un article un peu plus critiques que ceux lus jusque là, paru dans la rubrique éco du Temps.
iPhone, après la ferveur, les questions
MULTIMEDIA. Le prometteur téléphone d'Apple suscite de nombreuses interrogations.
Anouch Seydtaghia
Vendredi 12 janvier 2007
Trop tardif, trop cher, trop fragile... Pour de nombreux analystes et commentateurs du monde high-tech, le soufflé du lancement de l'iPhone (LT du 10.01.2007) est légèrement retombé. Si tout le monde salue les nombreuses innovations annoncées (navigation web facilitée, synchronisation avec un ordinateur...), des questions se posent sur la stratégie d'Apple (AAPL).
Passons sur le conflit avec Cisco sur le nom «iPhone», qui sera sans doute rapidement résolu. Les premières questions concernent le marché visé: lancé tard - juin aux Etats-Unis, fin 2007 en Europe, 2008 en Asie -, l'iPhone se frottera à un Motorola (MOT) devenu très compétitif dans le domaine musical avec sa gamme à succès Razr, au look très soigné. Le modèle Rizr Z6, prévu pour mi-2007, permettra d'accéder en deux clics à des sites web et de télécharger des chansons.
De son côté, Sony (6758.T) Ericsson ne cesse d'améliorer sa gamme «Walkman» avec des portables aboutis dotés d'une mémoire importante. Actif dans un marché des téléphones multimédias très concurrentiel, l'iPhone ne pourra certainement pas se battre dans la catégorie des appareils «business». Il pourra certes recevoir en direct les e-mails d'un compte Yahoo! (YHOO), mais sans doute pas de comptes professionnels. Côté prix, il coûtera au minimum 499 dollars avec un contrat de deux ans, alors que l'opérateur Cingular propose un BlackBerry ou un Samsung BlackJack similaire pour 199 dollars.
Dépendance face à Cingular
Autre souci, l'iPhone sera vendu aux Etats-Unis exclusivement par Cingular durant plusieurs années. Il s'agit certes du premier opérateur américain (58 millions de clients), mais cela limitera les ambitions d'Apple. De plus, les adolescents qui possèdent déjà un iPod débourseront-ils ces 499 dollars pour un iPhone? Casseront-ils un contrat existant chez un autre opérateur (150 dollars de frais) pour rejoindre Cingular?
Plusieurs interrogations existent aussi sur les applications qu'il sera possible d'installer sur un iPhone. Pourra-t-on l'utiliser pour des appels via Internet, via Skype par exemple? Apple risque de faire beaucoup de déçus s'il ferme son portable à des logiciels tiers.
L'iPhone sera sans doute gourmand en énergie. Or l'on ne sait pas encore quelle sera son autonomie en mode veille, et surtout s'il sera possible de remplacer sa batterie, ce qui n'est pas le cas avec l'iPod, par exemple.
Présent sur un marché nouveau pour lui, Apple - qui vient de rayer le «Computer» de son nom - prend des risques certains, d'autant qu'il ne maîtrisera pas totalement son produit, de la production au consommateur. Mais si elle réussit effectivement à proposer un téléphone facile à utiliser, à synchroniser avec son ordinateur, et pratique pour naviguer sur Internet, la firme de Steve Jobs lancera un sérieux défi aux fabricants traditionnels de portables en lançant de nouveaux standards.
|