Superman se retrouve impliqué dans des conflits aux quatre coins de la planète et ses interventions en faveur de l’humanité commencent à susciter le doute. Percevant sa vulnérabilité, Lex Luthor, milliardaire de la tech et manipulateur de génie, en profite pour tenter de se débarrasser définitivement de Superman. Lois Lane, l’intrépide journaliste du Daily Planet, pourra-t-elle, avec le soutien des autres méta-humains de Metropolis et le fidèle compagnon à quatre pattes de Superman, empêcher Luthor de mener à bien son redoutable plan ?La vague actuelle et visiblement increvable des films de superhéros a été lancée par deux films de part et d'autre de la sortie de
Matrix en 1999, lui-même influencé par le medium
comics,
Blade (1998) et
X-Men (2000) et ce que ces films ont également en commun, c'est d'avoir opté pour le cuir noir en lieu et place des costumes de couleurs qui caractérisent pourtant ce genre sur le papier. A l'époque, porter à l'écran à ce degré de fidélité le matériau d'origine aurait risqué d'aliéner le grand public. Avec le succès de
Spider-Man (2002), les adaptations ont commencé à se dérider un peu mais même les plus légères comme
Fantastic Four faisaient de Galactus une entité similaire à un nuage plutôt que d'assumer un géant dévoreur de planètes au look improbable. La naissance de l'univers cinématographique Marvel coïncide avec la popularité de
The Dark Knight donc même si l'humour et les
crossovers étaient désormais envisageables, le ton
grim 'n gritty semblait rester un modèle pour apporter une "validation" à toute une culture qui n'avait été prise suffisamment au sérieux aux yeux de certains.
Aujourd'hui, c'est devenu le genre dominant et il n'y a plus aucune limite. Et de toutes les choses qu'essaie d'articuler cette nouvelle version du plus célèbre des héros à cape, c'est cette vérité-là que James Gunn assène plus que tout autre, peut-être même sans s'en rendre compte.
Le début est pourtant prometteur. Le cinéaste a parfaitement conscience qu'il s’agit du NEUVIEME film avec le personnage, qui a déjà eu droit par DEUX FOIS à son
origin story, et qu'il n'a plus à s'embarrasser des présentations, qu'il s'agisse de son protagoniste mais aussi de son histoire avec Lois Lane ou de son antagonisme avec Lex Luthor. Le carton d'ouverture a tôt fait de prendre en compte cette réalité et d'entamer un programme intrigant dans le traitement de son personnage, montré d'emblée comme loin d'être l'invincible et invulnérable superhéros qu'on imagine. Dans ce contexte, on peut donc comprendre le choix de l'accompagner tout de suite de Krypto (le super-chien) et des robots gardiens de la Forteresse de Solitude, tout comme il sera aidé plus tard par les membres du Justice Gang (Green Lantern, Hawkgirl et Mister Terrific). Ce Superman est un super-héros faillible.
Il y a une scène plutôt bien écrite où Lois interviewe Clark/Superman et l'interroge sur son intervention pour éviter la guerre entre la Boravie et le Jarhanpur et remet en question sa méthodologie et pousse le justicier dans ses retranchements...mais Gunn, lui, ne pousse pas le sujet assez loin, alors qu'il aurait été intéressant d'opposer l'idéologie de Superman face à des dilemmes potentiellement insolubles. Le souci, c'est que les pistes politiques pertinentes qu'emprunte l'auteur dans un premier temps disparaissent presque aussitôt, réduites à une simple allégories un peu superficielle. Superman a toujours été une histoire d'immigrant et montrer l'acharnement d'un milliardaire utilisant les médias pour questionner la légitimité et les intentions d'un étranger adulé de tous évoque inévitablement l'incident entre Trump et Obama qui est peut-être bien à l'origine de la situation dans laquelle nous sommes aujourd'hui. Même sans ce parallèle direct, la peur que Luthor essaie de créer autour de Superman, faisant de lui un "grand remplaçant" en puissance, n'est pas sans résonance avec l'actualité outre-Atlantique (et ici aussi en fait). De la même manière que le pays envahisseur est slave, avec un ersatz de Poutine à sa tête, et que le peuple envahi est plutôt typé Moyen-Orient.
Mais il ne suffit pas de simples analogies pour construire un propos, encore faut-il l'incarner au travers du récit et de l'action. Alors ce n'est sans doute pas ce que Gunn cherche
vraiment à raconter au fond, si l'on en croit le début et le discours final de Superman - oui, parce que c'est un film assez didactique dans les dialogues - il cherche davantage à montrer que l'ErReUr EsT hUmAiNe et que Superman, comme tout le monde, fait du mieux qu'il peut. C'est tout à fait mignon mais...ça non plus ce n'est pas vraiment ancré dans les actes du héros. Toutes ces sincères intentions se diluent et se perdent dans une accumulation de péripéties désincarnées qui croulent sous le poids de la surenchère de détails SF/cosmiques/
comics creux. Nanites, rivière anti-proton, univers de poche, Element Man, Ultraman, amibe interdimensionnelle, kaiju...et ce putain de clébard qui revient sans cesse. C'est bon, James, on a compris que tu n'avais plus aucun complexe vis-à-vis du matériau de base, que tu pouvais tout faire, que tu veux tout mettre, montrer comme
Superman ça peut aussi être chelou, aussi loufoque que
Les Gardiens de la galaxie, et donc piocher dans la myriade d'idées farfelues nées durant le
Silver Age des
comics. Après tout, on a déjà eu la version Donner et la version Snyder, toutes deux déjà radicalement différentes, et c'est tout à son honneur de proposer une approche qui tranche avec ses prédécesseurs. Le souci, c'est que ça se fait cette fois au détriment de l'histoire, reléguée au second plan, là où c'était au service du fond dans ses précédents films. Je ne suis pas particulièrement fan du dernier
Gardiens de la galaxie mais putain, ces cyber-bestioles m'avaient fait pleurer. Ici, ça manque de gravitas, notamment dans la redite des précédentes adaptations (l'aspect politique sur les droits de Superman déjà mais également tout ce que le film évoque de la différence entre destinée et éducation était au cœur de
Man of Steel alors qu'ici c'est trop secondaire pour toucher) dont l'action était également plus impressionnante.
En fait, c'est la version dessin-animé du mercredi/samedi matin, avec son 1.85 à grand angle aussi grossier que le jeu de l'actrice qui fait Ma Kent - mais qui passe finalement pas trop trop mal dans le contexte, en dehors de quelques plans pas jojo - et sa photo surexposée prête-à-streamer. Les puristes seront contents que leur chouchou Nathan Fillion joue un Guy Gardner qui a bien sa coupe au bol de merde et son perfecto. Et les gamins, comme mon fils de neuf ans, ont un Superman qui ne dénuque pas le méchant à la fin. C'est loin d'être honteux, vraiment. J'ai beaucoup aimé le cast et je serai curieux de les voir dans un film plus tenu. Parce qu'en l'état, il y a certainement du cœur dans ce
Superman et ce que Gunn croit être des couilles mais pas beaucoup du reste du corps.