Je sors tout juste de la projection de ce film et je rebondis sur vos propos ! Au départ j'ai été gênée par le premier voeu de Alithea, comme vous visiblement, parce qu'il a débarqué comme un chien dans un jeu de quilles, ça faisait encore plus forcé que la romance entre Bruce et Selina dans The Batman et pourtant le niveau était dur à égaler.
Mais j'ai aussi trouvé que la suite du scénario atténuait ça, justement parce qu'à partir de là le film devient "moche" (comme l'a relevé Art Core d'ailleurs), et je pense pas que ça soit dû au hasard. C'est un conte sur l'imaginaire, sur les histoires qu'on raconte, mais aussi les histoires qu'on se raconte à soi-même, les regrets et les remords qu'on transforme en récits voire en choix de vie. C'est aussi un conte sur les désirs, latents ou assouvis, et notamment ceux qu'on ne peut pas forcer, même avec les pouvoirs magiques d'un djinn. L'histoire d'amour qui n'en était pas une, c'est celle d'un premier vœu égoïste (j'y ai vu un peu le reflet, en miroir, de l'histoire entre le djinn et Zefir) qui, si on y regarde d'assez près, n'est pas très différent des vœux des 3 autres femmes, qui chacune a utilisé le djinn pour son intérêt personnel en n'écoutant ni ses suppliques ni son malheur. Mais après tout, est-ce que ce n'est pas ce qu'on attend d'un djinn ? Il ne demande que ce que le cœur désire, pourquoi faudrait-il faire entrer en ligne de compte les désirs d'un autre ?
Et cette question-là est, à mon sens, traitée dans la dernière partie du film, Londres donc, où on voit se dérouler les conséquences de ce premier vœu. J'ai trouvé que quitter la féérie orientale (cliché ou pas cliché, chacun se fera son avis) pour la grisaille britannique avait du sens au vu du choix fait par Alithea dans la chambre d'hôtel. C'est une histoire sur les limites du désir et ce qu'on peut raisonnablement demander à l'autre, aussi. De son côté, est-ce que le djinn avait vraiment le choix ? Il est dépendant d'Alithéa et de sa bonne volonté pour se libérer. Est-ce qu'on est vraiment face à une histoire d'amour ? Est-ce qu'il revient la voir de temps à autres par amour, ou par gratitude d'avoir été libéré et de sa bouteille, et de ce faux-semblant de romance ? On peut faire remarquer que toutes les histoires racontées dans ce film ne sont pas des histoires d'amour au sens romantique du terme, et toutes font écho à l'histoire finale entre le djinn et Alithéa : la première abandonne son supposé alter ego dès la première flatterie (en même temps matez-moi ce doigté musical
), la seconde ensorcelle l'homme qu'elle aime pour qu'il l'aime en retour et la troisième se sent prise au piège dans une histoire qu'elle n'a pas choisie, alors que ses désirs (de savoir, de génie) sont ailleurs.
Ca reste imparfait, certaines scènes m'ont enquiquinée plus qu'autre chose, notamment celle avec les deux voisines. Soit c'est trop littéral, soit ça l'est pas assez, mais c'est nul. Elba déguisé en clochard céleste, pas trop saisi non plus. Mais je pardonne au film ses faiblesses, parce que c'est du sucre pour les yeux et les oreilles et que j'ai vraiment adoré l'histoire dans sa généralité. Je m'interroge encore, comme quelqu'un plus haut, sur la possible erreur de casting avec Swinton. Je l'adore, mais dans ce film-là y'a un truc qui me gêne, je sais pas quoi.
5/6 à chaud.