GROAR
Irena retrouve son frère Paul à la Nouvelle-Orléans. Dans les jours qui suivent, une mystérieuse panthère tue une prostituée. L'animal se révèle avoir d'étranges liens avec Paul et Irena.
Dès le prologue on se retrouve en étrange terre, avec un goût d'
Exorciste II dans le décalage kitschouille...et le film restera toujours un peu en décalage de tout.
En gros, Schrader relit le Tourneur en retournant à l'envers tout ce qui pouvait y être à l'endroit (et inversement). Tout dans le Tourneur, dans la forme et le scénario, joue sur le non dit, la suggestion. Qu'il s'agisse des séquences d'horreur, de la façon de stimuler l'imaginaire en créant un mythe, dans sa façon de mettre en scène les ombres, dans le sous-texte sexuel du film, névrose ou lesbianisme, violence hors champs, tout marche par réseaux sous-terrains. Chez Schrader, tout se passe cash.
Le jeu d'ombre tourne à la forme ULTRA 80's avec sa lumière verte qui inonde la Nouvelle Orléans, et rouge pour les parenthèses mythiques, le mythe justement est agrémenté des bouts ici ou là (création du frère) et exploré explicitement là où avant tout était laissé à l'imaginaire (les scènes de sacrifice etc...), le cul est partout et c'est absolument plus un sous-texte, la violence est dans le champ. C'est vraiment la recréation d'une même histoire à partir de moyens parfaitement différents, de ce point de vue là le travail de Schrader est assez fascinant.
Plus convaincant en tout cas quand il prend ses distances car tout ce qui tient de la citation directe du Tourneur s'effondre assez lamentablement. Le plan des talons qui claquent de nuit est rapidement détourné, et la scène du bus semble être juste un clin d'oeil (enfin j'espère). Mais la reprise du
Moja sistra lancé par une femme mystérieuse à Irena, géniale rupture dans l'originale, et fournissant d'autres indices sur le mythe, est d'abord surligné par la conversation sur les lesbiennes avec la copine, ensuite totalement foirée vu que l'apparition n'a AUCUN effet. La séquence de la piscine est, elle, reprise presque façon Van Sant qui refait
Psycho, mais avec aucune tension, quasi aucune inquiétude (alors que l'originale est une des meilleures séquences du genre à mon sens, dans l'utilisation des reflets, l'univers sonore, la progression et le découpage...). Schrader rajoute juste une nana qui montre ses seins, commentant ceci par un jeu pervers sur le voyeurisme du spectateur...mouais.
Tout ce qui est cul à l'écran sonne souvent comme du racolage. Après, l'esthétique vulgos 80's fait que. Mais bon...globalement il y a souvent le sentiment que tout ce qui est accentué (le cul, le sang) est assez vain. Un côté, "on a ajouté trois tétons et 4 giclures et pouf, on a refait le monde". En ayant vu l'original, ça donne parfois une approche un chouille plus bêta du sujet. Plus, "mettons-y nos deux gros sabots". Comme les rajouts sur la mythologie me semble pas indispensables, et l'ajout du frère, finalement assez superflu.
Après le film a une structure tellement zarb, une façon de jouer sur l'étrangeté poétique, entre le visuel très daté et la musique très très datée de Moroder, que...malgré les défauts, il y a quelque chose d'assez envoûtant. Kinski (même si je préfère 100 fois Simone Simon) comme McDowell, félins, sont bien castés, John Heard est beaucoup plus fade. J'aime pas du tout la fin non plus mais bon...je trouve le film assez passionnant, même dans ses ratages. Formellement il y a un défi qui est bien tenu.
4/6
Par ailleurs, mauvaise foi assez exceptionnelle de Schrader en tout cas dans les bonus qui regrette l'accueil critique de l'époque et se dit qu'il aurait très bien pu donner un autre titre au film vu que, en gros, c'est pas tellement un remake du Tourneur. Hum l'argument, le sous texte sexuel, la reprise exacte de certaines scènes, ça doit être un malentendu alors.
Le pire c'est de lire ensuite un Malausa sur Chronicart qui, du coup, t'affirme tout fort et avec assurance que le film ne "doit en aucun cas être considéré comme un remake du film de Tourneur". Mais bien sûr mon gars, et le
Diabolique de Chechick il est arrivé par l'opération du saint esprit aussi!
*ah ouais mais non c'est pas vraiment pareil regarde y'a Sharon Stone à la place de Signoret*