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 Sujet du message: A la folie (Wang Bing - 2013)
MessagePosté: 09 Sep 2013, 12:56 
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Successful superfucker
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Parfois, l'orgie des festoches de cinéma a du bon. Comme de pouvoir découvrir ce genre de films inexploitables sous cette forme ou qu'on aurait tout simplement pas envie de voir de son propre chef, immersion de quatre heures dans un étage d'un asile de fous d'une province chinoise, qui aura du mal à sortir en salles ou qui finira diffusée sur arte dans une version miniature (52 minutes contre une version de deux heures trente pour Trois soeurs, pourtant bordée de prix) et qu'on découvre sous la contrainte, comme si on se forçait à subir la durée du film, alors que sorti de la salle ce degré d'attention serait difficilement possible. Wang Bing, interné avec les fous (parfois, on sent qu'il a été réveillé au milieu de la nuit par un des détenus et allume sa caméra), court à leur suite ou les filme dans leurs chambres , ramassis de lits de fortune et de bassines où ils pissent, et dans le couloir grillagé de l'étage, où on aperçoit en contrebas une cour rectangulaire où sont parquées les filles, qui leur crient parfois de venir les baiser, sans succès. On ne connaîtra des détenus que leurs noms (parfois inconnus) et le nombre d'années depuis lesquelles ils sont enfermés, souvent dix, quinze ans, sans aucune amélioration visible. Un se met à hurler pour tuer des moustiques, un autre passe sa vie à se déshabiller et à évoluer nu par pur exhibitionnisme, un autre reçoit régulièrement la visite de sa femme et la supplie de le laisser revenir au foyer familial et on sent que celle-ci fait tout pour le laisser croupir dans sa jaule. Un autre reçoit une autorisation de sortie et rend visite à sa famille, pas plus emballée par son retour, et le laissant à son désarroi existentiel avec comme seule échappatoire de courir loin, sans but. L'enfermement n'est plus limité à une réalité physique, elle l'est également dans la réalité de leur abandon, de sentir que plus personne ne les attend et qu'on les laisse avec leur folie comme seule compagnon, dans un dépotoir d'usure mentale sourde où augmente chaque jour leurs troubles obsessionnels. A la fin du film, on apprend par des cartons succincts qu'il n'y a aucun tri parmi les malades, excepté la séparation entre hommes et femmes, que des meurtriers côtoient des gens qui ont sombré un jour dans la dépression et ont juste lâché prise. Un grand documentaire bouleversant de pathétisme ordinaire, bien au-delà de la démence.
5/6


Dernière édition par DPSR le 02 Juin 2016, 12:47, édité 5 fois.

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MessagePosté: 09 Sep 2013, 12:58 
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Antichrist
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Un des meilleurs réals au monde.


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MessagePosté: 09 Sep 2013, 13:09 
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wow, texte impressionnant


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MessagePosté: 09 Sep 2013, 16:12 
Karloff a écrit:
Un des meilleurs réals au monde.


Complètement d'accord. J'ai vu le Fossé et Fengming, se sont de vraies claques!


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MessagePosté: 30 Nov 2013, 01:56 
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Successful superfucker
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AP ce dimanche en présence de Wang Bing aux 3 Luxembourg dans le cadre de la reprise du palmarès du festival des 3 continents


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MessagePosté: 24 Juil 2016, 09:36 
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Antichrist
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Mostra de Venise 2014 - Quelle claque... Une plongée dans l'enfer carcérale d'un hôpital psy chinois. Sauf que c'est l'anti-Vol au-dessus d'un nid de coucou, mais un film d'une humanité renversante, où les "fous" sont observés avec une tendresse infinie. C'est un peu long - il aurait pu enlever le prisonnier avec sa femme horrible - mais des plans me restent en mémoire : la course torse nue dans la coursive, l'étreinte dans le clair obscur, l'étreinte finale, "meurs, meurs, meurs", et cet homme qui marche, qui aurait fait une fin parfaite - plan prodigieux qui synthétise l'histoire de la Chine contemporaine et du cinéma moderne.

6/6


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MessagePosté: 23 Nov 2020, 13:36 
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Je craignais un peu la durée de ce documentaire fleuve, d'autant que les précédents films de Wang Bing que j'ai pu voir ne brillaient pas par leur dynamisme (souvenir tenace de son Ta'ang par exemple où j'avais lutté pour ne pas m'endormir, ou de la première partie des Âmes mortes qui ne m'avait pas engagé à poursuivre plus loin, malgré son intérêt historique). Crainte qui s'est rapidement estompée avec A la folie, tant ce qui nous y est montré est absolument fascinant. Fascination pour cet univers à mi-chemin entre le carcéral et le psychiatrique, qui grouille d'une faune enfermée au deuxième étage d'un hôpital/prison aux coursives elles-mêmes grillagées, où la promiscuité est maximale (cette scène où 3 malades/détenus essaient de dormir dans le même lit :shock: ) et les règles sanitaires au plus bas (le film est un véritable flot d'urine ininterrompu, il y a pourtant un sanitaire disponible à l'étage mais les mecs passent leur temps à pisser dans des bassines au pied de leur lit, directement dans le couloir voir contre les murs de leur chambre). Fascination pour ses hommes surtout, auxquels Wang Bing redonne cette humanité perdue au moment de leur internement, où l’on découvre dans de longues séquences leur particularisme (certains comme « Le Muet » lourdement handicapés mentaux, d’autres beaucoup plus cohérents), avec une attention que ne semble pas partager le personnel soignant, hormis lorsqu’il s’agit d’administrer un traitement de choc aux plus récalcitrants. Un cauchemar de 3h47 que l'on traverse avec une étonnante facilité, et qui marque durablement.

Karloff a écrit:
il aurait pu enlever le prisonnier avec sa femme horrible.

Impossible, c'est le vrai fil rouge du film (ce sont les seuls à être les protagonistes principaux de plusieurs séquences), et la seule confrontation entre l'intérieur et l'extérieur de cette hôpital (hormis la courte séquence sur celui qui sort - temporairement?). Je ne la trouve d'ailleurs pas si horrible cette femme, elle semble être la seule à rendre régulièrement visite à son mari, lui apporte des affaires propres, et je la trouve très généreuse dans la séquence de distribution des clémentines, preuve qu'elle a pleinement conscience du dénuement des autres malades, et le moment où son mari lui en propose finalement une, ce à quoi elle lui répond qu'elle se demandait si il allait jamais lui proposer, et l'un des moments les plus précieux du film.

Karloff a écrit:
Un des meilleurs réals au monde.

Je reconnais les qualités du travail de Wang Bing, ses prises de risque, son abnégation, son humilité. Mais je n'arrive pas pour autant à avoir une telle considération sur ses qualités de metteur en scène. Je lui préfère largement Wiseman, qui transcende la qualité des images bruts par la précision de son montage. Le cinéma de Wang Bing au contraire, sa qualité première me semble être celle de ses sujets.


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MessagePosté: 23 Nov 2020, 14:23 
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Je suis un peu ambivalent sur la gestion de la durée et du montage par Wang Bing sur ce film.
D'un coté j'ai un peu de mal avec pas mal de séquences répétitives et allongées au maximum, ça me parait être une faiblesse dans une oeuvre d'art de ne pas choisir, de l'autre coté il me semble aussi que la puissance de son cinéma vient de là, l'effet d'accumulation, et les temps faibles qui "immergent" le spectateur dans un univers incomfortable, bref c'est assez fort mais en même temps un peu sadique.

Quant à la femme c'est le pire perso, parce que comme je l'ai compris c'est bien elle qui insite pour qu'il reste là non? On a l'impression qu'elle pourrait le faire sortir si elle voulait, d'où le sentiment d'immense hypocrisie vu que le prisonnier ne semble absolument pas être un danger mais se voit écarté de la société et ne peut même plus voir son enfant, bref l'une des meilleures scènes du film, effectivement la seule qui donne un peu une idée de pourquoi ces gens sont-ils enfermés là. (mais encore une fois c'est partiel, la situation n'est pas assez explicitée).


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MessagePosté: 23 Nov 2020, 14:26 
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Chef-d'oeuvre ce film. J'adore Wang Bing, son univers d'une Chine au bord du gouffre, presque littéralement post apocalyptique. Vu en salles il y a quelques années, l'inédit L'homme sans nom, un doc sur un clochard qui vit dans une grotte. C'est immense. Mais il m'en reste pas mal à rattraper dont Le Fossé et Fengming.

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CroqAnimement votre


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MessagePosté: 23 Nov 2020, 14:34 
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Ca a un intérêt si on n'aime déjà pas l'original de Diane Kurys ?

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Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)


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MessagePosté: 23 Nov 2020, 14:39 
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Art Core a écrit:
Mais il m'en reste pas mal à rattraper dont Le Fossé et Fengming.

Ces deux là et A L'Ouest des rails pour moi.


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MessagePosté: 23 Nov 2020, 14:42 
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Azazello a écrit:
Quant à la femme c'est le pire perso, parce que comme je l'ai compris c'est bien elle qui insite pour qu'il reste là non?

Oui, comme pour la majeure partie des autres résidents, que leur famille ne vient pas voir. Au jeu du pire je la trouve moins détestable que la mère qui vient chercher son fils pour sa permission de 10 jours, mais qui lui fait clairement comprendre qu'il a toutes les chances d'y retourner.


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MessagePosté: 23 Nov 2020, 14:48 
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Oui c'est un peu, par défaut, le personne symbole de l'ignominie (supposée) des familles, vu que c'est la seule qu'on voit, ou presque.


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MessagePosté: 23 Nov 2020, 15:05 
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Sur la réalisation, je trouve qu'il est incroyable. La caméra semble toujours bien placée, les plans sont souvent extrêmement composés et je suppose qu'il fait ça avec des moyens totalement limités.


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