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MessagePosté: 03 Aoû 2009, 11:23 
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Matou miteux
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Julie, sage bibliothécaire rangée, rencontre Celine, magicienne un rien mythomane qui va l'entrainer dans un monde d'aventures. Céline lui raconte ainsi l'étrange histoire d'une petite fille élevée dans une vaste demeure par un père veuf et les deux maîtresses de celui-ci. Intriguée, Julie part à la recherche de cette drôle de famille...

Des lapins d'Alice, des magiciennes, des zombies: il y a des films comme ça qui semblent avoir été écrits pour toi.

Le film débute par un jeu de piste à la Alice (donc) où un personnage (Céline) fait son lapin blanc qui détale, suivi par Julie dans les ruelles et squares du 18e *hey juste en bas!* en forme de gros terrier magique des possibles. Et ça met bien une heure à prendre forme, ce chassé-croisé flâneur, où l'une surveille ou apprivoise l'autre, jusqu'au décrochage fantastique. A coup de bonbon fondu sur la langue comme à coup de potion champignon de Lewis Carroll, Céline et Julie bascule vers le fantasme à puzzle, jouant autant sur la pure fantaisie peuplée de fantômes, aux boucles narratives et samples labyrinthiques, où les mêmes séquences se croisent et se recroisent, et où la temporalité, l'étirement, jouent un vrai rôle, et jouant aussi sur la création, film créé par Rivette comme par ses actrices, dans un forme complètement libre, à tirer peu à peu son fil d'Ariane. Tout ça sur plus de trois heures qui donnent le sentiment de vivre une vraie expérience, en rupture avec un peu tout (enfin Rivette c'est peut-être toujours comme ça, je sais pas - j'ai juste vu Va savoir que j'avais déjà bien aimé).

J'adore la liberté enfantine du film, ce jeu permanent, et j'ai trouvé ça très drôle (tout le mélo mort avec Marie-France Pisier et Bubble Ogier c'est mon bonheur).

Mais pour moi le sommet est peut-être à la fin, avec cette courte séquence de pure fascination où Céline et Julie, enfin sur leur bateau, croisent

... les personnages du mélo, Ogier, Pisier et Schroeder, sur une autre barque


... comme vaisseau fantôme ou trace tangible d'imaginaire, là où la frontière entre les deux mondes se fait la plus floue, et qui m'a rappelé une des séquences que je préfère dans tout le cinéma de Mizoguchi, celle de la traversée des Contes de la lune vague où les personnages croisent, dans un marais comme hanté, la barque d'un mourant, ou d'un fantôme, en frontière d'un monde à l'autre. Rivette ayant pas mal écrit sur Mizoguchi, j'imagine qu'on est dans la citation et sur le discours c'est complètement cohérent.

J'ai passé le film à voir Véronique Genest quand je voyais Dominique Labourier. Et Jennifer Beals pour Juliet Berto (mais juste pour sa scène de magie). Perturbant.

Et j'ai enfin la réponse du "mais d'où vient ce plan de meuf qui gémit avec son verre qui se casse" à la fin du clip de la Quinzaine des réalisateurs. :)

5-6/6

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MessagePosté: 03 Aoû 2009, 12:53 
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Inscription: 09 Fév 2009, 12:31
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C’est le film de Rivette le plus cité/vu/aimé à l’étranger, alors qu’ici, j’ai l’impression qu’on retient plutôt de lui ses films plus classiques et littéraires avec-des-morceaux-d’actrices-connues dedans (Sandrine Bonnaire, Emmanuelle Béart, Jeanne Balibar…), et c’est bien dommage, parce qu’il occupe une place un peu particulière dans sa filmo : pour moi, comme pour beaucoup de fans, c’est son meilleur (même si Out1 est un très bon contender).


La première particularité, hormis sa durée, tout a fait normale pour le réalisateur (et qui n’empêche pas le film d’être parmi ses plus accessibles, il me semble), c’est l’humour. Je crois que c’est le seul film de Rivette à chercher à être ouvertement drôle. Drôle pas forcément dans le sens comédie, mais dans le sens ludique. Le film a été coécrit par les actrices, qui étaient meilleures amies dans la vraie vie, et ça se sent, ça ajoute beaucoup aux scènes improvisées, leur plaisir est très communicatif. La thématique du jeu et du complot chère à Rivette est ici montrée sous un jour très léger et excitant à la fois, comme un jeu d’enfants. Car c’est exactement de ça que parle le film, pour moi, du pouvoir de l’imagination et du jeu, et à partir de là, le film a beau être très vivant et pas du tout du tout-théorique, il se prête à tout plein d’interprétations et les pistes de lectures sont très variées et toutes aussi excitantes.

- On peut le voir comme un film sur le rapport entre l’artiste et son imagination / ses créations. On ne sait jamais vraiment si Céline et Julie inventent entièrement l’univers dans lequel elles se projettent, où s’il existe déjà et qu’elles ne font que le découvrir. Elles l’envisagent néanmoins d’abord avec curiosité mais aussi avec respect et crainte : elles ne maitrisent pas entièrement leurs allées et venues et elles ont peur jusqu’au dernier moment de s’y laisser prendre et de rester prisonnière de leur imagination débordante. Comme toujours chez Rivette, la création artistique ne se fait pas sans risque et c’est un pouvoir qu’il fat apprendre à maitriser.

- Un film sur l’enfance et sur les souvenirs. L’histoire parallèle de la gamine menacée par sa famille nait d’abord de Céline, elle le raconte comme un souvenir, mais comme un faux souvenir, pour jouer (comme dans un jeu de rôle de gamins), et pareillement Julie décide de la croire (ou de faire semblant) pour jouer, mais elle se rend compte plus tard que cette histoire provient peut-être en fait de son passé à elle. De même, comme de vrais souvenirs, les images de leur monde parallèle reviennent en boucles jusqu’à devenir de plus en plus clairs.

- Un film féministe. Chacune va prendre en main la vie de l’autre en prenant soin d’en mettre les hommes bien à l’écart (guilou, m’sieur dédé…) pour ne rester qu’entre elles. Et dans leur monde imaginaire, elles font face au contraire à une histoire très classique de deux femmes se battant pour épouser un homme. Ce monde et ce schéma-là elles le tournent en ridicule et le sabotent avec plaisir. Ce qui amène à l’interprétation suivante.

- Un film sur l’homosexualité féminine. C’est rarement la première interprétation qu’on fait du film, et pourtant je la trouve fascinante autant que quasi-évidente Rien n’est clairement dit à ce sujet. Les deux femmes se courent d’abord littéralement l’une après l’autre, se tournent autour pendant une bonne partie du film, et quand Céline atterrit pour la première fois chez Julie, celle-ci lui installe ses affaires dans ses placards, lui faisant clairement comprendre qu’elle veut la voir reste. Plusieurs autres indicent laissent volontairement planer le doute (dorment-elles vraiment dans le même lit ?), et plus symboliquement, elle finissement toutes les deux par soustraire la jeune Madeline au schéma de la famille nucléaire classique et néfaste pour l’emmener vivre avec elles.

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- Un film théorique sur la nouvelle vague. Les filles, comme sur la photo, sont face à la caméra lorsqu’elles s’apprêtent à rentrer dans leur monde, comme si elles étaient face à un écran. On a souvent dit à propos de leur monde imaginaire vieillot qu’il représentait les conventions cinématographiques trop classiques héritées du théâtre, et qu’il fallait dépasser, et que la « vraie vie » de Julie et Céline correspondaient à un idéal de spontanéité recherché par la nouvelle vague. Une interprétation similaire a souvent été faite aussi sur le rapport trop classique et à repenser sur le rapport entre littérature (toute la partie avec Bulle Ogier et Marie France Pisier est directement adaptée d’Henry James) et nouveau cinéma.

Bon, et ça ne n’est que certaines pistes parmi d’autres, on peut aussi légitimement se demander si Céline existe, si elle n’est pas née d l’imagination de Julie pour pallier à son existence trop sage (qui inclut quand même les tarots et les pentagrammes). Il a beaucoup été dit aussi que le film parlait tout simplement de drogues et du psychédélisme de son époque (même si Rivette s’en défend avec amusement, pour lui les fameux bonbons magiques sucés par les filles évoquaient plutôt les gâteaux d’Alice au pays des merveilles).

6/6, il est même dans mon top 5 de tous les temps.

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Liza says "Don't drop bombs!"


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MessagePosté: 03 Aoû 2009, 13:08 
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Vaut mieux l'avoir en journal
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Film que j'ai en DVD depuis genre 6 ans sans l'avoir vu... Vous m'avez donné envie de le regarder, du coup.

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Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)


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MessagePosté: 04 Aoû 2009, 12:30 
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Yeah, mission acccomplie :)

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Liza says "Don't drop bombs!"


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MessagePosté: 04 Aoû 2009, 15:43 
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Serial Modo
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Blissfully a écrit:
Et j'ai enfin la réponse du "mais d'où vient ce plan de meuf qui gémit avec son verre qui se casse" à la fin du clip de la Quinzaine des réalisateurs. :)


ah je me posais chaque fois la question, vrai plan marquant de ce clip, d'ailleur,s le verre qui e casse de façon improbable, ça m'intriguait aussi...

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MessagePosté: 04 Aoû 2009, 15:53 
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Antichrist
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http://www.youtube.com/watch?v=XFAfSemlea8

je n'avais pas fait attention à ce plan.


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MessagePosté: 04 Aoû 2009, 23:30 
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C'est beau ce clip.


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MessagePosté: 22 Mai 2019, 17:50 
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J'en suis à un peu plus de la moitié et je me force à le finir. D'habitude j'adore Rivette mais là l'impression d'un film qui a très mal vieilli. Surtout le côté improvisé de l'oeuvre collective et puis je trouve que la longueur n'est jamais justifié (3h13!!!), beaucoup de longueurs et l'ennui qui pointe. Je comprends la liberté de ton et la fantaisie de l'ensemble qui ont pu séduire à l'époque mais 45 ans après cela ne fait plus le même effet.

Bon je ne dis pas que le film n'a pas de qualités mais je suis le seul à le trouver surestimé par rapport à son statut culte des années 70?


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MessagePosté: 22 Mai 2019, 17:51 
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Non, j’avais tenu 45 minutes à la Cinémathèque.


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MessagePosté: 22 Mai 2019, 17:55 
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Localisation: In the Oniric Quest of the Unknown Kadath
Découvert l'année dernière en salles et j'ai adoré. Mon Rivette préféré je pense (mais je suis loin d'avoir tout vu de lui).

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CroqAnimement votre


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MessagePosté: 22 Mai 2019, 17:58 
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Un des rares Rivette qui tienne la route dans mes souvenirs dans cette veine néo-vaguiste qui consiste à faire coïncider féminité et fantaisie (mot-clé) ô si craquante (ironie légère). A voir de préférence en deux fois quand même.


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MessagePosté: 22 Mai 2019, 18:33 
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Messages: 6391
Bon Rivette, mais j'ai un biais (une amie chère habitait près du coin de Colombes montré dans le film).

Rivette filme bien la banlieue ceci-dit (dans la Bande des 4 notamment)

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Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ?
- Ce sont des fromages. On me les envoie de Calabre.


Jean-Paul Sartre


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MessagePosté: 22 Mai 2019, 18:36 
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Déjà-vu a écrit:
Non, j’avais tenu 45 minutes à la Cinémathèque.
Tu me rassures, je me fais chier comme un rat mort.

Bon quand je lis les autres avis, je crois que c'est pas du tout la veine de Rivette qui m'attire dans sa filmographie. Je crois que je vais éviter ses premiers films "fantaisistes", c'est pas du tout ma tasse de thé. J'adore ses films "littéraires" et toute sa période à partir des nineties.


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MessagePosté: 22 Mai 2019, 18:46 
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Haut, bas fragile (qui se veut une comédie musicale) et Va savoir sont pleins de cette fantaisie si "rivetienne". Elle est encore pire quand Pascal Bonitzer s'en mêle au scénario.
Mais sans doute qu'il est possible de diviser assez facilement son oeuvre en deux.


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MessagePosté: 22 Mai 2019, 19:47 
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Messages: 14459
J'ai vu Va savoir il y a longtemps donc mes souvenirs sont diffus mais j'avais le souvenir d'avoir beaucoup aimé. Il y avait oui de la fantaisie mais dans un style différent, plus proche de sa veine littéraire. Et puis ce qui me gêne dans Céline et Julie vont en bateau c'est ce drôle de rythme. Attention, malgré la longueur, un film de Rivette est toujours alerte et vivant mais là l'impression qu'il prend énormément son temps et que l'action évolue très lentement d'où l'impression de me faire chier comme un rat mort. Mais je suis conscient que c'est pas ma tasse du thé ce genre de cinéma donc ne me prenez pas mes critiques pour argent comptant. Simplement, ça ne fonctionne pas sur moi.


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