Forum de FilmDeCulte

Mon premier M-C Treilhou, j'aurais pas misé un kopeck dessus, vu comme le sujet ne me passionne pas une seconde. Mais la réputation de la réalisatrice, entendue de la bouche de gens que j'estime, m'a finalement amené en salles...

Et j'avoue que je suis assez bluffé par ce que j'ai vu. C'est donc un documentaire patient et précis sur le travail de l'Orchestre de Paris, où l'on suit les musiciens et tous les gens qui gravitent autour d'eux, du chef d'orchestre à la standardiste, au fil de leurs séances de travail depuis leur concours de recrutement jusqu'à des concerts prestigieux. Le film est un modèle de rigueur et de simplicité, qui ne s'égare jamais sur les chemins convenus du reportage, comme dit Pascale Bodet dans sa très juste critique dans Chronic'art, c'est le travail, le concret, le geste, la progression qui intéressent Treilhou, elle se contrefout des sempiternelles interviews face caméra, ou des à-côtés, de la vie qui suit son cours, de comment c'est un musicien qui mange, un musicien qui dort, etc.

En cela le film a quelque chose à voir avec les meilleurs Depardon, cette observation régulière, sans relâche, d'une fourmillère respectée et admirée jusque dans ses plus petits détails.

Si bien que ce n'est jamais chiant, toujours captivant, des micro-intrigues se nouent et se dénouent, des luttes de position, par ex, avec ce trombone qui n'accepte pas la nouvelle disposition des pupitres, ou ce suspense : ce chef d'orchestre qui a perdu ses bagages dans l'avion pourra-t-il malgré tout récupérer des lentilles et un habit pour le concert de dans quelques jours? Ca paraît ridicule dit comme ça, mais Treilhou nous embarque tellement à leurs côtés que ces enjeux prennent un poids considérable pour le spectateur.

et puis Treilhou est gâtée par le décor : d'un point de vue esthétique, les lieux sont un régal. Jeux de lumières inattendus, acoustique exceptionnelle, architecture magnifique... Il est d'ailleurs remarquable qu'en de telles circonstances, elle parvienne à résister à la tentation de la suresthétisation. Ses cadres sont magnifiques mais jamais m'as-tu vu, ses mouvements d'appareil jamais pédants, toujours carressants, enveloppants, doux. Il n'y a pas de fausse distance : à savoir pas de gros plans abusifs ni de recul excessif et moqueur. Le film est aussi concentré et sérieux que le sont les musiciens, et c'est ce qui emporte le pli, émeut, concerne...

Après j'avoue qu'il y a peut-être une vingtaine de minutes en trop, les deux heures s'y font alors sentir... Mais globalement, c'est assez impressionnant d'aisance, de simplicité, d'évidence et de rigueur.

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