Dung che sai duk en VO
C'est l'histoire de eeeeeeuuuuuuuuhhh......En prépa, le mois précédant mon premier court de fiction tout moisi, j'ai fait quasi toutes les nuits le même cauchemar : je me retrouvais sur le tournage et je me rendais compte que j'avais oublié de finir le scénar, ou au moins de le prendre avec moi. D'ailleurs je n'avais pas encore pris le temps de rencontrer les comédiens, mais tout le monde était là, entrain de préparer le plan, alors il fallait sauver les meubles et faire comme si tout était prévu, en essayant d'inventer en deux temps trois mouvements un semblant de scène, sans vraiment savoir de quoi ça parle, ce qui s'y passe, ni même où ça pouvait bien se dérouler. Les acteurs tout aussi perdus que moi, que je filmais simplement dans des vagues poses, d'ailleurs c'est même pas le bon décor, mais allez, faut avoir fini à la fin de la journée, alors on tourne...
J'ai très précisément l'impression que ce film a été tourné comme dans mon cauchemar. Le personnage qui arrive en début de film pour s'infliger une cuite monumentale à base de perte de mémoire définitive, semble lancer les rails d'un film au diapason : une beuverie. Quelle surprise alors de voir que la méthode donne quelque chose qui a de la gueule, et pas qu'un peu.
Wong Kar Wai, ce que j'en ai vu, le déferlement plastique a toujours quelques chose de réprimé : froideur glacée d'
In the mood for Love, sécheresse des saccades de
Chuncking Express, distance pop et rétro de
2046, sobriété relative du (sublime)
Happy Together... Et là c'est la première fois que je vois son cinéma se déverser comme ça sans retenue aucune, dans un lyrisme visuel complètement déraisonnable, sans aucune gêne en fait. C'est vraiment ça, un déluge : de plans, de situations, de vagues idées qui s'entrecroisent puis repartent... Curieux de voir ce film pas si longtemps après le dernier Malick, et de se dire que ce gros projet malade, par accident, entame finalement la voie d'une narration très libre pas très éloignée de celle du texan.
Le film est donc à l'image de ses personnages : nomade. Tout se ballade à l'improviste, se confond en jeux de doubles. Et je trouve finalement assez touchant la façon dont on refait doucement connaissance avec ce qui peut ressembler à un récit, à une histoire, quand les tenants et aboutissants (tout de même très vagues) de ce méli-mélo émergent ci-et-là, donnant sens à des scènes antérieures, les chargeant de pertinence tout en leur enlevant l'innocence de la liberté qui ne les mêlait en rien au reste du film. Je pense notamment à la jolie partie hivernale, qui semble répondre dans sa simplicité doucement crue à la fièvre continue du reste du film, lui enlevant sa part de jeunesse et d'imprévisible en faisant rentrer ses différents éléments au sein d'un récit, en reliant les personnages... Plus il avance, plus le film prend sens, plus cet "atterrissage" confère à l'ensemble une tonalité mélancolique.
C'est sans doute ce que j'ai vu de plus aimable de Wong Kar Wai, et néanmoins le film souffre d'immenses défauts qui le foutent la plupart du temps à terre. La musique surtout, utilisée de manière kitchissime, s'ébahissant à coup d'extotisme toc et sur-lyrique quand, la moitié du temps, le spectateur ne sait pas pourquoi il est censé fondre en larmes. Et puis le bordel ambiant aussi, qui fait quand même sur son chemin pas mal de dégâts. Mais le film, aussi éventré soit-il par sa genèse impitoyable, reste un très beau projet de redigestion du genre pour l'amener ailleurs (même si en un sens ça suit en partie le chemin d'un Tsui Hark). C'est une belle idée de film, et les quelques scènes de combats (même si rares) sont hautement motivantes.
PS : j'ai découvert le film dans sa version redux, et ne sait donc pas exactement ce qui y manque, ou si les rajouts sont pertinents. J'ai aussi des doutes sur la bande-sonore, un 5.1 qui me semble crouler sous les rajouts récents, vu les différences de textures de certains sons...
Connexion
FAQ
Rechercher
), ca doit vraiment donner lieu à une vision radicalement différente - plus immersif, plus kitsch aussi, en tout cas ça rend le film beaucoup moins "abstrait".
