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MessagePosté: 31 Aoû 2013, 23:57 
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Утомлённые солнцем en VO.

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Août 1936. Le colonel Sergueï Kotov, héros de la Révolution bolchévique, passe un jour de congé dans une vieille datcha, avec sa fille, sa femme, et le reste de la famille de celle-ci. Un peu avant midi, un jeune homme s'invite dans la maison - un jeune homme dont on était sans nouvelles depuis 13 ans.


A part le récent 12, je n'ai pour repère dans la filmo de Mikhalkov que l'excellent Partition inachevée pour piano mécanique, sorti 17 ans plus tôt. Et c'est assez terrible de mettre en parallèle deux films qui invitent tant à la comparaison, tant les ressemblances sont criantes (le suivi d'une journée dans une maison d'aristocrate à la campagne, la famille pittoresque et ses joutes verbales bordéliques, le retour d'un ancien amour perturbateur, les tensions sociales et historiques qui couvent en sourdine sous les échanges cordiaux, etc).

Le regard analytique et acide (bien que déjà très lyrique) du film de 76 s'est miré dans Soleil trompeur en pathétisme démonstratif et lourdeau, mené par un éloge embarrassant pour le bon quotidien de la famille qu'on nous vend au chaos chaleureux façon Kusturica, alternant entre le potache vulgaire et de moments spleeneux assez fabriqués (le passage en barque...). La façon complaisante dont Mikhalkov se met lui-même en scène dans l'ouverture résume assez bien ce que cet ensemble a d'indigeste (le soldat béat d'admiration devant le réal-acteur tout puissant, l'imagerie campagnarde façon "Russie immortelle", le fracas pathétique des chars coursant le gamin) - sans compter le symbolisme ultra-pompier, qui atteint des sommets de mauvais goût (la boule de feu dégueu, le portrait de Staline ré-étalé 1500 fois dans le final).

Alors certes, on peut considérer que l'hystérie irritante de cette peinture est "volontaire", vu que c'est tout l'enjeu du film de remettre ce quotidien en cause. Je suis pas sûr que ce soit le cas, mais le glissement est indéniablement efficace : cette façon de décanter un drame du bordel omniprésent, de faire poindre une ligne tragique de l’entrelacs narratif (très dense), cela fonctionne très bien. Il y a surtout un talent à filmer le dérèglement : le passage du verre d'eau, le conte, tout le ballet avant d'entrer dans la voiture... Une capacité à inquiéter et à remettre en perspective le fatras nostalgique qui fait la matière première du film. L'écart créé par la petite fille avec une situation sans cesse plus grave, et la nécessité de préserver l'insouciance de ce quotidien pour elle, crée une tension facile mais bien foutue, et assez émouvante. Là-dessus le film est réussi.

Cette mélancolie dorée qui ratisse large reste aussi, d'une certaine manière, l'un des outils de l’ambiguïté du film : encore une fois, on a bien du mal à sentir où Mikhalkov se situe vraiment, et c'est tant mieux. L'idéal communiste est une idée fuyante qui peine à concrètement s'incarner, se mêlant au regret de la vie d'aristocrate, fondant à travers la figure de Staline. Malgré l'extrême lourdeur démonstrative du film, qui le condamne trop souvent au ratage j'en ai bien peur, la nostalgie ambiante ne semble pas pointer vers une direction précise, justement parce que la spécificité de l'époque intéresse moins que le quotidien éternel et doré qu'elle vient bousculer. Mikhalkov semble en gros d'abord occupé à se poser dans la continuation naturelle d'une culture, en faisant perdurer l'esprit de la littérature nationale par exemple, pour regarder d'un même œil défiler les différentes strates de l'Histoire, comme perché plus haut que cela, la question de "l'âme russe" semblant dépasser ces aléas politiques (laissés hors-champ) d'un bout à l'autre du film.


Ceux que ça intéresse, y a déjà des discussions sur le film dans le topic de l'épisode 2.


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MessagePosté: 01 Sep 2013, 10:57 
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Vais essayer de prendre l'habitude de poster un extrait des films vus dans les topics critiques, histoire que ça reste plus concret qu'un long texte fouilli... Bon par contre ça rame bien (pas assez de buffer, faut laisser en pause un moment avant de démarrer : j'ai pas l'habitude du flash).



Dernière édition par Tom le 01 Sep 2013, 18:15, édité 1 fois.

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MessagePosté: 01 Sep 2013, 11:47 
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Bientôt les vidéos où tu mets ton texte en voix off :wink:
Des trucs comme ce coup du verre d'eau je crois que je suis incapable maintenant de tenir devant sans tiquer


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MessagePosté: 01 Sep 2013, 12:26 
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Ne pas le revoir, je dois. J'avais adoré à l'époque dans une vague très "académique" de ma cinéphilie.


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MessagePosté: 01 Sep 2013, 17:05 
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Mr Chow a écrit:
Bientôt les vidéos où tu mets ton texte en voix off :wink:

Ce sera le signe qu'il faudra venir me buter. Comme dans les vidéos de jeux vidéo sur youtube, "alors salut à tous, ca va bien, c'est encore moi.... moi ça va... alors on va voir un film de.... Mikhalkov...... russe.... une scène avec un verre.... on va voir le verre..... et voilà le verre hihi...... et on revient au verre...."

Je suis sûr qu'un des sept cercles de l'enfer est consacré à ces types.

Mr Chow a écrit:
Des trucs comme ce coup du verre d'eau je crois que je suis incapable maintenant de tenir devant sans tiquer

Tu dis ça parce que le son est en retard de 300 ms, avoue.
Isolée ainsi, la scène fait peut-être très appuyée, mais dans la continuité du film ça vient comme un doux glissement (ça se sent bien dans le montage fuyant d'ailleurs, avec la musique qui vient discrètement tout noyer ensemble), ça marche très bien. Le côté tapotage de verre ensuite (et encore, j'en ai gardé qu'un bout), je pige mieux.

Karloff a écrit:
Ne pas le revoir, je dois. J'avais adoré à l'époque dans une vague très "académique" de ma cinéphilie.

Comme je l'avais dit à propos de Chen Kaige, je reste très circonspect quant il s'agit de taxer d'académisme tout ce qui vient de cette période. Ce sont des films d'inspiration classique, qui refusent de maniérer, qui ne mettent pas leur prouesses en avant (la scène ici est une exception), qui cultivent l'invisibilité et un certain goût du vérisme malgré les gros sabots : c'est assez vite tentant de les taxer d'académisme à ce rythme, or je trouve qu'il y a souvent là-dedans un travail plus profond et complexe que chez le gros des cinéastes qui picturalisent la décennie suivante.

Bon, je généralise, je vais encore me faire taper sur les doigts.


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MessagePosté: 01 Sep 2013, 18:02 
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Marrant, j'ai l'impression que ça n'a rien à voir avec Urga, du même, qui doit être mon premier film non-idiot (mais je crois que je dis ça de plusieurs films).
Je voudrais quand même le voir, bien que l'homme en question, contrairement au film sus-nommé, me paraisse antpathique politiquement.

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MessagePosté: 01 Sep 2013, 18:14 
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Slacker a écrit:
Marrant, j'ai l'impression que ça n'a rien à voir avec Urga, du même, qui doit être mon premier film non-idiot (mais je crois que je dis ça de plusieurs films).

Bah je connais rien de l'ample filmo des années 70-80, sinon le Piano mécanique, que je conseille avant celui-là (et il joue pas dedans).

Slacker a écrit:
Je voudrais quand même le voir, bien que l'homme en question, contrairement au film sus-nommé, me paraisse antpathique politiquement.

Ah oui, tout indique que c'est une sombre merde, et l'orgueil du réal déteint sur le Mikhalkov acteur que je trouve assez irritant, même s'il se débrouille très bien.

Le positionnement politique des films, c'est assez ambigu dans les trois que j'ai vu. Dans 12 surtout, c'est vraiment le gros bordel. Le film esquive tout réel positionnement politique, se recentrant sur le drame des individus de manière commode (= "la guerre en Tchétchénie, c'est triste"), en laissant du coup passer tous les relents possibles (le côté très paternaliste envers le jeune Tchétchène de l'ancien officier russe...). Dans celui-ci et le Piano, c'est surtout les rapports entre aristocratie et communisme qui gênent, cette façon de ne pas choisir son camp, mais je trouve ça justement plutôt pas mal.

Tom a écrit:
Tu dis ça parce que le son est en retard de 300 ms, avoue.

Et c'est donc réparé.


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MessagePosté: 02 Sep 2013, 23:12 
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Longtemps dans mon top 20 de tous les temps; je l'ai revu au mois de mai et ai trouvé l'utilisation de la musique un peu lourde.

Cela reste exceptionnel et contrairement à ce que j'ai pu lire ou entendre, ce n'est pas "cliché", j'ai vraiment grandi dans pareille atmosphère.

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MessagePosté: 02 Sep 2013, 23:14 
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Dans laquelle du coup ? L'aristocratique, la rurale grotesque (avec l'exercice aux gaz), le quotidien tranquille avec l'impression d'une violence qui peut frapper à tout moment ?


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MessagePosté: 02 Sep 2013, 23:16 
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Tom a écrit:
Dans laquelle du coup ? L'aristocratique ?


Non, culturelle, bordélique, politique, dramatique - ce chaos ambiant, la réunion de gens très cultivés, deux agents du KGB à la porte de l'appartement, un grand-père au goulag, un père qui a failli y être déporté ...

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MessagePosté: 03 Sep 2013, 17:19 
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Localisation: bah un cimetière, tiens...
Le coup du verre est un bel exemple d'effet clinquant qui ne me fait strictement ni chaud ni froid. en fait je ne vois pas le truc. Je ne "tique" pas comme MrChow, mais je vois pas; J'en vois pas l'intérêt ni le caractère opératoire.

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"Tirer la chasse, c'est comme le ping-pong. Plus on y pense, moins on ressemble à sa mère".

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MessagePosté: 03 Sep 2013, 17:32 
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Sur moi, ça fonctionne toujours.

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MessagePosté: 03 Sep 2013, 18:14 
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Très grand film, le dernier grand film de Mikhalkov à mon avis, je pourrais développer sur l'aspect Tchekhovien du film (la beauté dans la banalité, la banalité dans la beauté) (mais j'ai peur de paraitre un peu snobinard après avoir ressassé Tchekhov dans le fil sur l'écriture du scénario), la nostalgie, le samovar, l’atmosphère qui tout comme à Billy Budd me parle beaucoup (je suis moi même issu d'une famille à moitié "soviétique"). Mais la tout de suite je n'ai pas le temps, mais c'est un chef d'oeuvre 6/6


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MessagePosté: 03 Sep 2013, 23:39 
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Bub a écrit:
Le coup du verre est un bel exemple d'effet clinquant qui ne me fait strictement ni chaud ni froid. en fait je ne vois pas le truc. Je ne "tique" pas comme MrChow, mais je vois pas; J'en vois pas l'intérêt ni le caractère opératoire.

Je saurait pas te dire ce que ça symbolise en soi, et ça ne m'intéresse pas des masses non plus. J'aime simplement qu'au milieu d'un foutoir collectif (les 20 minutes précédentes sont à l'image du premier plan) vienne soudain s'infiltrer un moment intime (isolé) et assez mystérieux (verre rempli pour un autre, bu, ramené vide), comme si soudain un truc débordait ou dérapait de la marche du film, contaminant son montage, tout en douceur... J'aime ce côté "dérèglement" (même si l'idée est simple, en soi).


Sinon en y repensant je sais pas trop comment interpréter la fin du film, et par-là même grosso-modo toute sa deuxième partie :

Une fois qu'il a vu le meurtre, le colonel chiale. Or, deux choses :

- Ou jusqu'ici il parvenait à dominer de son élégance civilisée la barbarie de la situation, tout en panache, et soudain il craque.
- Ou il pensait jusqu'ici être amené pour une affaire négligeable (d'où l'évocation de Staline dont il aurait le numéro), et comprend soudain qu'il va mourir.

Je trouve la deuxième solution infiniment moins charismatique.

Dans le premier cas, on a un homme qui comprend dès le milieu de l'après-midi qu'il marche vers sa mort, que la vie qu'il aime est finie, et qui garde la tête haute pour faire durer le parfum de monde pacifié et doré jusqu'au bout, pour ses proches.

Dans le second, on a juste un mec aveugle qui déploie tout les efforts du monde juste pour l'honneur, pour garder la face, les petites apparences, comme si une simple convocation le déshonorerait.

J'espère que c'est la première solution, mais plusieurs éléments semblent me donner tort...


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MessagePosté: 04 Sep 2013, 21:40 
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Je penche sévèrement pour la seconde.

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