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 Sujet du message: Rouge (Farid Bentoumi, 2020)
MessagePosté: 14 Aoû 2021, 20:22 
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Nour, infirmière en hôpital, est confrontée au décès d'une patiente âgée et soupçonnée de négligence professionnelle. Son père, Slimane, pour lui permettre de rebondir, lui arrange un nouveau poste d'infirmière de la médecine travail dans une usine d'aluminium située dans les Alpes ("Arkalu") , dont il est le principal et populaire délégué syndical.
L'usine est vieillissante et en perpétuelle restructuration.
Nour s'aperçoit que les plus âgés parmi les ouvriers sont gravement malades, mais tout le monde, à commencer par son père, lui demande d'étouffer le problème. Arrive une journaliste d'un media du type Socialter...


On est dans le film social à la Lucas Belvaux (les Dardenne sont producteurs), avec les mêmes mérites et les mêmes faiblesses. Le film fait allusion aux affaires des boues rouges de Gardanne et Kretinsky (industriel actif à la fois dans le rachat des industries menacées et la dépollution d'anciens sites, et par ailleurs propriétaire de médias, dont certains orientent fortement l'opinion française, comme Marianne).Le début est très bon, les lieux existent vraiment, le montage est vif. La sobriété technique est comme une manière de refuser le cynisme d'une série comme le Baron Noir, tout en en partageant l'amertume et le pessimisme politique. Malheureusement, le film distingue trop nettement l'exposition des personnages et celle du problème écologique, comme si les premiers étaient structurels et les seconds relevaient quant à eux d'un suspense, d'un grain de sable grippant la machine. La mise en scène, le cadre et la lumière sont soignés, mais l'écriture articule ces deux aspects de manière paresseuse, au point que les personnages deviennent rapidement des plus schématiques. Le personnage de Zita Henrot (qui joue par ailleurs bien) possède une ambiguïté potentielle (filiation avec le père mais rancoeur possible sur la mort de la mère, purisme moral qui s'appuie sur une faute passée, apparemment pardonnée, mais sur laquelle elle ne revient jamais d'elle meme) qui aurait méritée d'être étoffée. Elle reproduit aussi sur elle les blessures qu'elle a vue infligées à autrui, mais ce masochisme n'est pas un enjeu psychologique pour le film : elle est délaissée par le film dès qu'elle est blessée (cela revient indirectement à mettre sur le même plan blessure physique et défaite politique dans un combat minoritaire, et pourquoi pas. Et pourtant ses blessures "médiatisent" le problème écologique réel. Cela pourrait être très intéressant, mais le film n'en fait rien). Celui du père, joué par Samy Bouajila est encore plus monolithique, au point que son sursaut moral apparaisse parfaitement imotivé. Il lui tient lieu d'appartenance sociale. Le film essaye de couvrir ce défaut d'écriture maladroitement, de l'intérieur de la fiction (Gourmet qui dit au père vous ne connaissez pas votre fille mais cela clôture justement la scène et fait disparaître le personnage, qui n'existe que pour prononcer
cette phrase).
Dommage, car l'angle de départ dans la première demi-heure (le serieux technique comme refus indirect du cynisme de la télé quand elle fait de la fiction socilogique tout en en reprenant la mélancolie la conscience qu'ont les personnages d'être des caractères. La faute morale de Nour qui lui confère une inexplicable passivité au sein d'une lutte contre tout un système) n'était pas mauvais. Les problèmes écologiques et sociaux, et la manière dont ils sont intriqués sont aussi bien cernés (les ouvriers dans le déni total, la direction apparemment brutale, mais avec l'arrière-pensée que le problème écologique favorise à la fois la liquidation de l'industrie et les subventions pour son adaptation à des normes), l'intérview de Farid Bentoumi dans Positif est intéressante à cet égard (ironiquement XXI a sorti il y a quelques mois un bon reportage sur Gardanne, comparable à celui qu'écrit le personnage de Céline Sallette, il est vrai que le film était déjà tourné et en attente de sortir).

_________________
Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman


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MessagePosté: 25 Aoû 2021, 13:20 
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Il y a quand-même une très bonne scène du film qui reste
Celle du téléphone avec Obama. Elle est politiquement pas bête, et determine de manière
assez opaque finalement l'opposition entre le père et la fille (le malentendu de l'une qui perçoit comme aisance et prise en compte d'autrui ce qui est en fait une forme de nihilisme pour l'autre)

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman


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MessagePosté: 12 Sep 2021, 07:05 
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Vieux-Gontrand a écrit:
Nour, infirmière en hôpital, est confrontée au décès d'une patiente âgée et soupçonnée de négligence professionnelle. Son père, Slimane, pour lui permettre de rebondir, lui arrange un nouveau poste d'infirmière de la médecine travail dans une usine d'aluminium située dans les Alpes ("Arkalu") , dont il est le principal et populaire délégué syndical.
L'usine est vieillissante et en perpétuelle restructuration.
Nour s'aperçoit que les plus âgés parmi les ouvriers sont gravement malades, mais tout le monde, à commencer par son père, lui demande d'étouffer le problème. Arrive une journaliste d'un media du type Socialter...


On est dans le film social à la Lucas Belvaux (les Dardenne sont producteurs), avec les mêmes mérites et les mêmes faiblesses. Le film fait allusion aux affaires des robes rouges de Gardanne et Kretinsky (industriel actif à la fois dans le rachat des industries menacées et la dépollution d'anciens sites, et par ailleurs propriétaire de médias, dont certains orientent fortement l'opinion française, comme Marianne).Le début est très bon, les lieux existent vraiment, le montage est vif. La sobriété technique est comme une manière de refuser le cynisme d'une série comme le Baron Noir, tout en en partageant l'amertume et le pessimisme politique. Malheureusement, le film distingue trop nettement l'exposition des personnages et celle du problème écologique, comme si les premiers étaient structurels et les seconds relevaient quant à eux d'un suspense, d'un grain de sable grippant la machine. La mise en scène, le cadre et la lumière sont soignés, mais l'écriture articule ces deux aspects de manière paresseuse, au point que les personnages deviennent rapidement des plus schématiques. Le personnage de Zita Henrot (qui joue par ailleurs bien) possède une ambiguïté potentielle (filiation avec le père mais rancoeur possible sur la mort de la mère, purisme moral qui s'appuie sur une faute passée, apparemment pardonnée, mais sur laquelle elle ne revient jamais d'elle meme) qui aurait méritée d'être étoffée. Elle reproduit aussi sur elle les blessures qu'elle a vue infligées à autrui, mais ce masochisme n'est pas un enjeu psychologique pour le film : elle est délaissée par le film dès qu'elle est blessée (cela revient indirectement à mettre sur le même plan blessure physique et défaite politique dans un combat minoritaire, et pourquoi pas. Et pourtant ses blessures "médiatisent" le problème écologique réel. Cela pourrait être très intéressant, mais le film n'en fait rien). Celui du père, joué par Samy Bouajila est encore plus monolithique, au point que son sursaut moral apparaisse parfaitement imotivé. Il lui tient lieu d'appartenance sociale. Le film essaye de couvrir ce défaut d'écriture maladroitement, de l'intérieur de la fiction (Gourmet qui dit au père vous ne connaissez pas votre fille mais cela clôture justement la scène et fait disparaître le personnage, qui n'existe que pour prononcer
cette phrase).
Dommage, car l'angle de départ dans la première demi-heure (le serieux technique comme refus indirect du cynisme de la télé quand elle fait de la fiction socilogique tout en en reprenant la mélancolie la conscience qu'ont les personnages d'être des caractères. La faute morale de Nour qui lui confère une inexplicable passivité au sein d'une lutte contre tout un système) n'était pas mauvais. Les problèmes écologiques et sociaux, et la manière dont ils sont intriqués sont aussi bien cernés (les ouvriers dans le déni total, la direction apparemment brutale, mais avec l'arrière-pensée que le problème écologique favorise à la fois la liquidation de l'industrie et les subventions pour son adaptation à des normes), l'intérview de Farid Bentoumi dans Positif est intéressante à cet égard (ironiquement XXI a sorti il y a quelques mois un bon reportage sur Gardanne, comparable à celui qu'écrit le personnage de Céline Sallette, il est vrai que le film était déjà tourné et en attente de sortir).


Merci pour cette critique complète et constructive.
Une amie me la conseillée je vous ferrais un retour quand je l'aurais vu :)


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MessagePosté: 12 Sep 2021, 10:05 
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Inscription: 27 Déc 2018, 23:08
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Merci. Votre pseudo fait-il allusion à votre code postal dans la region nantaise ou à votre salaire annuel ? Dans le second cas je peux écrire une autre critique plus étoffée et subtile sur le film si vous le desirez.

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Erving Goffman


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