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 Sujet du message: City Girl (F.W. Murnau - 1930)
MessagePosté: 08 Mar 2011, 00:16 
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Également titré L'intruse en France...

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Lem Tustine, un paysan dominé par un père autoritaire, se rend en ville pour vendre le blé familial. Il en revient avec une jeune épouse...


Putain de belle surprise, tant ce film était vendu comme un opus mineur, sorte de bonus discret à la perfection de L'aurore. Est-ce qu'il a la même ambition, je ne sais pas, mais il en a assurément le talent. Un talent tel que durant un moment, notamment durant la première partie en ville, Murnau semble presque être en mode Paranoïd Park : la puissance esthétique des plans est fine, vivante, délicieuse, surprenante, joueuse aussi (des essais un peu tous azimuts), au point qu'on ait d'abord un peu l'impression d'un sujet prétexte à expérimenter formellement.

Mais parce que le mélodrame n'est pas cloisonné de toutes parts, parce que le film partage l'idéalisation puis les désillusions de la citadine rêvant sincèrement d'un retour aux sources, parce que ses personnages se battent pour être heureux, le film n'a pas la froideur de l'exercice de style. Ses moments de mise en scène les plus éblouissants sont d'ailleurs ceux liés aux emportements de personnages : la poursuite euphorique dans les blés, la chevauchée nocturne affolée, tout ces passages où le lyrisme est à son maximum.

La deuxième belle qualité du film, c'est paradoxalement sa simplicité. C'est aussi ce que j'adorais dans Tabou : Murnau se pose, simplifie ses situations, rarifie ses effets, trouve visiblement avec plus d'aisance le bon angle, le bon cadre, le bon dosage pour faire immédiatement chanter le potentiel de la scène avec élégance (là où auparavant je le trouvais parfois, et ce même dans L'aurore, un peu enclin à se laisser aller à l'imagerie des situations sans toujours réellement se les approprier, sans les affiner). Je dirais même que, de ce fait, c'est sans doute un des mélos muets le moins "patauds" que j'ai pu voir (si on peut en faire un défaut, tant ce côté charal fait partie de la personnalité du genre), avec Le vent peut-être (film d'ailleurs presque jumeau). La faible durée du film doit bien aider aussi (on ne s'attarde pas cent ans sur les problèmes ; je pense par exemple aux tentatives des moissonneurs, réduites au minimum, presque immédiatement amenées au stade des conséquences et de la résolution).

Mais surtout, comme pas mal d'œuvres de la fin du muet, le film marque par son côté onirique, total, presque cosmique (l'homme face aux éléments, la petite histoire qui se fait parabole de l'humanité toute entière). Et tout ça sans frimer, à partir de deux-trois idées simplissimes... C'est un des trucs qui font que j'aime vraiment le style Murnau : on a cette maison pauvre et cradoc, ses conflits internes et familiaux, bref, le décor presque habituel du mélo, et il suffit d'y apposer tout autour cet immense champ à perte de vue, image mentale constamment posée là, en arrière-plan, derrière une fenêtre ou une porte ouverte, pour donner à la petite histoire cette dimension abstraite et universelle. C'est très simple, c'est évident, et ça marche du tonnerre.

Peut-être que je m'enthousiasme un peu sur le coup de la vision, il manque probablement au projet une sorte d'ampleur qui le mènerait plus haut, et on peut aussi se dire que le final (retournement bienvenu) se fait un peu trop aisément, trop rapidement. Faut voir comment ça vieillit.


Pour l'instant c'est du 5++/6





Sinon, pour changer, la musique d'accompagnement est ignoble, coupez le son.


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MessagePosté: 27 Avr 2016, 17:53 
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Sir Flashball
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Inscription: 23 Déc 2013, 01:02
Messages: 23851
Comme Tom.
Je crois même que je préfère ce film à L'aurore, dont les expérimentations formelles ont tendance à me sortir de l'histoire. Ici, la simplicité de l'intrigue, qui confine à l'épure, permet de tout magnifier, de toucher à la transcendance (ces champs de blé qui ceinturent les personnages, qui transforment l'histoire en parabole).

Allez, on regrettera cette fin trop rapide, trop facile. Mais c'est vraiment pour chipoter.

Chef d'oeuvre.

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"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
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MessagePosté: 09 Mai 2019, 16:06 
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Inscription: 30 Déc 2015, 16:00
Messages: 8291
Presque comme Castorp et Tom.

Mon appréciation de Murnau est tout de même radicalement opposée entre ses périodes allemande (dont je n'ai pas tout vu, j'espère que Le Dernier des hommes ou Faust me feront réviser mon opinion) et hollywoodienne. Autant j'ai un mal fou avec Nosferatu par exemple, dont je déteste à un tel point le jeu des acteurs qu'il finirait presque par occulter tout ce qu'il y a de beau dans le film, dans City Girl, encore plus que dans L'Aurore (qui est vraiment à la frontière entre les styles), le naturalisme des acteurs vient magnifier une plus grande sécheresse de la mise en scène (j'allais écrire ascèse mais on n'est pas chez Bresson ou Dreyer non plus) qui s'est totalement débarrassée de ses oripeaux expressionniste. Et ils sont vraiment tous très bons, et très justes. Non seulement les deux acteurs principaux (incompréhensible - ou pour le moins regrettable - que la carrière de Mary Duncan n'est pas pris son envol après ce film tant elle y excelle), mais des parents (le regard de la mère lorsqu'elle supplie son fils de laisser filer après les premiers emportements du père) aux moissonneurs, il n'y en a pas un qui dénote ou surjoue. Tout comme la mise en scène de Murnau qui limite à l'essentiel ses effets.

Et cela donne une œuvre d'un lyrisme qui m'émerveille totalement, j'ai beau me creuser les méninges j'ai bien du mal à trouver des films qui puissent rivaliser sur ce point avec le diptyque L'Aurore/City Girl. Comme le sentiment d'une plénitude, d'une perfection absolue que le cinéma muet (les meilleurs réalisateurs en tout cas) avait alors atteint. Ironiquement, ces derniers films muets (City Girl en l’occurrence, L'Aurore ayant été un succès public) ont été fait à une époque où le parlant était en plein essort, et on globalement été des fours (Les Damnés de l'océan de Von Sternberg, La Symphonie nuptiale de Von Stroheim ce qui nous vaut de ne plus pouvoir voir sa deuxième partie).

Pour en revenir aux critiques de Tom et Castorp, les deux s'accordent sur une fin trop abrupte, avis que je ne partage pas. Au contraire je trouve que ce retournement survient de manière tout à fait logique vue la pureté des sentiments exposés (Elle n'a pas besoin de plus qu'une confirmation de l'amour de son mari pour la convaincre de revenir). Tom fait également le parallèle avec Le Vent de Sjöström, j'y ai également pensé, mais je préfère néanmoins assez largement City Girl (on pourrait directement comparer la première scène où Lilian Gish est dans la cariole avec les deux prétendants dans Le Vent avec celle bien plus belle de l'arrivée des moissonneurs dans City Girl). Là où je ne rejoins pas Castorp, c'est que L'Aurore reste plus impressionnant et mon préféré de Murnau, de la première à la dernière seconde (City Girl commence pour moi une fois qu'il arrive dans la ville, le début dans le train est un peu de trop).

Chef d’œuvre quand même.

6/6


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MessagePosté: 10 Mai 2019, 08:56 
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Localisation: In the Oniric Quest of the Unknown Kadath
Comme Tom, Castorp et Lohmann, c'est un film merveilleux. Je lui préfère L'aurore mais ça reste immense. Faut que je choppe le blu ray (s'il existe).

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MessagePosté: 10 Mai 2019, 09:13 
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Le Carlotta n'est plus dispo par contre il y a un édition anglaise


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MessagePosté: 10 Mai 2019, 09:21 
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Inscription: 24 Nov 2007, 21:02
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Localisation: In the Oniric Quest of the Unknown Kadath
Ouais le coffret Carlotta avec L'aurore est introuvable :(.

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