Forum de FilmDeCulte

Je retrouve exactement les mêmes qualités et les mêmes défauts que dans le premier opus. DeBlois a un immense talent des situations : des configurations lyriques qui permettent aux personnages d'exprimer l'amour, la confiance et l'admiration qu'ils ont les uns pour les autres, sans que la scène ne consiste seulement à le leur faire formuler.

Ces situations fortes, on les retrouve ici posées bout à bout, embouteillées dans une structure constipée qui peine à créer un souffle d'ensemble (je rejoins deudtens et boultan sur les gros problèmes du scénar). Surtout, je trouve encore une fois la force du film entravée et étouffée par des conventions de DA dont DeBlois n'a pas encore réussi à se débarrasser. Pas assez d'épure, pas assez de confiance dans ce qui fait l'identité des scènes : il faut toujours qu'il y ait à l'arrière-plan un gag qui compense, il faut toujours que la séquence exploite automatiquement, bêtement, tout ce qu'elle peut offrir d'épate ou de spectaculaire (plutôt que de se concentrer sur ce qui fait sa force intrinsèque), il faut toujours cette verbalisation des enjeux et des thématiques (ultra laborieuse première scène Hiccup-Astrid...).

En regardant les belles études d'ambiance qui défilent au générique de fin, je me disais que le film aurait du ressembler à ça : pas pour l'aspect (le côté crayonné/peint), ou dans l'idée d'un film poético-esthète-éthéré, mais simplement pour la capacité de ces dessins à poser l'identité d'une scène et à s'y tenir, sans se saturer et se remplir comme par la peur de ne pas offrir assez au spectateur. Je pense par exemple à la première rencontre avec la mère, situation génialement trouvée là encore : ne pas la découvrir d'emblée mais en passer par ce masque, ces cérémoniels, qui donnent immédiatement une image étrange, horrifique et presque tribale de la maternité. C'est déjà une scène en soi très convaincante, mais c'est typiquement le genre de moments où je me demande pourquoi Deblois ne va pas à fond dans le sillon qu'il a lui-même creusé : pourquoi avec de telles cartes en main il n'en fait pas une scène tétanisante, pourquoi il ne se donne pas le temps pour (quand on se tape une course inutile en ouverture...). Pourquoi le suspense de l'énigme et le danger de ces dragons réunis (= des questions très fonctionnelles de scénar) prennent forcément le pas sur le trouble et la sidération de la situation, qui ont ici bien plus de valeur narrative ?

Ça reste évidemment émouvant, vraiment drôle, bien foutu, mais comme pour le premier, assez frustrant.

Quel bonheur cette suite. Même s'il faut accepter quelques raccourcis scénaristiques - la mère en mode princesse mononoké, le méchant un peu standard - il y a tellement d'idées de mise en scène, d'amour pour l'animation (et les dragons), de rythme et d'émotion que cela se place tout en haut du panier. Je regrette de ne pas l'avoir vu en 3D du coup.

5/6