scienezma a écrit:
J'ai été pour ma part particulièrement surpris, voir choqué, par le fait que nous suivions le film à travers les tribulations d'une bande de flics. Je dois avouer que je ne m'attendais pas du tout à cela, ce n'est pas du tout l'idée que je me faisais d'un tel film, quand bien même il s'agit de montrer par la mm occasion les comportements déviants de certains des dits policiers. J'ai du mal à imaginer La Haine ou le film de Richet (ou d'autres films "de banlieue") filmés du point de vue des flics, ça me semble une grosse différence qui à ma connaissance n'a été signalée nulle part (signe des temps ?). Certains diront certainement que c'est là la force du film, pour ma part je suis plus nuancé, je me demande si ce choix est véritablement à même de créer du trouble, de bousculer les représentations médiatiques et finalement consensuelles une fois passé le choc des images (finales en particulier)...
Ce qui revient finalement à réserver le film policier aux blancs, soit au contexte bourgeois à la Chabrol, soit au fantasme catholique à la Bad Lieutenant (où la relégation sociale est une incarnation parmi d'autres du mal fondamental issu de la chute) . Malgré the Wire par exemple (auquel le film de Ly fait beaucoup penser).
Par ailleurs, je crois que quasi tous les articles ont relevé sur le film était fait du point de vue des flics, les interviews de Ly et Manenti dans les Cahiers étaient construites autour de cette question.
Sinon oui, la force et la limite du film, c'est qu'il est en plein dans le genre policier, la caractérisation des personnages suit certaines conventions canoniques.
Mais le glissement a eu lieu avant. Même si ce n'est pas un film sur la banlieue, les Derniers Parisiens de La Rumeur montraient la relation entre quelqu'un qui échappe à cet univers et vit une promotion sociale avec sa contrôleuse judiciaire. Ces films lient justice sociale collective , vieillesse des individus et restauration d'un certaine ordre finalement plus policier (au sens large de règles de comportement prises de l'intérieur, qui demandent une maîtrise technique plutôt qu'une adhésion) que politique (où l'ordre est choisi ou rejeté en commun). La valorisation de la police accentue forcément l'opposition social/politique. Cela peut déranger et rejoindre une certaine idéologie en partie réactionnaire, mais n'est pas non plus du simplisme. Articuler voir identifier police et intégration sociale ne va pas de soi.