Forum de FilmDeCulte

Le forum cinéma le plus méchant du net...
Nous sommes le 01 Avr 2025, 23:06

Heures au format UTC + 1 heure




Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 4 messages ] 
Auteur Message
MessagePosté: 01 Juil 2009, 01:48 
Hors ligne
Successful superfucker
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 28 Déc 2006, 21:20
Messages: 8711
Image

Un film qui a inspiré le clip de Bohemian Rhapsody

En 1948, le juge Haywood est envoyé à Nuremberg pour présider le procès de quatre magistrats allemands accusés de trop de complaisance à l'égard du régime Nazi. L'un d'eux, Janning, se renferme dans un silence méprisant et, en écartant les témoignages et les films sur les camps de concentration, dit qu'il n'a fait qu'appliquer la loi en vigueur...

Film-somme de procès de trois heures qui finalement pose une question sur la culpabilité universelle déjà abordée dans The reader, quand commence la participation au régime nazi. Si Stanley Kramer a le recul nécessaire du cinéaste suffisamment au courant que les EU sont en pleine guerre froide pour éviter tout manichéisme, ce Jugement à Nuremberg vire forcément à la leçon d'histoire portée par un casting de poids lourds (Clift, Lancaster, Widmarck, Garland, Dietrich...), avec un déroulement assez consensuel vis-à-vis de la complexité des questions soulevées avec soudaine figure de repentance un brin forcée à la clé. Néanmoins un vrai tour de force dans l'écriture.
4/6


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 15 Avr 2024, 10:05 
Hors ligne
Meilleur Foruméen
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 25 Nov 2005, 00:46
Messages: 87709
Localisation: Fortress of Précarité
En 2008, l'American Film Institute a établi des listes de 10 meilleurs films de chaque genre et j'ai décidé de rattraper tous ceux que j'avais pas vu sur la liste des 10 meilleurs courtroom dramas (à savoir les 5 derniers) :

1 To Kill a Mockingbird (1962)
2 12 Angry Men (1957)
3 Kramer vs. Kramer (1979)
4 The Verdict (1982)
5 A Few Good Men (1992)
6 Witness for the Prosecution (1957)
7 Anatomy of a Murder (1959)
8 In Cold Blood (1967)
9 A Cry in the Dark (1988)
10 Judgment at Nuremberg (1961)

J'ai également noté ceux qui figurent sur la liste composée par l'American Bar Association (qu'ils ont classé dans l'ordre chronologique) :

La Passion de Jeanne d'Arc (1928)
M le Maudit (1931)
The Wrong Man (1956)
12 Angry Men (1957)
Paths of Glory (1957)
Anatomy of a Murder (1959)
Inherint the Wind (1960)
Judgment at Nuremberg (1961)
The Trial (1962)
To Kill a Mockingbird (1962)
A Man For All Seasons (1966)
The Verdict (1982)

Sur celle-là, il me manque le Hitchcock, l'autre Kramer, le Welles et le Zinneman.

Mais comme j'étais tout seul ce week-end, je me suis dit que j'allais commencer avec celui qui dure 3h10.

Et j'ai pas grand chose à rajouter à l'avis de DPSR.

Je dois avouer avoir été un peu déçu.
Sur la base du titre, je m'attendais au procès des gens directement impliqués dans les camps, genre Göring ou Eichmann, mais en réalité, il est assez malin de passer par le procès de juges, d'un point de vue purement dramaturgique (des juges jugent leurs semblables) mais surtout d'un point de vue thématique, parce que le film ambitionne de ne pas donner dans une parodie de procès couru d'avance avec des hommes politiques militaires dans le box des accusés, mais plutôt de poser la question de la responsabilité de hauts fonctionnaires qui ont choisi de continuer à exercer sous les IIIème Reich.

À ce titre, la démonstration m'est apparue plus nuancée que je ne l'attendais, l'écriture donnant tout de même la part belle à l'avocat de la défense, un excellent personnage campé à merveille par une jeune Maximilian Schell (récompensé à juste titre par l'Oscar du Meilleur Acteur). Le statuesque Burt Lancaster est tout aussi impressionnant en accusé mutique avant son inévitable monologue et le portrait propose juste ce qu'il faut de complexité pour ne pas diaboliser outre-mesure les coupables alors même que le film se permet de montrer in extenso un reportage sur les camps avec images d'archives réelles de charniers. C'est dans ces moments-là, ainsi que dans les passages hors-tribunal où le protagoniste interprété par Spencer Tracy parle avec des civils allemands de leurs positions durant la guerre, que tu ressens en effet un côté "leçon d'Histoire" (j'imagine que c'était le premier film mainstream à montrer ça comme ça) qui empêche le film d'être un grand film de cinéma de prêtoire (et ce, malgré les incalculables travellings circulaires de Kramer autour du témoin ou de l'avocat qui parle).

Par conséquent, c'est un peu long pour ce que c'est.

Pas "Top Ten du genre material" à mes yeux.

_________________
Image


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 15 Avr 2024, 12:48 
Hors ligne
Meilleur Foruméen
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 25 Nov 2005, 00:46
Messages: 87709
Localisation: Fortress of Précarité
Ah sinon c'était marrant de voir d'où vient l'inspiration d'À la poursuite d'Octobre rouge pour la transition d'une langue vers une autre comme une traduction instantanée en un zoom.

_________________
Image


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 31 Mar 2025, 12:58 
Hors ligne
Expert
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 25 Oct 2009, 11:34
Messages: 728
Film Freak a écrit:
Ah sinon c'était marrant de voir d'où vient l'inspiration d'À la poursuite d'Octobre rouge pour la transition d'une langue vers une autre comme une traduction instantanée en un zoom.
En fait, Kramer a repris l’idée du zoom qui figure déjà dans le téléfilm dont son film est un remake. Dans le film de Kramer, la transition se fait lors d'un zoom sur l'avocat, vu depuis le box des traducteurs. Dans la version télé (réalisée en 1959 par George Roy Hill pour CBS), on passe d’un zoom sur la bouche du traducteur à un gros plan sur la bouche de l’avocat, qui parle maintenant anglais :
https://archive.org/details/playhouse-90-judgement-at-nuremberg-cbs-1959
L'enregistrement a même conservé les coupures pubs, qui interviennent aux pires moments : genre, une pub pour des appareils photos, juste après les images des camps...

Le passage se situe entre 0h19 et 0h20. Je ne sais pas si c’est le premier film à utiliser cet effet mais l’idée d’un tel raccord ne pouvait sans doute venir qu’avec l’invention de la traduction simultanée, et c’est effectivement à Nuremberg qu’elle a été utilisée systématiquement, à grande échelle, pour la première fois. (D’où, dans le film, le coup de l’ampoule qui clignote quand l’orateur parle trop vite : les interprètes venaient à peine d’être formés à cette technique et ne suivaient pas toujours le rythme).

J’ai regardé les deux versions, le film d’abord, et le téléfilm ensuite, par curiosité. On retrouve certains comédiens dans les deux versions, notamment Maximilian Schell dans le même rôle, et deux des accusés sont joués par les mêmes acteurs. Le scénario d’Abby Mann est le même dans sa structure, mais joué deux fois plus vite semble-t-il, puisque le téléfilm dure seulement 1h30, et pas 3h10. C'est vrai que le film compte plusieurs ajouts : principalement la romance entre le juge et Mrs Bertholt (Marlene Dietrich) (dans le téléfilm, le juge vient avec son épouse). Le film développe surtout ce qui se passe hors du tribunal : les scènes où le juge rencontre des Allemands (les serviteurs de la maison où il loge, les rencontres dans les brasseries), les discussions avec les militaires…
L'autre modification importante, c'est le choix de la dernière scène : le film se termine sur la rencontre entre Haywood (Tracy) et Janning (Lancaster), dans laquelle Haywood conclut sur la responsabilité individuelle du condamné. Dans le téléfilm, elle est suivie d'une dernière scène : celle où le juge Haywood rappelle qu'une démocratie en guerre ne doit pas céder sur ses valeurs (on entend aussi ces répliques dans la version Kramer, mais plus tôt). Ce changement est révélateur de l’ambition légèrement différente des deux versions : le film mise principalement sur les effets dramaturgiques d’une confrontation entre deux stars ; la version télé est moins grandiloquente et davantage focalisée sur sa visée pédagogique, sur les leçons qu’on peut en tirer au présent.

Comme film de procès, "Jugement à Nuremberg" est plutôt lourdingue : la comparaison avec la version télé, plate et sobre, fait ressortir tout ce qu’il y a de boursouflé dans la superproduction de Kramer, en termes d’interprétation et de mise en scène. J'étais assez vite saturé de cette succession de scènes de témoignages utilisées comme des occasions de performance (Montgomery Clift, Judy Garland...) Même Lancaster (que j'adore) n’est pas toujours bon je trouve, mais c’est intéressant de le voir rôder les attitudes spectrales qu’il reprendra dans "Le Guépard" deux ans après. Spencer Tracy s'en sort mieux, plus sobrement, mais c'est le rôle qui veut ça (il joue un juge de seconde zone, incarnant finalement l'Américain moyen, qui sait, par son sens commun plus que par la connaissance du droit, ce que sont la justice, l’humanité). La mise en scène de Kramer, quand elle n’abuse pas d’effets inutiles (les travellings circulaires dont tu parles), est souvent ridicule (comme ce raccord entre les chopes de bière qu’on frappe sur la table et le marteau du juge qui réclame le silence).

Par contre, comme reflet de son époque, c’est passionnant, dans un jeu complexe à trois bandes, puisque le film tente de faire résonner ensemble trois situations judiciaires très différentes : un procès dans l’Allemagne nazie des années 30 ; le procès organisé par les Alliés en 1948 ; et les procès aux Etats-Unis vers 1960.
Film Freak a écrit:
le film ambitionne de ne pas donner dans une parodie de procès couru d'avance avec des hommes politiques militaires dans le box des accusés, mais plutôt de poser la question de la responsabilité de hauts fonctionnaires qui ont choisi de continuer à exercer sous le IIIème Reich. À ce titre, la démonstration m'est apparue plus nuancée que je ne l'attendais, l'écriture donnant tout de même la part belle à l'avocat de la défense
C’est vrai que le film témoigne d’un vrai changement d’époque dans la manière de juger le nazisme. Les films d’après-guerre insistaient sur la seule culpabilité des chefs, alors que "Jugement à Nuremberg" souligne la responsabilité et le déni du peuple allemand, les complaisances, les complicités, les trahisons des autres pays. Le nazisme n’est plus une affaire strictement allemande, c’est l’affaire du monde (dit l’avocat), et sur plein d’aspects, le film tend un miroir peu complaisant aux Etats-Unis en particulier, en les accusant explicitement de violation des droits humains (les lois eugénistes de l’Etat de Virginie, le bombardement d’Hiroshima et Nagasaki) et en pointant du doigt les industries américaines qui ont tiré profit de leurs échanges avec l’Allemagne nazie avant la guerre.

Par certains aspects, c’est moins "Jugement à Nuremberg" que "Jugement de Nuremberg", au sens où le film ne s’interroge pas réellement sur la culpabilité des accusés : il met surtout en question la capacité du pouvoir judiciaire à rendre la justice indépendamment des pressions politiques. Le suspense sur lequel repose le film ne consiste pas à savoir si les accusés sont coupables (le regard d’outre-tombe de Lancaster le dit dès le début) mais s’ils seront déclarés tels alors que ce verdict va contre les intérêts des Alliés eux-mêmes. En développant tout ce qui se passe en dehors du tribunal, le film rend bien compte des pressions exercées par l’état-major sur le juge pour faire acquitter les accusés au moment où les Américains ont besoin de ne pas s’aliéner l’Allemagne, dans leur lutte contre l’URSS (le blocus de Berlin commence pendant le procès). Le film établit ainsi une symétrie entre la situation des deux juges, l’Américain et l’Allemand : là où le juge allemand prétend avoir sacrifié tous ses principes et cédé aux nazis au nom de l’intérêt supérieur de son pays, le juge américain tient tête, seul contre tous. (On notera que dans son art des parallèles, le scénario n’y va pas avec le dos de la cuiller, puisque ce n’est pas tout à fait la même chose, en termes de dilemme moral, de subir des pressions pour condamner à mort un innocent ou pour relaxer des coupables.) On est bien dans un film américain : la claire conscience d’un héros ordinaire suffit à sauver l’Amérique et les principes universels de justice. Mais face à Janning, dans la scène finale, le juge américain rappelle ce qui lui sert de boussole morale sans triomphalisme, avec plus de fatigue et de déception qu’autre chose, tant le film a montré à quel point ces principes résistaient mal dans le jeu des intérêts.

Je ne pense pas qu’on puisse parler, comme DPSR, de film de repentance, parce qu’il n’entend pas donner des leçons de morale au passé, mais plutôt mesurer les effets, dans le présent, d’une compromission comme celle de Janning. Le film a dû susciter pas mal de réactions (il faudrait vérifier) en établissant des parallèles évidents avec l’actualité la plus récente : les procès de la période maccarthyste et la lutte pour les droits civiques. Ça ne devait pas demander un grand effort de mémoire pour se souvenir de ce qu’était un procès truqué comme celui évoqué dans le film autour du personnage de Judy Garland, alors que la période maccarthyste venait à peine de s’achever. Et lorsque Richard Widmark commente les images du film "Nazi concentration camps" projetées au tribunal, des plans de coupe montrent les visages des spectateurs, et parmi eux, celui d’un soldat américain noir, au moment où Widmark évoque le sort des enfants juifs (là aussi, les spectateurs de l’époque ne devaient pas avoir de mal à se souvenir d’un procès comme celui des meurtriers d’Emmett Till, l’adolescent lynché en 1955, dont les meurtriers avaient été acquittés).


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 4 messages ] 

Heures au format UTC + 1 heure


Articles en relation
 Sujets   Auteur   Réponses   Vus   Dernier message 
Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Un monde fou, fou, fou, fou (Stanley Kramer - 1963)

Castorp

1

1272

01 Juil 2016, 15:13

Tetsuo Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Inherit the Wind (Stanley Kramer, 1960)

Film Freak

0

130

29 Déc 2024, 16:58

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Le Dernier rivage (Stanley Kramer - 1959)

Blissfully

1

1309

01 Avr 2007, 21:03

Blissfully Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Kramer contre Kramer (Robert Benton, 1979)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2 ]

Art Core

15

679

15 Oct 2024, 08:02

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Moonwalker (Jerry Kramer, 1988)

Cosmo

5

1452

29 Mar 2008, 13:51

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. La Peur au ventre (Wayne Kramer - 2006)

Film Freak

5

1686

26 Mai 2021, 22:11

Qui-Gon Jinn Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Devine qui vient dîner ? (Stanler Kramer - 1967)

Blissfully

4

1499

06 Jan 2025, 23:00

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Hardware (Richard Stanley, 1990)

Art Core

7

342

24 Jan 2025, 15:23

Mr Degryse Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Rouge (Stanley Kwan - 1987)

[ Aller à la pageAller à la page: 1 ... 5, 6, 7 ]

Tom

99

8758

17 Déc 2024, 10:24

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Shining (Stanley Kubrick - 1980)

[ Aller à la pageAller à la page: 1 ... 4, 5, 6 ]

Baptiste

76

9699

04 Juin 2015, 08:31

Arnotte Voir le dernier message

 


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Bing [Bot] et 122 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Rechercher:
Aller à:  
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction par: phpBB-fr.com
phpBB SEO
Hébergement mutualisé : Avenue Du Web