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MessagePosté: 26 Déc 2011, 23:24 
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Village of the Damned en VO.

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Le village de Midwich, en Angleterre. Un matin, tous les habitants et animaux tombent inconscients, durant plusieurs heures ; toute personne qui pénètre dans un périmètre autour du village également. Alors que l'armée cherche une solution, le village entier se réveille, comme si de rien n'était. Mais très vite, il s'avère que toutes les femmes du village sont tombées enceintes.


C'est touchant de découvrir à la vision les filiations multiples de ce film, qui s'imposent comme une évidence, du Ruban blanc d'Haneke au Phénomènes de Shyamalan. Sa capacité d'adaptation à travers le temps, d'influence de cinémas aussi différents, vient peut-être du fait que le film est déjà en soi, dans sa forme, dans le ton, un objet très singulier. D'une classe et d'une élégance extrêmes, que viennent seulement déranger les discrets effets de regard lumineux pas vraiment nécessaires, l'ensemble frappe par son flegme total, à l'image de ses têtes blondes en fait. C'est la fin du monde, certes, mais discutons en calmement autour d'une cheminée pendant que l'alien de l'apocalypse joue avec ses copains dans la maison d'à côté... Y a pas à dire, c'est très anglais. Limité au périmètre pas du tout claustrophobe d'un petit village ouvert, le film arrive à créer sinon un malaise, du moins un constant sentiment d'étrangeté (presque comique, parfois, à force d'absurde) d'une communauté qui fait bonne mine et qui essaie de composer avec l'étranger désigné, façon "essayons de cohabiter avec les zombies nos amis", puisque le statut surnaturel des enfants est quasiment tranché avant même l'accouchement.

C'est dommage du coup que ce principe ne soit pas poussé jusqu'au bout, qu'on n'exploite pas d'avantage la relation entre Sanders et son fils David, leurs échanges froids et courtois plein de potentialités, les attaques au tour par tour et le repli dans la maison isolée... J'ai l'impression d'avoir vu la moitié de ce que tout ce sujet peut offrir. On reste dans le cadre d'une série B, de sa sécheresse extrême et de sa durée courte, et cela est quelque peu frustrant, d'autant que le film gagne en calme étrange ce qu'il perd en angoisse et en tension (à force de froideur et de détachement, le spectateur lui aussi finit par ne plus ressentir grand chose). Mais Rilla en tire néanmoins beaucoup de beauté, notamment par la façon dont il arrive à chopper avec une précision glaciale le mal-être ambiant, l'annonce de la grossesse terrifiant les filles vierges, les maris dépressifs réunis penauds au bar - tout ça dans l'économie la plus racée, en deux-trois traits, dressant, après déjà quelques années de guerre froide (le parallèle est facile, mais le film l'offre quand même sur un plateau), le portrait d'un quotidien familier obligé de composer avec les règles d'un monde ambigu et nouveau.


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MessagePosté: 29 Sep 2025, 21:04 
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Avec, entre autres, la trilogie Quatermass et Night of the Demon, un autre monument de la tweed horror dont les caractéristiques sont déjà dessinées ci-dessus. Belles baraques à moulures et cheminées, vestes rembourrées et gilets d’intérieur, indignation guindée et haute expertise… le contexte idéal et la catégorie socio-professionnelle tout indiquée pour accueillir une catastrophe hors du commun.

Catastrophe dont les images sont en effet particulièrement ancrées dans la culture populaire, dont finalement le remake par Carpenter (encore jamais vu, je suis curieux) en est l’expression la plus anecdotique.

Mais alors, métaphore presciente sur les grossesses non-désirées, qui plus est suite à des rapports (ou, dans ce contexte précis, des inséminations) non-consentis ?

Pour qu’une métaphore fonctionne intellectuellement, au-delà donc de l’aspect esthétique, il faut qu’elle soit cohérente jusqu’au bout. Et en l’occurrence, les enfants du film ne sont humains que d’apparence, ce sont en réalité des parasites. Pour rappel, et c’est là la véritable métaphore de cette histoire, le titre original du roman de John Wyndham est The Midwich Cuckoos. Certains coucous sont connus pour pondre leurs œufs dans le nid d’autres espèces, leur poussin programmé (c’est-à-dire qu’il n’a pas appris par l’exemple à faire cela) pour éjecter du nid les œufs non-éclos voire les poussins originaux dans le but de s’accaparer l’instinct maternel de la mère dépossédée.

Et si les mères dans le film sont elles aussi dépossédées de toute agence, jusqu’à même de l’expérience unique de la normalité naturelle de la grossesse (les embryons ont une croissance accélérée), ce qui contribue indéniablement au malaise de la première partie, c’est également le cas des pères et par extension de l’ensemble de la communauté. C’est donc le monde entier qui souffre du même sort, une impuissance totale au sens propre comme figuré puisque la conception s’est faite en dehors des canaux habituels. Les enfants sont, quant à eux, caractérisés par l’exact opposé : ils sont dans le contrôle total, dans la supériorité, la tromperie, la longueur d'avance, la survie à tout prix. Complètement hermétiques à toute espèce d’affection. Des parasites inhumains, d’une autre espèce.

Le véritable propos, ou enjeu, ou conflit, esquissé dès la moitié du film, et qui découle naturellement de la métaphore du coucou et son parasitisme préprogrammé, c’est la question de l’inné et de l’acquis — question partagée entre le scientifique vieillissant fasciné par les performances intellectuelles inouïes des enfants et son beau-frère militaire estomaqué par leur absence de bonté. Les enfants, lui rétorque le scientifique, ne naissent pas avec une moralité innée, il faut la leur apprendre et compte tenu de leur intelligence supérieure, ça ne devrait pas être difficile. Il voit dans leur intellect impressionnant un raccourci vers la moralité. La moralité est un frein, lui répond son beau-frère, et rien ne permet de supposer que ces enfants ont la moindre capacité, malgré leur haute intelligence, à en apprendre l’usage (ou pire encore, mais ce n’est que sous-entendu, la volonté). Leur intelligence supérieure, pour lui, est signe qu'ils risquent de ne pas vouloir s'en embarasser.

Maintenant comme noté par Tom, le film est singulièrement froid la plupart du temps, placide dans son déroulé de l’angoisse. Si cela contribue à son charme et son impact, je reste plus réceptif à l’énergie pulp du duo Val Guest/Nigel Kneale et à la noirceur cossue de Jacques Tourneur.

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