Forum de FilmDeCulte

À Téhéran, dans un centre de détention et de réhabilitation pour mineurs, des adolescentes détenues pour crimes et délits, voient leur vie s’écouler ou gré des rires, des chants et de la mélancolie. L’ennui de leur vie et la peur de ce qui les attends dehors, rythment leur quotidien. Le cinéaste Mehrdad Oskouei, filme avec une grand proximité et beaucoup d’empathie, l’atmosphère et l’humeur de ces jeunes filles désabusées.

A voir la filmographie d'Oskouei, on comprend qu'il attache une attention toute particulière aux marginaux de la société iranienne, plus particulièrement à sa frange juvénile, féminine pour ce film co-récépendiaire (avec Fuocoammare de Rosi) du prix Amnesty à la Berlinale 2016. Adolescentes aux vies presque déjà totalement ruinées, mariées à 12 ans, mères à 14 ou 15, droguées, violées par un membre de la famille, ce qui frappe tout d'abord c'est la dureté des parcours de la vingtaine de jeunes filles qui sont incarcérées dans ce centre au moment du tournage. A l'une à laquelle le réalisateur demande quel est ton rêve, elle n'aura d'autre réponse que "mourir". Sombre et irrémédiable. Mais ce qui fait la plus grande force de ce film, c'est qu'Oskouei ne cherche ni à nous apitoyer sur leur sort, ni à les juger pour les crimes qu'elles ont pu commettre. A l'inverse, sa caméra sert avant tout de catharsis permettant à ces adolescentes de nous révéler (et parfois peut être même de se révéler à elle-même) leur nature profonde, cachée derrière le masque de dureté qu'elles se sont forgés pour résister au milieu hostile qui est le leur. Le film n'est pas exempt d'un certain schématisme (le rythme des sorties du centre de détention ou les coups de téléphones à leurs proches), mais réussie néanmoins pleinement à nous faire ressentir le havre de paix que représente ce centre pour elle (en cela l'exact l'opposé du centre psychiatrique du Manuel de libération de Kuznetsov dont les deux protagonistes principales essaies de s'extraire, alors qu'ici certaines ne veulent plus quitter le centre de détention de peur de ce qui les attend au dehors).

4/6

Merci pour ce message. Cela a l'air intéressant, assez wisemanien.
Cela me fait penser qu'il y a quand-même une tradition iranienne de ce type de documentaire, sur des lieux d'internement qui se retournent, par la force des sujets enfermés qui ne s'y laissent pas réduire, mais n'ont pas non plus d'autre ancrage, en univers ouverts, notamment "la Maison est Noire" de l'écrivaine Forough Farrokhzad dans les années 60, sur une léproserie (l'angle à la fois littéraire, enre poésie cosmologique et politique, rappelle "l'Ordre" de Pollet). C'est peut-être alors le cinéma iranien qui était en avance sur le monde, justement en voulant témoigner d'une situation de retard politique (la poésie n'est alors pas du jargon, mais tient dans le fait de rendre tant qu'on le peut la critique d'une situation tout aussi singulière que le négatif qu'elle affronte, pour parler de manière péteusement adornienne).