Forum de FilmDeCulte

En 2013, Edward Snowden déclenche l’un des plus grands séismes politiques aux Etats-Unis en révélant des documents secret-défense de la NSA. Sous le nom le code « CITIZENFOUR », il contacte la documentariste américaine Laura Poitras. Elle part le rejoindre à Hong Kong et réalise en temps réel CITIZENFOUR, un document historique unique et un portrait intime d’Edward Snowden.

On peut se demander si l'oscar décerné à Poitras récompense plus le courage d'un whistleblower que son travail de documentariste tant les choix de montage et l'absence de rythme de Citizenfour donnent plutôt l'impression qu'elle s'est retrouvée au bon endroit au bon moment. Citizenfour raconte ainsi en temps réel l'affaire, à partir du moment où elle a été contactée par Snowden jusqu'à son exfiltration en Russie, un peu sur le modèle de la dernière saison de The newsroom.

Citizenfour se concentre davantage sur l'humanisation plutôt qu'une thrillerisation de l'affaire, montrant un Snowden posé, recroquevillé dans une chambre d'hôtel de Hong Kong assis en tailleur sur son lit les deux tiers du film, assistant à travers la télévision de la chambre ou recevant des coups de fils de ses proches l'informant que sa baraque se fait perquisitionner ou que le virement de son loyer est subitement devenu impossible, mais tout en gardant la tête froide et en mesurant les risques qu'il encourt. C'est tout à l'honneur de Poitras de ne pas surdramatiser la paranoïa (même si un épisode de signal d'alarme d'hôtel de cinq minutes vient rappeler que le trio composé d'elle, de Snowden et du journaliste du Guardian qui a sorti l'affaire, reste toujours sur le qui vive) et de montrer finalement des gens lucides, mais le tracé linéaire et neutre de Citizenfour n'apprend pas grand chose de neuf si ce n'est de montrer une personne, un quidam, sous son visage de chair et de sang là où médias et politiques tentaient de le diaboliser. Conséquemment, Citizenfour donne l'impression d'un documentaire touchy qui aurait pu être saisi et les images confisquées à tout moment, et l'extrême précaution grâce à laquelle l'affaire a pu sortir et ce film comme un témoignage de cette réussite, mais au final, tout reste mal foutu, n'apprend pas grand chose, et on se prend à rêver comment un vrai cinéaste avec plus de personnalité et moins de pied au plancher, du genre un Werner Herzog, aurait pu raconter cette chasse à l'homme ordinaire.
2/6

Grosse cote auprès des critiques US aussi. Et le BAFTA, et le Spirit, et le DGA...


Et le prix de la guilde des monteurs aussi


Mais je pense laisser la primeur au film d'Oliver Stone qui sortira en décembre.

Fuck documentaries.

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Tu peux y aller les yeux fermés car le film ne se concentre quasiment pas sur son passé, évacué en 3 secondes. Pas un mot sur son passage dans l'armée montré dans la première photo du Stone, par exemple. Ses motivations en restent au stade des généralités, sa copine est quasi-absente... Bref, je pense que les deux films seront très complémentaires.

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Liam Engle: réalisateur et scénariste

Ouais enfin ce sera pas le gros du film ça.

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Mais justement, même la fuite, la traque médiatique, sont à peine montrés. Ça se focalise sur lui qui fait ses révélations à la réalisatrice et au journaliste. Ça va pas te SPOILER.

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Liam Engle: réalisateur et scénariste

Comment tu vends trop bien le film.

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J'ai passé la séance à tenter me persuader que ce que je voyais n'était pas un vulgaire docu-fiction au mieux maladroit, au pire sensationaliste. Difficile de se dire qu'on a bien affaire au vrai Snowden dans sa chambre d'hôtel, révélant ses fuites pour la première fois. Ironiquement, cette sensation n'est jamais dûe à l'approche "thriller" du film qui ne fonctionne pour ainsi dire jamais. Le film n'est jamais meilleur que lorsqu'il se contente de retranscrire les images brutes sans voix-off sentencieuse ou effets bidon, et lorsqu'il se recentre sur Snowden plutôt que sur les journalistes qui tentent parfois de lui voler la vedette. Pas que les journalistes aient une situation facile, ils sont même très courageux, mais le vrai héros de l'histoire, c'est Snowden. J'ai par exemple trouvé très limite le texte au tout début du film où la réalisatrice se place d'emblée comme un voix que le gouvernement cherche à étouffer.

Le comportement de Snowden, impérial, joue finalement presque contre le film. Quand le film se fait trop pesant, lui fait preuve d'humour, de distance, de sérénité. Les ennemis de Snowden, ou pluôt ses adversaires, tant toute cette affaire ressemble à un gigantesque jeu sadique, semblent aussi passer leur temps à brouiller les pistes, en nourrissant le film d'une certaine désinvloture. Il y par exemple cette scène incroyable avec le représentant du ministère de la justice qui cherche à étouffer les lanceurs d'alerte : dans un film de fiction, une telle scène aurait été considérée comme grossière, et le personnage lui-même aurait été considéré comme improbable de part son look (noeud papillon, visage anachronique) et son comportement. Le film adopte les codes du techno-thriller et cherche à se faire aussi froid que les systèmes informatiques de la NSA, pendant que les vrais acteurs de l'affaire passent leur temps à afficher leur humanité. J'ai eu l'impression que la réalisatrice ne savait pas vraiment comment réagir à ça. Si elle avait plutôt réalisé un film de fiction, elle aurait évacué ces moments pour raconter l'histoire d'un homme face à la machine. Ou alors elle aurait rajouté de l'ironie sur ce qui est déjà par nature ironique (j'ai peur que ce soit le cas du film de Stone). C'est le réel qui ici la rattrape et sauve son film.
L'autre journaliste et elle sont les seuls à parler toujours gravement et à afficher un visage toujours fermé, à en faire des tonnes dans le gravitas, comme s'ils étaient avant tout les acteurs du film, pensant au résultat final après montage. Du coup, le film n'est jamais intéressant lorsqu'il quitte Snowden pour se recentrer sur un sujet qu'on connait déjà trop bien et qui ici n'est jamais franchement questionné. C'est lourd et pompeux ou alors plat et simpliste, factuel, sans vrai regard.
Je recommande tout de même vivement le film pour ces instants avec Snowden, incroyables et précieux.

Toutes les scènes avec Snowden sont fascinantes. Le film à voir rien que pour ça. Mais dès qu'ils quittent la chambre d’hôtel et qu'on ne le voit plus, c'est l'ennui total.

4/6.