Forum de FilmDeCulte

aka "Bad Timing / A sensual obsession"



A Vienne, un jeune professeur en psychanalyse, éprouve une passion obsessionnelle pour une jeune femme mystérieuse qui ne peut s’assouvir car elle se refuse souvent à lui. Un soir, il appelle la police car elle a tenté de se suicider. Un jeune inspecteur de police essaie alors de reconstituer l’emploi du temps du professeur et de la jeune femme.

Nicolas Roeg donne libre cour à son goût du montage et de l'ambiguïté dans ce film, plongeant son spectateur dans les méandres de son couple improbable (Art Garfunkel en prof cérébral et fluet vite agaçant, et Theresa Russel en bombe de sensualité totalement "incontrôlable") qui lui permet d'étaler un certain nombre de gammes qui paraissent tour à tour aujourd'hui aussi arty que fascinantes... Dés le début le réal semble abuser au générique, où une visite d'expo Klimt se superpose à un Tom Waits gueulard. Un peu plus tard, Roeg ne sera pas avare de canons de Pachelbel ou de Keith Jarret, le tout mélé à du "Who are you" des Who...

Mais certaines expérimentations sont parfois assez fortes, comme cette longue séquence de retrouvailles et sa mise au point embuée, la plongée au Maroc assez surprenante, et surtout le personnage de flic joué par Harvey Keitel qui prend de plus en plus d'ampleur dans ce récit d'obsession et de construction qui ne se joue pas forcément que dans la relation entre les deux protagonistes, et laisse sur beaucoup d'ambiguïté sur les projections de l’enquêteur, ici presque metteur en scène.

On a le sentiment que sur le principe de l'énigme policière, Roeg essaye un film qui se veut total sur le couple en impasse, de la folie au mortifère : tout est surchargé en permanence, et il faut intégrer un élément qui sonne imédiatement artistique ou littéraire dans le cadre dés que c'est possible, user et abuser des analogies... mais si ce baroque est parfois daté et appuyé dans les effets, il reste encore très puissant dans le spectacle de déchirement masochiste proposé, et surtout dans son goût pour l'insaisissable. Un kaleïdoscope superbement scopé par Anthony Richmond qui donne paradoxalement à son "sujet", envie d'user des revisions...

"Essaye de moins me comprendre et de m'aimer plus"

Oui ce montage bâtard qui aurait pu passer pour de la virtuosité dans les swinging eighties a très mal vieilli, j'ai trouvé ça pénible sans doute parce qu'on a peu d'empathie pour ce couple de cérébral orgueilleux et de nympho hystérique, même si le film est assez osé vers la fin quand il prend des tournures plus dark, avec certaines scènes qu'on ne verrait plus présentées comme ça aujourd'hui. Toute la partie enquête avec Keitel qui te démêle le fil de la soirée en deux coups de cuillère à pot, on dirait un épisode de Columbo qui se serait greffé sur un film érotique d'Antonioni.
2/6

J'en avais entendu parler comme de "ce film que Cronenberg, Soderbergh et tels autres cinéastes considèrent comme une pépite fascinante", et en effet je comprends pourquoi.

C'est d'une sophistication extrême dans cette matière riche tant dans les références, les thèmes, les décors, le montage, les musiques, tout cela pour cerner au plus près l'intimité d'un couple. Pas sûr d'avoir bien pigé tout ce que le film entreprend (et notamment son dernier acte) mais c'est bon signe. J'ai été assez fasciné, je pense aussi que le film puise dans toute une culture (Vienne, le Maroc, la psychanalyse, la musique classique, Klimt...) qui m'a toujours intéressée.

Faut que je mate d'autres Roeg.

Rarement vu de film aussi pervers je pense.

Oui, d'ailleurs ma copine a pas pu finir, elle a trouvé ça trop malaisant. Tu dis ça dans un sens négatif?

Pas vraiment, c'est d'ailleurs au crédit du film que j'ai su l'apprécier alors que je ne suis pas forcément un adepte du "cinéma déviant" ou qui se vautre un peu trop complaisamment dans le malaise. On n'est pas dans le simple thriller érotique à la Adrian Lyne, ni dans un truc qui se veut plus subtil - et raté à mon avis comme peut l'être Comfort of Strangers de Schrader - et je me souviens avoir été marqué par la révélation finale :



ajoute à ça que c'est Garfunkel qui joue le rôle. Je ne m'y étais pas attendu.

Oui Garfunkel a pris un gros risque d'aller dans un film pareil, son personnage est détestable, on le voit nu, dans des positions peu flatteuses, etc. Totalement à l'encontre de son image de chanteur en duo velouté et mélancolique. Chapeau.
La révélation finale et la scène qui va avec, quel malaise, on a rarement vu ça au cinéma.

Mais voyez-le, c'est bien hein!

Ouais dommage que ta copine ne soit pas restée jusqu'au bout.
Dommage que Roeg n'ait jamais adapté de Patricia Highsmith, il aurait été parfait pour ça (on attend toujours l'adaptation d'Almodovar de The Tremor of Forgery, roman génial, qui est l'un de ses dream projects qu'il ne fera sans doute jamais). D'ailleurs faire dans le patrimonial pour ta chaîne youtube, ça pourrait être sympa aussi.

Oui j'aimerais beaucoup et à vrai dire ça m'intéresserait encore plus que l'actu, mais malheureusement Théo est pas chaud. Il me faut VRAIMENT un deuxième intervenant