Noony a écrit:
Bon allez, va faire un tour sur le line up de Wild Bunch pour te rendre compte du n'importe quoi que tu raconte...
Certes, je me suis emporté parce qu'ils cherchaient à prendre la défense de Weinstein... Notamment en évoquant
House of Flying Daggers qui est tout de même plus regardable que l'immonde
Hero. Ensuite, ils expliquent leur initiative de rendre les auteurs plus "bankables", l'exemple de Jarmusch à l'appui. Ce qui est très honorable en soi, mais en même temps cela peut être vicieux, car cela contraint les auteurs à faire des films plus accessibles. Je ne dis pas forcément que le résultat sera moins intéressant : ça a justement très bien marché pour Almodovar par exemple, qui a su s'exprimer au plus grand nombre sans perdre son identité et sa singularité... Mais les auteurs qui sont vraiment en marge, incapables d'être consensuels, risquent d'être un peu emmerdés. Je les imagine bien dire à Abel Ferrara : "fais-nous un
King of New York 2, mais laisse tomber tes expérimentations à la
New Rose Hotel".
Alors oui, je ne nie pas leur passion, leur sincérité et je comprends en même temps leur désir d'être prudent. Ils veulent soutenir les grands cinéastes et ne pas produire de la merde à la chaîne. Mais quelque part, je les sens un peu trop préoccupés par le business (ce qui est normal vu leur métier après tout....)
Enfin, le cas de Gaspar Noé est une exception.
Irréversible est au contraire plus accessible qu'on ne le croit. Ses partis-pris filmiques et esthétiques sont très clairs (parce que justement démonstratifs) et ne perdent pas le spectateur. Le public est prêt à accepter la violence, pas les films exigeants.
Concernant
La saveur de la pastèque, je me demande si l'idée d'inclure des délirants numéros musicaux ainsi que des scènes de cul iconoclastes cachait justement une stratégie commerciale pour s'éloigner du ton austère et contemplatif de ses films précédents, juste pour atteindre un plus large public (d'ailleurs, la promo, la bande-annonce et l'affiche se focalisaient sur ça) C'est sûr que c'est bien plus vendeur que
La Rivière ou
Vive l'amour ! Alors oui, ça reste un excellent film, et ça a permis à Tsai Ming-Liang de se réinventer, mais je me pose quand même la question d'une telle démarche, appliquée à d'autres auteurs.
Enfin, oui, je suis énervé quand ils déclarent tout de go que Richard Kelly a fait n'importe quoi. ("on attend le nouveau montage", disent-ils en rigolant). Voilà l'exemple parfait de ce que je désapprouve chez eux : "parce que le film est inaccessible pour 90% des spectateurs, il est mauvais."
Pour finir, j'évoquerai la comparaison
Tideland /
Frères Grimm. L'un est un Gilliam pur jus et dérangeant, totalement libre et radical, allant jusqu'au bout de ses audaces, quitte à perdre une partie de son public... L'autre est un Gilliam gentillet, contrôlé par Weinstein, plus facile à regarder, plus divertissant. Le deuxième fera évidemment 100 000 fois plus d'entrées que le premier.... Mais à mes yeux, c'est
Tideland que j'aurai envie d'aimer et de défendre jusqu'au bout, même si c'est un film invendable.