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MessagePosté: 20 Jan 2013, 21:02 
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Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
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En 1900, Naomi Murdoch a abandonné son mari et ses enfants pour fuir sa petite ville de province et embrasser une carrière d'actrice. Une dizaine d'années plus tard, sa fille Lily l'invite à venir la voir jouer une pièce dans son collège de Riverdale. Son arrivée met la ville en émoi et réveille de vieux conflits...


Beau mélodrame complexe, à partir d'un postulat pourtant peu prometteur. Murdoch rentre à la ville comme on pose consciemment le pied dans un piège multiformes tout près à se refermer sur elle. Dans cette première moitié (le théâtre, la soirée), le film est assez épatant, dansant avec aisance sur une toile d'araignée dramaturgique : croisement de relations, de jalousie, de qu'en-dira-t-on, et de perso intelligents, qui voient les pièges et tentent de les éviter. La réussite vient surtout de l'utilisation dramatique des trois enfants, par leurs comportements opposés et complémentaires : chaque changement situation les font chacun virer de bord (pour leur mère, contre leur mère), rendant assez imprévisible la configuration dans laquelle doit évoluer le personnage principal, et évitant à chacun de tenir un rôle mécanique.

Pour le reste, malgré le noir et blanc et l'absence de l'outrance acide et maniérée qui marque ses films couleur les plus emblématiques, c'est du Sirk finalement très reconnaissable, avec sa population meute, sa sophistication (visuelle, mais aussi d'écriture, de jeu), sa tempête de sentiments rentrés, le tout teinté d'un surprenant et émouvant désir de foyer (là où la demeure familiale pouvait ailleurs dans sa filmo sembler être une prison, quoique confortable). Ça tient bon jusqu'à l'enchaînement de résolutions finales que je trouve un peu petites : pas assez pudiques ou pas assez excessives, je ne sais pas, il y a un équilibre qui n'est pas vraiment trouvé, et qui donne l'impression que le tout se referme sans prestance.

Je remarque que c'est sans doute le seul truc qui continue encore à me gêner avec le cinéma classique hollywoodien : souvent le sentiment que les films subissent une sorte d'accélération dès la situation finale acquise, comme aspirés par leur carton de fin avec la musique glorieuse du studio qui reprend trop vite le dessus, donnant émotionnellement l'impression qu'on nous referme soudainement le couvercle du coffre au visage. Pas d'épilogue, pas le temps atterrir. Ça m'a toujours assez surpris (même si tout compte fait c'est pas forcément le film où je trouve ça le plus choquant).


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MessagePosté: 12 Déc 2017, 01:42 
Très beau texte de Tom.

C'est l'un des films les plus directs et en même temps les plus profonds de Sirk. Paradoxalement, Sirk opère un décalage vers 1900, alors que la situation familiale du film- quasi bergmanienne- est beaucoup plus "moderne" au point de vue sociologique, et moins artificielle que dans ses technicolors : pas de recours a l'artifice du veuvage, Stanwyck ne cache pas qu'elle est partie à cause d'un mal-être sexuel, mais ne s'est pas trouvée et regrette de n'avoir pas été une vraie mère, c'est dit sans pathos, droitement, même si ça humilie en fait le mari .
C'est une sorte d'ode à la puissance conciliatrice de l'aveuglement amoureux, sans naïveté (et c'est bien cette absence de naïveté qui est le moteur de la fiction et rend le film irréel).
En effet, ça va vite, comme dans les Lang de l'époque, et les perdants (les amants) sont relégués aux oubliettes sans états d'âme. L'amour c'est House by the River sans meurtre, mais l'amnésie que l'on recherche est du même ordre.
Très bons acteurs, notamment Richard Carlson, pas très connu, habitué au B, qui parvient à faire croire à sa ligne : pardonner pour éviter l'humiliation de la théâtralité. Beaux personnages d'enfants mal-aimés (surtout le fils cadet) .


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MessagePosté: 02 Avr 2018, 20:44 
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Inscription: 23 Juil 2011, 12:46
Messages: 14466
Vous me conseillez quel Sirk?

Je ne vais rien rajouter au texte de Tom qui décrit parfaitement ce petit chef d'oeuvre. On sent la mécanique parfaite de l'auteur, pas de minute en gros, tout qui s'enchaîne parfaitement, l'intrigue devenue finalement plus complexe et riche humainement parlant que son postulat de départ peu bandant.

Bref belle découverte et bien vu Gontrand l'allusion au Lang, je l'ai vu cette semaine et d'accord avec toi.

5/6


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MessagePosté: 02 Avr 2018, 20:55 
Je ne connaîs pas très bien Sirk, mais celui qui m'a le plus marqué est "Le Temps d'aimer et le Temps de mourir", même s'il est un peu marginal (mais paradoxalement le plus explictement autobiographique, expliquant le "programme" de ses autres films) dans son oeuvre. J'ai aimé plastiquement "All That Heaven Allows", mais psychologiquement All I Desire me paraît plus fort, moins codé, et plus direct, présentant moins les enjeux sentimentaux et sociaux comme un sous-texte.
Une amie qui avait suivi le cycle à la cinémathèque il y a une quinzaine d'année avait particulièrement aimé la Ronde de l'Aube, en me disant qu'elle ne s'attendait pas à être touchée par un film dans le monde des courses d'avion.
Imitation of Life m'a moins touché, même si cela reste intéressant, et que le démarrage sur le mode de la comédie qui bifurque brutalement vers le mélo reste déstabilisant (le film de Raoul Peck sur Baldwin m'a appris qu'il s'agissait en fait d'un remake de John Stahl, et la scène de l'original qu'il montrait me semblait plus forte que son équivalent chez Sirk).


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