le bon goût anglais cette affiche.c'était il y a presque 30 ans, 1996 donc.
palme d'or et prix d'interprétation à cannes (face à
breaking the waves, fargo, ridicule... année sympa), puis 5 nominations aux oscars (film, réal, scénario, actrices).
1,5m.
ce qui est fou, c'est comme cette histoire pourrait être racontée aujourd'hui, dans n'importe quel pays, et du coup n'importe quand.
une fille (noire) adoptée à la recherche de sa mère biologique, et qui la retrouve, blanche, dans un milieu social tout à fait différent.
et il n'y a rien de particulièrement daté dans le récit, dans le style ou dans le récit, à part un truc subtil sur le cerveau des gens qui font du cinéma.
c'est à dire qu'aujourdhui ça n'aurait probablement pas la palme, et n'aurait même pas été sélectionné, potentiellement. c'est du cinéma d'auteur, estampillé art et essai, mais c'est fondamentalement tout à fait accessible. il n'y a aucun dispositif destiné à t'en mettre plein la vue, il n'y a pas de théorie concernant quoi que ce soit, c'est une histoire, il n'y a pas une seconde où il se considère plus important que ses personnages. j'ai vu bird il y a une semaine, qui se passait aussi chez les white trash anglais ayant des enfants beaucoup trop tôt, et je parlais de film safari et c'est impressionnant comme ça ne l'est pas ici : il regarde ces gens sans aucune sorte de jugement, il n'y a pas l'ombre d'une blague à leurs dépends, il donne à chacun sa personnalité, ses aspirations, ses souffrances, ses raisons d'être, il les connait et il les comprend. la fille est noire et csp+, la mère est blanche csp-, mais on était encore dans le délire universaliste à l'époque et c'est fait subtilement, aucune thématique n'est formulée, ce sont des regards, des bouts de phrase qui évoquent gêne et malaise mais in fine c'est une mère et une fille qui discutent dans le même plan.
du coup c'est très joli et touchant d'une manière simple et pure, ce qui n'empêche pas d'aborder plein de choses sur les trajectoires de vie, sur notre milieu qui fait de nous ce que nous sommes, sur le capital financier et le capital culturel, sur l'intelligence émotionnelle, sur les normes sociales, sur ce qui fait que l'on s'entend bien ou pas les uns avec les autres. mais le tout en accompagnant en totale empathie ces deux femmes extrêmement émouvantes. ça avait ainsi toutes les qualités d'un mélo, le plaisir de suivre un moment important de la vie des gens, tout en étant très réaliste et quotidien, en observant magnifiquement les êtes humains, et en abordant des sujets complexes riches et passionnants.
ça c'est les qualités, qui explosent dans les magistrales dernières 45 minutes. et il est en pleine maitrise de son art et prend son temps, sûr de lui, pour y arriver. mais enfin ça dure 2h20 et il est donc facile d'oublier alors ce qui est quand même très gênant pendant environ 1h15 : la difficulté de comprendre l'intéret et le rapport de l'histoire de thimothy spall. on le comprend mieux à la fin, mais en vrai c'est quand même beaucoup moins fort que la stroryline principale, ça prend beaucoup de temps, c'est construit un peu bizarrement puisqu'on le lâche pendant 25 minutes et on le retrouve tel quel... je pensais initialement qu'il voulait écrire pour l'acteur et n'a pas vraiment su renoncer quand c'était pas aussi fort que le reste, je me suis finalement dit que c'était important de pleinement poser le personnage pour donner sa force à la fin - mais ça n'excuse pas le fait que ce soit un peu faible.
ça reste le genre de défaut qu'on oublie quand la dernière heure t'emporte, et que le temps efface face à la prestation tout simplement extraordinaire de brenda blethyn, qui est vraiment : for the ages.