Endetté envers Deva, Vardha, fils d'un chef de gang, lui sauve la vie, le condamnant à partir. Deva fait toutefois la promesse de revenir si un jour Vardha a besoin de lui...Un synopsis véritablement représentatif du film étant introuvable en ligne (celui d'AlloCiné et d'IMDb est le même et complètement erroné, celui de Letterboxd concerne...la deuxième moitié du film), c'est moi qui me suis fendu du pitch ci-dessus, me limitant délibérément aux 15 premières minutes du film qui est effectivement un tel chantier narratif que l'on ne sait pas par quel bout le prendre pour le résumer.
On commence avec une introduction nous montrant que Deva était déjà
badass alors qu'il était prépubère, puis un générique établissant l'amitié entre les deux enfants, avant d'enchaîner direct sur leur séparation fatidique et le serment, inscrit d'emblée dans la mythification par le biais d'une référence à vieille histoire perse (inventée pour le film ou pas, peu importe,
on y croit) qui donne son nom au film.
De toute façon, avec le nombre de ralentis qui abondent rien que dans ce quart d'heure d'ouverture, la mythification était déjà de mise.
Un pote charriait le Snyder Cut en disant qu'à la vitesse normale, le film ne durerait que deux heures et c'est peut-être encore plus vrai ici (ça dure 2h55). Et c'est pas que les ralentis qui rallongent le film mais la construction de chacun des morceaux de bravoure dilate le temps et l'action au max, "quand est-ce que Deva va enfin passer à l'acte?!?!". Les mecs savent parfaitement ce qu'ils font en faisant monter la sauce de la sorte avant l'explosion de violence. C'est vraiment
self-indulgent de fou mais totalement
self-aware aussi. Il n'y a pas la réflexion de mise en abyme d'un
Sucker Punch ou le petit clin d’œil parodique de la saucisse et des grains de sésame du giga ralenti de
Justice League, mais ça reste un blockbuster indien. On va pas les voir en LaiSsAnT sOn CeRvEaU à L'eNtRéE mais on sait ce qu'on va voir. L'exposition Bollywood Superstars en ce moment au Quai Branly retrace l'historique du cinéma indien en le reliant à la tradition narrative des récits des dieux et il est clair que cela informe la caractérisation et l'illustration de leurs héros. Ici, y a même un plan jouissif où le protagoniste prend l'allure de Shiva qui m'a fait lancer les applaudissements dans la salle.
La mise en images n'est pas le seul domaine où le film favorise l'outrance. L'écriture également pousse les potards. À propos de
RRR et
Jawan, j'évoquais cette récurrence du long flashback aux deux-tiers du récit qui vient subitement expliquer tout un pan de
backstory. Ici, tu as donc la mise en bouche décrite plus haut, puis une ellipse de 30 ans qui nous amène à une situation avec des méchants et des gentils en pagaille et des gens qui font tenir une promesse à Deva mais qui ne sont pas l'autre enfant du début, donc tu avances à vue en kiffant la compilation de
badasseries puis arrive le tant attendu
flashbackstory mais pas aux deux-tiers, il arrive direct à l'entracte et compose toute la deuxième moitié du film (je répète : 2h55).
Parce que le flashback en question, c'est limite tout un autre film! Et la structure est tout aussi alambiquée que le lore longuement exposé et complètement ouf, avec une sorte de Wakanda indien, mais plus médiévial qu'afrofuturiste, où se joue une intrigue de cour et de coup d'état à la
Game of Thrones (mais sans le fantastique...quoique y a des simili-zombies à un moment
). Encore une fois, les mecs ne s'interdisent rien. Cette densité est surtout due à une générosité cohérente avec l'entreprise de mythification.
Le film est clairement trop long, prend trop ses aises, ça n'a pas le propos d'un
Jawan ni la
bromance d'un
RRR (même si le récit de loyauté wooien au cœur du film est cool bien qu'archétypal
as fuck) mais c'est kiffant.
Peut-être suis-je indulgent car je suis encore dans la phase de lune de miel avec le cinéma indien et que je ne me suis pas encore lassé d'un énième festival de baston
slo-mo et
speed-ramped (ou
slowed and reverbed pour employer une expression musicale), surtout avec un personnage principal plus invincible que Superman, mais il y a suffisamment d'idées et d'aplomb (et le meilleur thème musical depuis le
Star Trek de 2009) pour me faire vibrer.