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MessagePosté: 02 Oct 2017, 15:33 
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Boris et Genia sont en train de divorcer. Ils se disputent sans cesse et enchaînent les visites de leur appartement en vue de le vendre. Ils préparent déjà leur avenir respectif : Boris est en couple avec une jeune femme enceinte et Genia fréquente un homme aisé qui semble prêt à l’épouser... Aucun des deux ne semble avoir d'intérêt pour Aliocha, leur fils de 12 ans. Jusqu'à ce qu'il disparaisse.

J'admire le talent de Zviaguintsev depuis son fameux Retour, l'une des claques de cette grande année que fut 2003. Son Bannissement m'avait un peu refroidi.. Picturalement c'était splendide mais je m'étais bien fait chier. Du coup j'avais zappé (à tort) Elena et m'étais rattrapé avec magistral Leviathan qui, malgré l'abus de fautm, était déjà un implacable portrait de la Russie contemporaine, baignée dans la corruption (et la vodka).
Avec Faute d'amour (titre parfait) le réalisateur russe poursuit sa radioscopie glaçante de la société russe contemporaine à travers l'histoire assez horrible d'un couple en plein divorce (j'avais rarement vu une déchirure conjugale aussi violente et aussi dure au cinéma) qui se retrouve, avant d'enchaîner pour de bon sur leur nouvelle vie, à régler un problème inattendu: la disparition inexpliquée de ce fils. Ce fils non désiré, ce fils mal aimé, ce fils dont personne ne veut la garde (plan inoubliable dans la salle de bains où le gosse est témoin d'une discussion à son sujet).
Bon, je me suis pris une claque immense. C'est tout ce que j'aime, en fait. Rien que la mise en scène, ample et profonde, est impressionnante d'intelligence et maîtrise. Eclairée par le Roger Deakins russe, rien que la mise en scène donc est un régal de chaque instant. Mais c'est bien le fond du film qui met KO. On pourra regretter que certaines choses soient un peu trop soulignées ou surexpliquées dans les dialogues (et ce sera ma seule réserve sur le film), mais comment ne pas être tétanisé par cette chronique société dépressive et égoïste, littéralement en manque d'amour, où la police est démissionnaire (les recherches sont faites par une association bénévole). Le film regorge de scènes poignantes, tendues, implacables.

Bref j'ai trouvé ça puissant et riche, du beau, du grand cinéma et sans doute le plus fort de son auteur. Le Prix du Jury à Cannes me semble bien pauvre tout à coup.

5,5/6

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MessagePosté: 04 Oct 2017, 22:32 
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Arnotte a écrit:
Faute d'amour (titre parfait)


Je me suis dit pareil !

Perso j'ai quand même bien aimé, le film passe tout seul car tout est bien amené, les acteurs sont convaincants etc. Mais personnellement je ne peux absolument pas m'enthousiasmé pour un film dont tous les personnages me semblent antipathiques.

L'allégorie est toutefois belle, on sait qu'au fond ils se mentent entre eux et à eux mêmes, Aliocha ne les intéresse pas et d'ailleurs il disparait rapidement du film. Ce n'est au fond pas une quête pour retrouver leur amour paternel ou maternel, mais une excuse à chacun pour fuir le petit morceau d'amour auquel ils pourraient s'accrocher et qui pourraient les sauver de leur néant émotionnel.


J'ai moyennement apprécié en revanche les rapprochements avec la guerre ou tout ce qui tourne autours du taff de Boris, des éléments qui pour moi sont ajoutés là comme ça, un peu grossièrement. Non ?

3-4/6 ça vieillit assez bien malgré tout


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MessagePosté: 04 Oct 2017, 22:47 
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L'académisme russe pour festival continue de faire son effet à ce que je vois (je pense essentiellement à Zviaguintsev).


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MessagePosté: 08 Oct 2017, 23:15 
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L'une des plus grosses frustrations de l'année, fusion du Retour et d'Elena que je préfère tous deux à Faute d'amour. Je rejoins Arnotte pour dire que la réalisation est impressionnante, c'est visuellement le film de Zviaguintsev le plus abouti (il me reste tout de même Leviathan à rattraper). La scène de recherche dans l'immeuble abandonné est particulièrement saisissante (et m'a rappelé Stalker, tout comme l'ouverture et les battus en forêt renvoient à L'Enfance d'Ivan - à chaque fois l'histoire d'un enfant au prise avec une guerre dans laquelle il ne devrait pas se trouver, la 2nde guerre mondiale chez Tarkovski, un divorce très douloureux ici). S'ajoute à cela une description de la société russe qui est d'une justesse (et d'une dureté, puisque c'est bien ce qui la caractérise) implacable. Narcissisme exacerbé, tension voir haine latente qui n'attend que le premier prétexte pour exploser. En repensant à la compétition cannoise de cette année, c'est une leçon que Zviaguintsev a donné à Loznitsa, dont Une femme douce n'était qu'un prétexte à étaler sa russophobie en accumulant ad nauseam les clichés les plus éculés sur la Russie. Le russe n'est pas moins tendre que l'ukrainien sur l'état actuel de la Russie, mais son regard cerne bien mieux sa réalité.

Malheureusement, au-delà de ces qualités Faute d'amour à un énorme défaut, défaut auquel je ne m'attendais pas pour ce réalisateur qui est plutôt caractérisé par une sécheresse scénaristique, c'est l'accumulation d'événements qui n'apporte absolument rien à l'intrigue, pire la noie. Les 45 premières minutes sont catastrophiques, ennuyeuses (ça parle beaucoup pour ne rien dire) et hors sujets (une fois compris que l'on est fasse à deux êtres narcissiques/égocentrique, quel intérêt de nous infliger leur scène de baise respective?). La suite est un peu meilleure, mais semble parfois plus prétexte à faire de belles images qu'à traiter du cœur du film (les parents sont d'ailleurs relégués aux seconds rangs lors des recherches, ils font partis du décorum, alors qu'il y aurait eu matière à creuser leur relation certes délétères pour une raison que l'on aura jamais clairement identifiée). Finalement de cette absence d'amour dont veux nous parler Zviaguintsev, au-delà de son constat factuel on n'en saura que très (trop) peu.

Mickey Willis a écrit:
un film dont tous les personnages me semblent antipathiques.
Pour les femmes je suis plutôt d'accord (hormis celles qui participent au groupe de recherche, mais elles sont non-identifiables). Pour le reste, la mère, la grand-mère, la nouvelle copine enceinte et sa mère, les poupées qui lâchent leur 06 comme on lâche un pet, je ne pense pas qu'il y ait une figure féminine positive. Pour les hommes c'est beaucoup moins dur. Le père est mou, lâche, mais finalement pas méchant. Le policier et surtout le chef de l'association ont une image plutôt (voir très) positive.

3/6 indulgent


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MessagePosté: 09 Oct 2017, 08:44 
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Lohmann a écrit:
Les 45 premières minutes sont catastrophiques, ennuyeuses (ça parle beaucoup pour ne rien dire) et hors sujets (une fois compris que l'on est fasse à deux êtres narcissiques/égocentrique, quel intérêt de nous infliger leur scène de baise respective?)

Haha, moi j'ai adoré cette première partie.. Par le pitch, on sait que l'enfant disparaît mais j'étais surpris que ça ne survienne qu'après 50 minutes de film (j'ai regardé ma montre pour checker), et j'ai beaucoup aimé, justement, le fait qu'on prenne le temps d'exposer la vie de chacun des parents, de montrer qu'ils ont déjà la tête ailleurs, de montrer leur relation à "l'amour". Je trouve les deux scènes intimes super fortes, presque émouvantes.

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MessagePosté: 09 Oct 2017, 09:26 
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Oui du mal à voir ce qu'elles auraient de catastrophiques ces 45 premières minutes. Elles sont parfaitement en accord avec le reste à mon sens. De mon côté j'ai trouvé ça quand même assez fort, le film a particulièrement bien vieilli et s'est lentement imposé à moi. Ce que je trouve fort c'est la manière d'avoir construit le film intégralement sur l'absence, sur le creux. Tout le film n'est qu'une espèce de spirale dont le centre ne cesse de se dérober aux personnages et à nous. Tout est construit dans une espèce de mouvement en négatif pour mieux faire ressentir l'absence d'amour, la douleur d'une solitude telle qu'elle est vouée à la disparition. Comme cette manière de définir les parents uniquement dans le conflit, dans la lâcheté (le père surtout), dans l'absence de bonheur. Finalement le film m'a étonnement fait penser à Gone Girl de Fincher, où j'ai retrouvé cette même ambiance, la recherche d'un disparu par le prisme non pas du désir de le retrouver mais de la blessure sans cesse renouvelée de son absence. Du coup quand enfin vient ce moment de craquement
la scène de la morgue et de la reconnaissance du corps
j'ai trouvé ça absolument bouleversant. Les dernières scène en guise d'épilogue sont aussi d'une grande force. Etonemment c'est aussi un film qui montre une société russe presque positive avec ces policiers concernés et cet improbable groupe de bénévoles qui n'a visiblement aucune autre activité que chercher des enfants disparus. Finalement pour une fois, l'horreur ne vient pas des institutions, de la société ou des classes mais bel et bien des hommes eux-mêmes.

5/6

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MessagePosté: 09 Oct 2017, 09:37 
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Art Core a écrit:
ce moment de craquement
la scène de la morgue et de la reconnaissance du corps
j'ai trouvé ça absolument bouleversant.

A fond.. Terrible scène. Surtout de la part du père:
Tu sens depuis le début qu'il a juste envie de chialer sur tout ça, du coup quand ça sort, pfouhlalalalaaaa...

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MessagePosté: 09 Oct 2017, 11:27 
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Art Core a écrit:
Oui du mal à voir ce qu'elles auraient de catastrophiques ces 45 premières minutes
Parce que de mon point de vue elles échouent à décrire cette absence d'amour, et se dissipent en digression inutiles sur l'égoïsme des deux parents. La scène au bureau qui dure dix minutes a pour une unique prétexte d'enfoncer l'excès de religiosité dans la société russe actuelle, les scènes de baises la prépondérance du sexe, la séance esthéticienne/coiffeuse pour le côté narcissique, le resto pour tourner en dérision les poupées russes plus occupés à se prendre en selfie ou à photographier leur plat qu'à vivre l'instant avec son ou ses partenaires. Tout cela on l'a déjà compris dans la scène d'ouverture, quelle utilité de devoir tout imager ainsi (dans des scènes extrêmement longues)? Au final le gosse on le voit 5 minutes au début, disparaît après cette longue phase de digression au bout de laquelle on daigne enfin s'apercevoir qu'il n'est plus là. Pour moi ça ne marche pas, Zviaguintsev m'a habitué à des scénarios beaucoup plus serré desquels il réussissait à faire surgir une émotion forte, dans Faute d'amour à force de vouloir parler de tout on (en tout cas je) en oublie le sujet principal et abouti à une sécheresse émotionnelle contre-productive (le gamin je l'ai totalement oublié).


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MessagePosté: 09 Oct 2017, 12:24 
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Mais c'est justement là qu'est tout le projet du film. Nous faire ressentir la brûlure de cette absence. Tout le film tourne autour de ça, de cet enfant qui disparaît littéralement parce qu'il est ignoré. Parce qu'il n'est plus le sujet principal de la vie de ses parents. Y voir un scénario qui ne serait pas "serré" c'est un contresens, Zvyaguintsev construit l'intégralité de son film autour de ça, de cette élusion du sujet pour qu'au final ne reste que ce morceau de ruban en plastique accroché à une branche.

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MessagePosté: 09 Oct 2017, 12:45 
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Art Core a écrit:
Mais c'est justement là qu'est tout le projet du film. Nous faire ressentir la brûlure de cette absence
Et bien dans mon cas c'est raté, c'est son seul film où je ne ressens rien.


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MessagePosté: 09 Oct 2017, 12:52 
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Ben c'est tout le challenge de ce cinéma. L'émotion ne provient pas des personnages et des situations mais bien de ce qui leur manque. Je trouve ça très fort pour ma part.

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MessagePosté: 11 Oct 2017, 07:19 
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Arnotte a écrit:
Art Core a écrit:
ce moment de craquement
la scène de la morgue et de la reconnaissance du corps
j'ai trouvé ça absolument bouleversant.

A fond.. Terrible scène. Surtout de la part du père:
Tu sens depuis le début qu'il a juste envie de chialer sur tout ça, du coup quand ça sort, pfouhlalalalaaaa...


J'ai raté un truc ou
ils ne reconnaissent pas le corps? Selon vous c'est un déni?


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MessagePosté: 11 Oct 2017, 08:51 
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Jerónimo a écrit:
Arnotte a écrit:
A fond.. Terrible scène. Surtout de la part du père:
Tu sens depuis le début qu'il a juste envie de chialer sur tout ça, du coup quand ça sort, pfouhlalalalaaaa...

J'ai raté un truc ou
ils ne reconnaissent pas le corps? Selon vous c'est un déni?

Ben, c'est pas très clair à ce moment-là, soit ils reconnaissent immédiatement et sont dans le déni total (et craquent), soit ils ne le reconnaissent pas (et craquent quand même tellement c'est horrible à voir). Mais la toute fin (avec l'avis de recherche sur l'arbre) indique que le gosse n'a, depuis un an, jamais été retrouvé, donc on peut en déduire que ce n'était pas leur gosse.

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MessagePosté: 11 Oct 2017, 08:56 
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Ah oui c'est 100% clair pour moi que c'est pas lui. C'est ce qui rend la fin si terrible.

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MessagePosté: 11 Oct 2017, 08:58 
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Art Core a écrit:
Ah oui c'est 100% clair pour moi que c'est pas lui. C'est ce qui rend la fin si terrible.


OK on est d'accord alors
tu parlais de reconnaissance du corps, ça m'a mis le doute


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