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MessagePosté: 16 Mai 2016, 09:01 
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Cinéphile obsessionnel et sans emploi, Hossein Sabzian ne peut résister à la tentation de se faire passer pour le célèbre cinéaste Mohsen Makhmalbaf à qui il ressemble, afin de s’attirer les faveurs d’une famille iranienne bourgeoise. Une fois démasqué, cet homme est traîné devant la justice pour escroquerie. Apprenant ce fait divers, le réalisateur Abbas Kiarostami s’empresse de réunir une équipe de tournage afin de reconstituer les faits et de filmer le procès de Sabzian.

Jusqu'à présent ma connaissance de Kiarostami était circonscrite à la trilogie gigogne Où est la maison de mon ami?/Et la vie continue/Au travers des oliviers, 3 films qui m'ont à l'époque profondément bouleversés. Close-up est justement sorti entre le premier et le deuxième film de cette trilogie, et tout en traitant d'un sujet totalement différent, il n'en est finalement pas si éloigné.

Le premier tour de force de Kiarostami est que tout en livrant une œuvre ultra-cinéphilique qui pourrait rapidement devenir un pensum intellectualiste sur le cinéma et l'opposition entre le réel et la fiction, il ne se départit pas de son naturalisme (celui-là même qui fait la force de Où est la maison de mon ami?) qui donne une véritable authenticité à ce qui nous est donné à voir. Mohsen Makhmalbaf y est également pour beaucoup, époustouflant de sincérité dans le rôle de l'usurpateur de sa propre identité, moi qui me l'imaginait beaucoup plus dur dans son caractère (probablement à cause de sa ressemblance avec Ahmadinejad), j'ai été saisi par sa douceur, voir sa candeur lorsqu'au tribunal il explique les motivations qui l'ont poussé à "commettre son crime", jusqu'au final qui m'a presque tiré une petite larme.

L'autre atout principal du film tient à la critique (tout du moins est-ce ce que j'ai perçu) du pouvoir démesurément détenu par le cinéma. De part le sujet du film tout d'abord, l'histoire de cet homme extrêmement simple qui transcende son existence en jouant le rôle d'un cinéaste qui le fascine, et piège une famille qui veut bien se laisser piéger tant ils sont heureux de pouvoir côtoyer le célèbre cinéaste. La place occupée par la caméra/le réalisateur ensuite, double de la police (l'entretien avec Kiarostami dans le commissariat) et de la justice (où Sabzian/Makhmalbaf peut se tourner vers la caméra pour exprimer ses motivations).

Il y aurait bien évidemment bien d'autres choses à dire sur ce film, matériau idéal à des exégèses sans fin (voir par exemple l'excellente critique faite ici http://www.critikat.com/panorama/analyse/close-up.html). Me reste pour ma part à découvrir tout le reste de la filmo de Kiarostami, en particulier tous les films postérieurs à Au travers des oliviers, avec la petite angoisse de savoir s'il aura réussi à maintenir son œuvre à un niveau aussi haut que dans ces 4 films des années 80-90.


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MessagePosté: 16 Mai 2016, 11:00 
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Jusqu'à Le vent nous emportera, c'est du très haut niveau. Ten est un peu à part. Depuis, je ne sais plus trop ce qu'il fait.


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MessagePosté: 16 Mai 2016, 11:07 
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C'est moins bien maintenant. Beaucoup moins bien.

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MessagePosté: 18 Mai 2016, 16:34 
"Copie Conforme" est quand-même très bon, même si le foisonnement des fictions du film produit paradoxalement un épuisement progressif (et contrôlé) du cinéma, du désir et du réel. Kiarostami dans "Copie Conforme" assume sans détour la fin d'un cycle artistique, à la fois personnel et collectif. Et cela au contraire de "Close Up", où l'usurpation est un révélateur des rapports politiques, sentimentaux et culturels réels, qui sont moins déterminés que le régime et le discours que "l'on" tient dessus. L'usurpateur, par sa maladresse, son entêtement et son innocence, crée justement une situation où le "on" comme sujet d'un regard n'est plus possible (en cela c'est l'inverse du néo-réalisme italien, qui même chez Pasolini et chez Moretti essaye de cerner ce qui serait l'idéologie et la conscience "moyennes" de la bourgeoisie progressiste).

Le "Mirroir" de Panahi est aussi très bon et répond à Close-Up, mais, tout en partant d'un dispositif proche, l'inverse: la petite fille est une actrice qui joue le refus de la fiction. Le lieu où se noue le film est là aussi un bus, dans laquel on en remonte plus. Les films de Ferhadi lui doivent beaucoup, finalement "une Séparation" "pose" aussi ces questions : "qui joue quel rôle? quel rôle fait-on jouer au réel"? et fait s'incaner des personnages qui en voulant se réfugier dans une posture imaginaire butent d'autant plus sur le réel et s'exposent.

"Cluse-Up" est apparemment très réflexif et centré sur le cinéma, mais c'est sans doute le premier film à montrer un procès en Iran. D'ailleurs avec un grain d'image spécifique qui le détache du reste du réci. Aszez ironiquement il montre une situation où l'ordre religieux fait preuve d'une mansuétude qui pourrait être un argument pour le défendre, mais par rapport à une siotuationque le monde profane vit déjà comme un mensonge et une impasse: l'humanisme du juge est inutile, il n'a personne à punir et à juger, il ne fait que commenter la dialectique de la situation réelle, la seule chose qui contredit et limite le manichéisme du système théocratique est une fiction qui s'est déjà démasquée elle-même.

En 1990, Khomeini venait de mourir après avoir lancé une fatwa contre Salman Rushdie (cela faisait publier les exécutions qui avaient eu lieu dans les prisons l'année d'avant). Les premiers mois du mandat Rafsandjani ont l'air d'avoir correspondu à une brêve phase d'ouverture qui a permi ce film,, dans le triste balancier geo-politique qui fait alterner tous les 5 ans les périodes de verrouillage et de réforme à l'intérieur de la société iranienne, tout comme se succèdent ostracisation et alliances opportunistes de la part de l'extérieur.


Je n'avais pas conscience qu'il y avait 20 ans de différence entre Kiarostami et Panahi, je pensais qu'ils étaient de la même génération.


Dernière édition par Gontrand le 18 Mai 2016, 18:15, édité 2 fois.

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MessagePosté: 18 Mai 2016, 17:12 
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Schtroumpf sodomite
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Gontrand a écrit:
(en cela c'est l'inverse du néo-réalisme italien, qui même chez Pasolini et chez Moretti essaye de cerner ce qui serait l'idéologie et la conscience "moyennes" de la bourgeosie progessiste).


Là je vois pas trop de quoi tu parles. Le néo-réalisme ? T'as des exemples ?

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MessagePosté: 18 Mai 2016, 17:26 
Pasolini, Ferreri et Moretti ne sont pas néo-réalistes, mais ils conservent néanmoins l'ambition de faire des films qui sont des synthèses du moment historique et culturel présent, qu'il y a déjà chez Rosselini et Visconti.

"Païsa" est une sorte de film-somme sur la libération de l'Italie, comme "l'Orestie africaine" essaye de dégager (via l'analogie quelque peu forcée avec un mythe grec ) un sens univoque des décolonisations africaines. "Salo" vise carrément à produire un conscience commune (en essayant d'être lui-même LE traumatisme collectif le plus marquant de l'époque) de l'aliénation et de la "fausse" libération des moeurs. Chez Moretti "je suis un Autarcique" est un résumé de la crise politique (vis-à-vis du gauchisme) et esthétique (vis-à-vis du néo-réaliste) et de la génération de 1980, toutes les attitudes posisbles sont représentées dans le film, comme souvent chez Moretti (mais cette ventilation des points de vue est aussi présente plus tôt dans les films d'Antonioni, même si elle est ramassée sur le personnage central)". "La Tragédie d'un Homme Ridicule" est d'ailleurs le point de vue en miroir de "Je suis un Autarcique", depuis la génération qui précède le gauchisme sur celle qui lui succède.

Chez Petri, "la Classe Ouvrière s'en va au Paradis" illustre en fait un rapport de production abstrait (l'usine est la métaphore de toutes les usines). Même Bellochio fait des films de plus en plus massivement historiques (et tournés vers le passé) au fur et à mesure qu'il vieillit (le meurtre d'Aldo Moro, la jeunesse refoulée de Mussolini). Dans une Journée Particulière il n'y a plus personne entre la ménagère et le proscrit, la famille part au début du film et revient après le drame, la confrontation historique est stylisée et directe. Mastroaianni incarne tous les homosexuels et Sophia Loren toutes les ménagères (finalement le mari monstreux et les enfants sont les seuls à avoir une vie singulière).
Ce sont des films qui ont l'ambition de décrire de façon objective la situation esthétique et politique qui leur est contemporaine.
"la Cosa" de Moretti est un bel exemple: il se réfère au PCI comme à une transcendance (plus paternelle que divine d'ailleurs) perdue (Moretti filme la mort du PC et les réunions comme Wenders filmait celle de Nicholas Ray).

Cette ambition d'atteindre l'objectivité en sachant qu'on buttera, tôt ou tard, sur un point aveugle, représente d'ailleurs une force énorme et incomparable, propre au cinéma italien. Il butte sur ce problème: impossible de mettre en oeuvre une vraie conscience politique sans du même coup sortir de la vie (le cinéma est d'abord le substitut de la révolution, puis chez Moretti, de la filiation), et cela dans de films aussi différents que "Partner" et "Nous nous sommes tant aimés", voire même dans Païsa (dans le delta du Po, les partisans et soldats américains créent une société cosmopolite égalitaire, combattante et idéale, une utopie réalisée et orientée par un sens manifeste et réfléchi, mais sont à la fois victorieux et massacrés, sans témoignage possible de ce qu'ils ont réussi).

Le cinéma iranien, parce qu'il part d'une société policièrement verrouillée, part d'une esthétique et de problèmes proches du néo-réalisme, mais a plus de mal à faire des films où tous les points de vues sont représentés et épuisés (même si "Ten" et "Taxi" s'y essayent, en recourant d'ailleurs au même espace d'un habitacle de petite voiture)


Dernière édition par Gontrand le 18 Mai 2016, 18:13, édité 9 fois.

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MessagePosté: 18 Mai 2016, 17:48 
C'est d'ailleurs ce qui se passe dans "Copie Conforme": le couple épuise tous les scénarios possibles du couple, navigue entre la rencontre et la rupture, mais reste toujours "le même" couple, la succession brutale des attitudes et des situations n'introduit finalement rien de neuf, ne permet pas de changer de "sujet" dans tous les sens du terme, ne change rien à une sorte d'emprisonnement dans le solipsisme (le film reprend d'ailleurs une situation du néo-réalisme, que l'on retouve dans "Voyage en Italie" ou dans les films d'Antonioni, mais est "coincé", au bout du voyage il n'y a ni renaissance ni disparition, juste la fin d'un discours, qui n'est d'ailleurs pas non plus situé par rapport à une origine). Chez Antonioni au contraire de Kiarostami le sujet n'est pas censé survivre à son discours (mais en retour le cinéma adopte le point de vue d'une sorte de trasnedance qui diagnostique et compense son pessimisme, sa fragilitée peut être comblée par un discours qui le vivifierait en le regardant, mais qui ne peut être que le discours du réel, produisant de l'extérieur le film). Chez Antonioni, j'ai l'imrpession que c'est Dieu qui regarde la bourse et les avions de d'Eclipse, ou les affiches du MSI et le village futuriste abandonné de l'Aventurra? Chez Kiarostami et Panahi cette production du regard est interne au film (ils sont sans doute plus athées qu'Antonioni).


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MessagePosté: 24 Mai 2016, 23:40 
En passant.

Lohmann a écrit:
Mohsen Makhmalbaf y est également pour beaucoup, époustouflant de sincérité dans le rôle de l'usurpateur de sa propre identité [...]


Pas du tout.

L'usurpateur (Hossain Sabzian) est joué par lui-même, et Makhmalbaf est joué par Makhmalbaf.


Dernière édition par Jerzy Pericolosospore le 24 Mai 2016, 23:48, édité 1 fois.

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MessagePosté: 24 Mai 2016, 23:47 
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Jerzy, comment vas tu?

PS Ne pas voir de moquerie ou de second degré.


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MessagePosté: 24 Mai 2016, 23:49 
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En tout cas, c'est un film qui t'abbas.

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MessagePosté: 24 Mai 2016, 23:50 
Salut Abyssin.

Toujours sur la brèche?

J'ai aimé te lire sur dark souls 3. J'ai presque eu envie de m'acheter une ps4. Sans moquerie.


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MessagePosté: 25 Mai 2016, 00:49 
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Jerzy Pericolosospore a écrit:
Salut Abyssin.

Toujours sur la brèche?

J'ai aimé te lire sur dark souls 3. J'ai presque eu envie de m'acheter une ps4. Sans moquerie.


Je commentais sur ce jeu avec passion au premier degré et j'adore. Tiens je me suis fais RE4 en janvier, quel chef d'oeuvre!


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MessagePosté: 25 Mai 2016, 01:01 
J'ai fait acheter ds3 à mon neveu (12 ans), qui lui a une ps4. En lui disant: "tu seras un vrai gamer si tu le finis, celui-là". Il relève le défi pour l'instant. ça le change de ses call of duty, mais je sens qu'y va se lasser assez vite, lol.

Ah RE4, je l'ai refait pour la 6è fois. Terminé The last of us la semaine dernière. Sublime graphiquement, mais m'a un petit peu déçu en tant que jeu.


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MessagePosté: 25 Mai 2016, 04:43 
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Messages: 3455
Jerzy Pericolosospore a écrit:
Salut Abyssin.

Toujours sur la brèche?

J'ai aimé te lire sur dark souls 3. J'ai presque eu envie de m'acheter une ps4. Sans moquerie.


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MessagePosté: 25 Mai 2016, 10:39 
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J'ai fait un peu de nettoyage. Je n'ai rien contre les insultes et règlements de compte en public (même si quand on commence à citer les noms, ça devient tendu), mais que ça concerne un minimum le sujet quand même.
Merci de revenir à Abbas.


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