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MessagePosté: 25 Mai 2015, 14:38 
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Antichrist
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Inscription: 04 Juil 2005, 21:36
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Depuis "Le Bleu des villes", Stéphane Brizé trace le sillon d'un cinéma social à fleur de peau, qui laisse l'émotion venir au spectateur. On pouvait redouter avec "La Loi du marché" qu'il s'abandonne à la trajectoire doloriste et psychologique, chargeant le héros de tous les malheurs du monde pour mieux exposer son indignation devant notre société capitaliste qui jette les humains comme des mouchoirs usagers. Le film n'est pas un tract politique, il est bien mieux que cela, une réflexion humaine sur la moralité et la dignité.

La beauté de "La Loi du marché" tient dans les scènes du quotidien, quand Thierry (Vincent Lindon avec une moustache) s'occupe de son fils handicapé ou passe un entretien par écran d'ordinateur interposé. La dure réalité de la crise lui saute à la gorge, l'absurdité du système, aussi, quand on lui propose une formation inadaptée, mais il fait face, sans devenir un héros ou un monstre. Bien sûr un événément provoquera une prise de conscience, mais Stéphane Brizé a la pudeur de le laisser hors-champ et de ne pas sombrer dans l'hystérie. Beau film.

4/6

Vincent Lindon à poil
http://festival-de-cannes.parismatch.co ... ize-750106


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MessagePosté: 25 Mai 2015, 15:00 
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Successful superfucker
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Inscription: 28 Déc 2006, 21:20
Messages: 8711
Lindon mérite mille fois son prix dans un de ses rôles en prise directe avec la réalité sociale qu'il affectionne, entre un Pater et deux Lioret, et le film doit beaucoup à des choix de montage assez percutants dans ses ellipses, là où la mise en scène reste dans les poncifs du caméra à l'épaule et du gros plan avec une durée à géométrie variable. Après, une fois arrivé dans le supermarché et passé la scène impressionnante et inquiétante dans la démonstration du dispositif de caméras de surveillance, ça devient plus programmatique et moins fort. Finalement, toutes les scènes ou presque ne sont que des sortes de petites séances d'humiliation ordinaire en toute dignité, où on peut même parfois aller jusqu'à rire noir, mais peut-être trop destiné à des spectateurs acquis à la cause de l'horreur du système économique où trônent quelques bourreaux au milieu de tant de victimes consentantes.
3/6


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MessagePosté: 27 Mai 2015, 11:25 
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Inscription: 24 Nov 2007, 21:02
Messages: 28383
Localisation: In the Oniric Quest of the Unknown Kadath
Lindon est absolument extraordinaire. Rarement je n'avais eu ce sentiment de "réalité", de prise avec le réel, cette manière de bégayer un peu, de buter sur certains mots... Par exemple la scène géniale du mobile-home où soudain la négociation pour le prix du bien acquiert un truc presque romanesque.
Après je suis beaucoup plus mitigé sur certaines scènes où Brizé te fait une espèce de prise d'otage assez désagréable comme lors de la scène du stage "entretien d'embauche" où le personnage de Lindon se fait humilier en long en large et en travers alors que la caméra reste infailliblement cadrée sur son visage en mode "regardez le comme on l'écrase, regardez comme il est traité". Cette mise en scène de l'humiliation me dérange énormément, il y a presque une complaisance, presque un plaisir malsain à voir le personnage souffrir. C'est des fois un peu plus subtil mais on peut penser la même chose de la scène de danse. Où dans une salle des fêtes on danse maladroitement le rock sur un remix de Jean-Jacques Goldman avec un prof ringard. Même mise en scène qui se focalise et qui traîne sur le personnage, qui l'étouffe dans son cadre, qui ne lui donne jamais une chance de respirer. Un côté strip-tease un peu dégueulasse que j'arrive pas à oublier.
On a droit aussi à des scènes un peu maladroites où la démosntration se fait trop littérale, trop schématique comme la banquière qui propose de souscrire une assurance au mec qui est déjà en train de s'endetter.

Lors de la dernière partie, la mise en scène bascule, du visage de Lindon on passe au visage des coupables de larcins dans le magasin ou des caissières en fautes. L'humiliation a changé de camp, la victime est devenue bourreau. Je trouve ça assez fort comme proposition mais j'ai du mal à voir autre chose qu'une démonstration un peu sommaire, un peu facilement tragique et pessimiste. L'espèce d'élan final, très sec, sans affect vient un peu donner d'air à un film qui travaille une profonde asphyxie. Mais là où les Dardenne (pour prendre un cinéma voisin) creusent cette dialectique "oppression de l'ouvrier/libération de l'homme" au coeur même de leurs scénarios et leurs mises en scène, ici c'est trop manichéen, trop programmatique comme s'il fallait choisir entre être l'objet d'une société aliénante ou le moteur de sa propre vie.

3/6

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CroqAnimement votre


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MessagePosté: 27 Mai 2015, 11:36 
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Inscription: 14 Mai 2014, 10:12
Messages: 3702
Pareil. Un peu programmatique/ limité, avec cette approche à la Dardenne en moins fiévreux. ça retranscrit quand même assez bien l'emprise sur l'esprit que peut avoir ce monstre froid qu'est le système. Et la scène des caméras du supermarché est effectivement terrifiante.


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MessagePosté: 27 Mai 2015, 11:39 
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tape dans ses mains sur La Compagnie créole
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Inscription: 28 Juil 2005, 10:08
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Localisation: 26, Rue du Labrador, Bruxelles
OK je veux le voir!!

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Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"


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MessagePosté: 31 Mai 2015, 14:24 
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Inscription: 14 Oct 2007, 11:11
Messages: 8087
D'accord avec vous, Lindon est super bon, je rejoins les paroles d'Art Core sur son jeu hésitant, sa façon de buter sur les mots qui font ultra réalistes et je trouve même que ça marche avec tous les autres acteurs. Superbe direction je trouve.

Le dernier film français en salle que j'ai vu est le Desplechin et la différence est saisissante, c'est vraiment deux façons totalement opposées de diriger ses acteurs.

Pour le reste, je dois dire que j'éprouve une grosse lassitude face à ce genre de films "sociaux" un peu sur les rails. Le "propos" du film est quand même pas très original et on se rapproche par moment du mini-reportage du 13h sur pôle-emploi ou la grande distribution. ça m'a un peu saoulé et j'ai quand même eu le sentiment de perdre mon temps.

2/6


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MessagePosté: 12 Juin 2015, 14:04 
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tape dans ses mains sur La Compagnie créole
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Inscription: 28 Juil 2005, 10:08
Messages: 22722
Localisation: 26, Rue du Labrador, Bruxelles
Hmm pas totalement convaincu.
Certes, cela contient des moments forts, la photographie sociale est assez glaçante, et Lindon est formidable (tous les acteurs sont très bien dirigés d'ailleurs), mais au niveau "cinéma" je suis assez déçu. Le dispositif de mise en scène est assez pauvre, je trouve, ça se veut radical mais en fait c'est un peu n'importe quoi. Je trouve que la partie "privée" est assez ratée (la leçon de danse, pitié.. et pourquoi avoir fait du garçon un handicapé??) et la fin est un peu plouf aussi. Et puis, je préfère quand il y a une histoire.

Bref bref, j'aurais dû aller voir le Podalydès.

3/6 max

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Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"


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MessagePosté: 08 Jan 2017, 23:28 
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Petit joueur
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Inscription: 04 Jan 2017, 21:01
Messages: 30
Localisation: France
Doit-on nécessairement provoquer le dommage d’autrui pour pouvoir générer du profit ?

C’est une réponse catégorique que nous donne Stéphane Brizé avec La loi du marché. Après 18 mois de chômage, Thierry, 51 ans, se retrouve face à un dilemme lorsqu’on lui demande, en tant qu’agent de sécurité, d’espionner ses collègues.

C’est un film froid mais aussi plein d’humilité que nous sert le réalisateur. L’interprétation de Vincent Lindon y contribue d’une façon importante. C’est le seul vrai acteur dans ce film, les autres sont, pour la grande majorité, des employés de supermarché. Cela contribue à renforcer le ton réaliste du film. Pour l’anecdote il semble que les textes n’étaient pas écrit à l’avance. Une simple mise en place et Vincent Lindon laissait libre cours à son talent. L’expression « donner la réplique » n’aura jamais aussi bien porté son nom pour ces « acteurs anonymes ».

Ce film expose un face à face entre un monsieur tout le monde et le système sociétal qui est actuellement rejeté par la population.
Comme le disait Miguel de Cervantès « L’honneur et le profit ne couchent pas dans le même lit ». L’honneur étant représenté par le personnage principal s’opposant, malgré lui, au système qui est tel un rouleau compresseur. Alors le profit est il le mal ? Nous comprenons simplement qu’il n’est pas humain, pas tangible et comme ingérable par l’homme. Dans ce cas de figure peut-on vraiment reprocher au système de ne pas avoir de sentiments ?
Le danger de cet sujet est que l’on pourrait vite tomber dans le cliché qui rendrait le film distant auprès du téléspectateur. Alors comment se fait il que nous nous sentions si proche de Thierry ? Pourquoi avons nous l’impression d’avoir déjà vécu certains de ses problèmes ?


Le premier responsable est le réalisateur. En effet, en filmant constamment Vincent Lindon de profil, il laisse au spectateur la possibilité de se projeter sur la face cachée à l’écran. Stéphane Brize joue habilement avec la communication du visage et la curiosité du public.
En effet, le côté droit du visage est plutôt le côté extérieur de la personnalité et ce sont tous les instants où Thierry doit communiquer DIRECTEMENT avec l’environnement externe.
A contrario, le côté gauche, représente la partie intérieure sensible et profonde. Ce sont les scènes où le personnage doit parler de lui (entretien d’embauche, formation à la communication non verbale …). Il y a également les courtes prises de vues dans lesquelles Thierry est seul. On imagine qu’elles nous soumettent un protagoniste en pleine introspection.
On peut même aller plus loin en imaginant que toutes les scènes où Thierry est filmé de dos sont celles où il voudrait ne pas être là et même disparaître.

Le second responsable est bien sûre Vincent Lindon lui même. Il incarne à lui seul le monsieur tout le monde tout en gardant une pudeur qui incite à la confiance.
De cette addition naît une aspiration cinématographique.

La dualité présente dans la majorité des scènes fait éclore un affrontement entre l'homme (représenté par le Thierry) et le système (représenté par un individu lambda) que l'on ne voit que très peu à l'écran. Vraie volonté de ne pas imager ce système sociétal. Cette violence sociale se solde sans arrêt par une victoire du profit au détriment de l'individu. Car même si l'homme garde son honneur dans ses prises de décisions, il perd petit à petit sa place dans une société où il ne se plait plus de vivre. Une sorte de suicide social. Sa place sera en toute façon prise car après tout, on entend souvent que la nature n'aime pas le vide.

_________________
La vie est un spectacle, à toi de jouer

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