Forum de FilmDeCulte

Les vacances d’été. Sardaigne, Italie. Un (road) trip en famille. Claudine, bientôt 11 ans, raconte leurs aventures au fur et à mesure. Quand Raoul, son frère de 3 ans, ne l’en empêche pas.

Je m'étais empressé de pester de voir le dernier Letourneur programmé "uniquement" à l'ACID, force est de constater qu'en tout cas il pouvait difficilement prétendre à être en compétition officielle, tant il me semble encore plus mal aimable que son précédent, basé sur un schéma unique répété ad nauseam sur 1h45. Sur la longueur cette structure produit avant tout de l'ennui (en tout cas chez moi), quand bien même elle permet ça et là des petits effets de perte de repère assez finement montés (souvenir d'un moment où Letourneur dit "le verre va tomber", et on ne sait plus si c'est dans le temps présent de l'action ou si c'est une référence à un acte passé). Le problème, c'est que ce qui était intelligemment utilisé dans Voyages en Italie (l'écoute des enregistrements effectués pendant les vacances, dont on sait qu'ils sont la matrice même de tous les films de Letourneur) et venait redoubler le thème de la mise en scène de soi qui parcourait le film (lorsque le couple réécoutait ces enregistrements une fois rentré à Paris, ils n'agissaient pas uniquement comme mémoire de ces vacances mais aussi comme une matière pour les revisiter et les sublimer), devient ici le cœur même du récit. En découle un film beaucoup trop théorique, où l'on passe avant tout son temps à se remémorer ce qui n'est pas mémorable, les seuls fait saillants étant circonscrits aux cacas intempestifs du petit Raoul à la plage, sous la table etc. On saisit assez rapidement la visée, les vacances en famille (d'autant plus avec de jeunes enfants) c'est épuisant et pas vraiment folichon, encore plus quand le couple commence à sérieusement battre de l'aile. Les enregistrements servent alors autant à préparer un futur film qu'à ressouder un clan dont les individualités ne sont pas du tout au diapason (Letourneur les cadre d'ailleurs souvent séparément). L'ennui communiqué aux spectateurs est donc l'équivalent de ce que cette famille a vécu pendant son séjour en Sardaigne, quand bien même l'ainée exprime avoir passé d'excellentes vacances une fois celle-ci terminée. Que le résultat final soit en adéquation avec le but initial de Letourneur je n'en doute pas, n'empêche que pour faire passer ces 1h45 j'ai préféré me remémorer la polissonnerie de son précédent. Sophie, reviens nous avec une vraie comédie.

On m'a dit que son prochain était un gros machin.

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I think we're gonna need a helmet.

Pas sûr que ça me réjouisse, elle tire vraiment le meilleur de son manque de moyen.

Je m'aperçois que je me suis peut-être totalement trompé sur ce film. Ils ne sont plus ensemble au début du film, non ? Ils décident de partir ensemble, ok, mais ne forment plus un couple ?

Rien ne laisse croire qu’ils ne sont plus ensemble. L’ex c’est le père de l’aînée qui l’emporte à Sophie au debut du film.

ah pour moi comme ils font lit à part... sinon je souscris à ce que tu dis. J'ai préféré Voyage en Italie.... après c'est pas du Tarkovski hein...

Ils ne font pas lit à part, Katerine s’allonge sur le lit du gamin.

Sinon totalement d’accord avec Lohmann, grosse déception. D’ailleurs bravo aux parents au style plus parisiano-bobo tu meurs qui y ont emmené leurs enfants (genre 5 et 8 ans), j’ai sincèrement souffert pour eux (même s’il serait intéressant de savoir ce qu’ils en ont pensé).

Letourneur effectue une inversion par rapport à Voyages en Italie. Là où ce dernier était constitué des vacances que l’on se remémorait par la suite pour en créer la matière à postériori celui-ci n’est plus constitué que des scènes où l’on se remémore les vacances pendant qu’on est en train de les vivre. Là où Voyage en Italie était composé de scènes (le scooter, le volcan, la scène de sexe) qui composaient la cartographie de ces vacances, L’Aventura évacuent toutes les scènes potentielles qui pourraient en fabriquer une certaine chronologie évenementielle. Ici on n’est sans cesse perdus temporellement. Et, pire, lorsque l’on évoque le moment le plus rocambolesque des vacances, « l’effraction chez Luigi », on n’en verra rien comme si Letourneur voulait vraiment exclure tout ce qui pourrait être de l’ordre d’une mise en scène premier degré d’un évènement. Au contraire tout ici n’est que la reconstitution parlée d’évènements dérisoires (beaucoup de choses autour du caca notamment). La seule scène véritablement longue et qui pourrait être une forme d’anecdote c’est le gamin qui va faire caca et qui marche dedans. Le seul moment d’ailleurs où la cellule familiale est plus ou moins unie. Unie dans l’odeur des excréments…

Pour le reste c’est vraiment une image des vacances assez déprimante. On a le sentiment d’une famille recomposée qui n’a rien à se dire et qui comble les silences en se racontant ce qu’ils ont fait. Et il y a quelque chose d’intéressant dans le personnage de Philippe Katerine, beaucoup moins loquace et drôle que dans le précédent. Au contraire, on sent qu’elle cherche à percer une forme de dépression larvée chez lui. Il est éteint, ne cherche qu’à s’octroyer des moments un peu seul pour fumer une cigarette en cachette… (et cette idée incompréhensible du père qui rentre tout seul en voiture pendant que les autres prennent le train). Le seul plan un peu construit du film lui est consacré, un long travelling le suivant après avoir garé la voiture pour rejoindre la famille.

Du coup quand à la fin la jeune fille dit que les vacances étaient « bien » on a du mal à voir en quoi tant tout ce qu’on a vu était morne et sans intérêt. Et le film d’être une comédie finalement volontairement jamais drôle mais plutôt déprimante sur une cellule familiale en plein questionnement. Ils n’arrivent pas à décider à l’organisation de leurs vacances, ils n’arrivent pas à vraiment se parler. Tout est sans cesse parasité, notamment par Raoul, l’enfant qui n’en a rien à faire de leurs enregistrements permanents. Un enfant presque uniquement vu comme parasite, qui n’aura aucun droit à un moment un peu sympa et tendre.

Bref, le film donne beaucoup à penser et Letourneur propose une matière autobiographique assez inédite, presque expérimentale (pas sûr que le plan sur le « vrai » Raoul était nécessaire mais il apporte une forme de compréhension à l’ensemble car un spectateur pas au courant de son processus créatif n’y comprendra absolument rien) mais je m’y suis quand même pas mal ennuyé.

Sinon gros carton rouge pour les enfants qui ne portent pas leur ceinture de sécurité à l’arrière de la voiture (notamment le petit dans son siège)…

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CroqAnimement votre