Je suis loin d'être un amateur de Zhang Yimou et de son style académique, tendance ultra-décorative.
Shadow, avec son histoire d'intrigues politiques et de rivalité pour le trône, peut donner l'impression de s'inscrire dans la lignée de
Game of Thrones, ou de Shakespeare, c'est selon. En dépit d'un rythme un peu long, le film permet de mettre tout ce qu'il manque dans Game of Thrones : tenue formelle (photo dominée par des coloris noir et blanc inspiré du yin et du yang, direction artistique impeccable, fluidité des combats, un peu trop esthétisant au début mais qui deviennent de plus en plus brutaux), cohérence psychologique, dialogues qui sont loin d'être ridicules, pas de dragons ou de zombies régressifs.
Le film bénéficie d'une excellente galerie de personnages qui arrivent à être caractérisés avec concision et réservent cependant des surprises et des parts d'ombre. Le roi faible et grotesque, la princesse courageuse magnanime, la femme tiraillée entre le mari et son double (en fait l'ombre de son mari en proie à la maladie et l'ombre - le shadow du titre- qu'il s'est choisie comme double, beau retournement opéré par le film), et comme on vient de le dire, le commandant et son substitut, le film joue avec des archétypes et parvient à les maintenir dans une forme d'atemporalité. Ainsi son propos politique et existentiel n'est pas parasité par l'époque : le féminisme est de son essence, non de circonstance, tout comme le sont tous les autres éléments du film qu'on pourrait s'amuser à isoler.
Maintenant j'ai envie de voir le dernier Chen Kaige, qui a l'air d'être une sorte de wu xia pian fantastique.