu en fait


En partie seulement, j'avoue. J'attends en général de voir le film avant de lire l'intégralité des critiques.

Arnotte a écrit:
Refuser d'emblée de voir un magnifique film (par ailleurs primé, qui sera porté par la presse, etc.) juste parce que le sujet est selon toi trop connu, c'est.... *me retiens*.... dommage.


Je refuse pas de le voir, je dis juste que c'est un sujet qui me fatigue au cinéma et dans la fiction en général.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 09:01 
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OK, libre à toi.

Mais sur un sujet aussi important (plus qu'un sujet: une époque), estimer avec mépris qu'on a fait le tour de la question, c'est puéril.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 09:12 
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Surtout que les films traitant spécifiquement des camps d'extermination (et du génocide en général) ne me semblent pas très nombreux et avoir été traité 250 000 fois.


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MessagePosté: 29 Sep 2015, 09:14 
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Arnotte a écrit:
Mais sur un sujet aussi important (plus qu'un sujet: une époque), estimer avec mépris qu'on a fait le tour de la question,


On n'a pas fait le tour de la question : c'est juste que notre époque n'est plus capable de comprendre le sujet autrement que comme une projection du présent sur le passé. 95% des films sur la période sont hors-sujet.
Ceux qui ont vécu WWII sont soit morts, soit très vieux.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 09:15 
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Cantal a écrit:
Surtout que les films traitant spécifiquement des camps d'extermination (et du génocide en général) ne me semblent pas très nombreux et avoir été traité 250 000 fois.


Oui, là c'est moi qui projette un ras-le-bol qui vient plutôt de la littérature.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 09:24 
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Surtout qu'on est dans une période où la majorité des films sur le sujet ont un angle d'attaque particulier, raconte une petite histoire au sein de la grande. Les films génériques sur le sujet sont finalement assez rares. Le dernier qui me vient en tête c'est l'horreur de Rose Bosch La Rafle, le genre de téléfilm naphtaliné.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 09:41 
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Castorp a écrit:
Karloff a écrit:
:roll: :roll:


Non. J'attends que tu m'expliques, en termes de FICTION, en quoi il faudrait d'avantage traiter d'Auschwitz que de l'alcoolisme de Tony Stark.


ça me parait pourtant simple. D'un côté, tu as l'horreur absolue avec tous les problèmes de représentation que cela pose, que l'autre côté tu as un super-gentil qui affronte un super-méchant. Je ne dis pas que tous les films traitant Auschwitz sont supérieurs en terme de cinéma que tous les films de super-héros, juste que le défi n'est quand même pas le même. Et la nécessité aussi. Il est important que l'art le plus populaire "traite" de sujets aussi importants dans l'histoire de l'humanité que l'esclavage, le génocide etc etc.


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MessagePosté: 29 Sep 2015, 11:16 
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Karloff a écrit:
D'un côté, tu as l'horreur absolue avec tous les problèmes de représentation que cela pose, que l'autre côté tu as un super-gentil qui affronte un super-méchant.


Là, c'est une question qui n'a rien à voir avec pourquoi il faudrait plus représenter Auschwitz que les super-héros.

Karloff a écrit:
Je ne dis pas que tous les films traitant Auschwitz sont supérieurs en terme de cinéma que tous les films de super-héros, juste que le défi n'est quand même pas le même.


Idem.

Karloff a écrit:
Il est important que l'art le plus populaire "traite" de sujets aussi importants dans l'histoire de l'humanité que l'esclavage, le génocide etc etc.


Education, donc ?
Mouais, les plus grands films de l'histoire du cinéma, ce ne sont pas des films éducatifs.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 11:29 
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Antichrist
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Citation:
Là, c'est une question qui n'a rien à voir avec pourquoi il faudrait plus représenter Auschwitz que les super-héros.


En tant qu'artiste, bien sûr que si. D'ailleurs ce n'est pas vraiment Auschwtiz/Super héros que la question du fond. Un film de super-héros peut être plus profond que la Rafle comme les X Men par exemple.

Citation:
Education, donc ?
Mouais, les plus grands films de l'histoire du cinéma, ce ne sont pas des films éducatifs.


Qui a écrit ça ? Il n'empêche que dans la conscience collective américaine la Guerre du Vietnam a plus d'importance que la guerre d'Algérie en France justement grâce au cinéma.


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MessagePosté: 29 Sep 2015, 11:44 
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Karloff a écrit:
Qui a écrit ça ? Il n'empêche que dans la conscience collective américaine la Guerre du Vietnam a plus d'importance que la guerre d'Algérie en France justement grâce au cinéma.


C'est un peu le paradoxe de l’œuf et de la poule ça.
Ma position est plutôt que les américains sont plus enclins à faire des films comme ça ... Je crois qu'il ne faut pas donner au cinéma plus d'importance qu'il n'en a, les films ne sont que sont le reflet d'une civilisation, d'une époque, d'une culture ...


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MessagePosté: 29 Sep 2015, 11:46 
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Karloff a écrit:
En tant qu'artiste, bien sûr que si. D'ailleurs ce n'est pas vraiment Auschwtiz/Super héros que la question du fond. Un film de super-héros peut être plus profond que la Rafle comme les X Men par exemple.


Si un film de super-héros peut être plus profond qu'un film sur Auschwitz, j'en reviens à ma question de base : pourquoi faudrait-il plus traiter d'Auschwitz que d'un autre sujet ?

Karloff a écrit:
Il n'empêche que dans la conscience collective américaine la Guerre du Vietnam a plus d'importance que la guerre d'Algérie en France justement grâce au cinéma.


Le lien reste à prouver.

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MessagePosté: 29 Sep 2015, 11:54 
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Castorp a écrit:
pourquoi faudrait-il plus traiter d'Auschwitz que d'un autre sujet ?

Je ne sais pas s'il le FAUT, mais ils sont là aussi pour contribuer au travail de mémoire. Comme tu dis, il n'y aura bientôt plus aucun survivant... Il nous restera les livres, les films, les témoignages..

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