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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 10:55 
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Sir Flashball
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Ilouchechka a écrit:
Cela dépend ce que l'on entend par Bourgeoisie et normes bourgeoises, mais l'idéal Bourgeois est dominant depuis bien longtemps, en sus d'être à l'origine du mouvement de fond que tu évoques.


Ce qui ressort aujourd'hui de la norme du reportage, c'est la peur des barbares et la préservation du pouvoir d'achat face au déclin.
Ca n'a rien de Bourgeois, à mes yeux.

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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 11:42 
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Tu donnes le bâton pour te faire battre là.

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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 11:44 
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Dans petite-bourgeoisie il y a bourgeoisie...


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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 12:49 
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Baptiste a écrit:
Ce qui est intéressant dans les films, c'est de voir les lignes de fracture, les arêtes. Le souci avec la "pensée dominante", la "norme", comme l'appelle Tetsuo, c'est qu'elle recouvre tout d'un voile anesthésiant, pour que tout paraisse couler de source, et qu'on se laisse aller.


Tu as quand même de nombreux styles cinématographiques dont les aspect admirable ont pu être leur "invisibilité" et leur fluidité, mais pour autant ils ne sont pas spécialement au service de "la norme" :| A la limite, ce qui est le plus conventionnel, c'est souvent je dirais le style où les "arêtes" et les "lignes de fractures" sont le plus grossièrement établies.

Sinon on oublie aussi le cas des nombreux films au style faussement documentaire capable de jouer la fiction ou quelque chose de mixte, un entre-deux, façon Punishment Park de Watkins ou Milestones de Kramer... Le premier est assez caricatural et à la limite du tract, très conscient du dispositif je trouve, mais dans le second on sort vraiment de là en étant bluffé, on ne sait pas ce qui est du registre de l'un ou de l'autre en ayant suivi ces différents groupes, surtout quand arrive la scène d'accouchement final... Et politiquement, c'est extrêmement amer tout en restant révolté. Et pourtant, ce qui ressort, c'est l'espèce de fluidité qu'a mis en place Kramer (et son co-réal John Douglas).

Dans des films de "fiction" comme Shara de Kawase ou Taking Off de Forman, c'est un peu pareil, les conventions documentaires / fictions se diluent, il n'y a qu'un flux qui est assez troublant dans son ambiguïté, et une narration d'une fluidité assez confondante pour inétgrer du réel en "bloc".


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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 12:56 
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Schtroumpf sodomite
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Tom a écrit:
Sur la multitude de documentaires de création penchés sur le sort d'une entreprise en difficulté (et dieu sait qu'il y en a un tas...), existe-t-il ne serait-ce qu'un film épousant le regard (les angoisses, les problèmes, les questions) d'un patron ? Quand j'avais discuté pour la première fois de ça avec un programmateur de festival doc, et que je parlais de la possibilité de filmer les patrons, son premier réflexe avait été de me répondre : "Oui, filmer l'ennemi". Ça m'avait frappé, mais pas seulement pour l'incompréhension mutuelle dont ça témoignait.

Car quand bien même de multiples documentaristes (dont les meilleurs) vont le filmer comme un ennemi, ce patron, j'entends bien que ce ne sera pas forcément là leur but, au sens d'un positionnement politique à affirmer. Que leur cinéma sera sûrement entrain de me raconter tout autre chose, quelque chose de totalement singulier et personnel, et qu'il se trouvera par hasard, en passant, dans les recoins de ce point de vue-là, sur les bordures de cette vision-là, que le patron est l'ennemi (pas dans le discours, mais par la simple façon dont on l'aborde : la façon dont on l'approche, la distance à laquelle on l'observe, etc.). Cela ne devrait finalement pas réellement m'intéresser, c'est se focaliser sur quelque chose qui n'est pas ce dont le cinéaste me parle - et puis "l'ennemi", c'est un statut vague qui peut recouper d'infinies nuances et ambiguïtés de point de vue. Il reste néanmoins, une fois faits les comptes, ce constat : le patron est l'ennemi (l'autre, l'adversaire, le danger, le système...) sur la quasi-totalité de la production. Et c'est cela qui m'interroge (en tant que symptôme à l'échelle de la production, donc, pas en tant que problème chez les cinéastes eux-même - les cinéastes pensant évidemment ce qu'ils veulent...).


Je me suis un peu intéressé au documentaire cette année mais j'avoue que ce n'était pas tellement le genre de sujet abordé. Après, j'aimerais bien te dire que la réponse est peut-être parce que, le patron, en tant qu'entité visible de l'autorité bourgeoise, en tant que représentant officiel de la hiérarchie sociale normative, EST l'ennemi, et qu'aucune esthétique ne peut être conciliante vis-à-vis de cette figure symbolique (ce qui est différent de l'individu). Mais, je doute cependant que tous les réalisateurs de docu aient une sensibilité marxiste aussi poussée que la mienne, donc ça ne doit être qu'une projection idéaliste de ma part.

Le réponse tient peut-être dans cette célèbre définition de Deleuze : "Etre de gauche c’est d’abord penser le monde, puis son pays, puis ses proches, puis soi ; être de droite c’est l’inverse." Ce qui me semble la démarche même du documentaire.

Citation:
Citation:
Michael Moore c'est l'exemple parfait du contestataire qui est dans la norme (d'où sa nullité esthétique). La norme, c'est avant tout la perversion.

Quand tu me parles de norme, quelques messages plus haut, tu parlais donc bien de norme esthétique ? (sans faire abstraction de l'idéologie que cette esthétique exprime, mais j'avais cru en te lisant que tu parlais de norme idéologique dans l'absolu, vu que tu parlais de pensée dominante)


Non, je parle bien de norme dans l'absolu. J'y reviendrai et répondrai aux autres plus tard, quand j'aurai le temps.

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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 13:15 
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Sir Flashball
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Tetsuo a écrit:
Etre de gauche c’est d’abord penser le monde, puis son pays, puis ses proches, puis soi ; être de droite c’est l’inverse.


Ca, ça me paraît surtout une belle façon pour l'homme de gauche de se faire mousser.

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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 13:32 
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Castorp a écrit:
Ca n'a rien de Bourgeois, à mes yeux.


Pour que l'on puisse situer bien les choses, comment définis tu la Bourgeoisie (ou, plus exhaustivement ce qui appartient au monde Bourgeois) ?

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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 13:46 
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Sir Flashball
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Disons que j'associe plus le bourgeois à une idée de jouissance de la richesse qu'à un effondrement lent et une perte progressive du capital.
Chez le bourgeois, il y a donc cette idée d'ostensible, mais aussi de désir de toujours plus. Je ne crois pas que la période actuelle soit propice à une lecture bourgeoise des habitudes de la classe moyenne, qui lutte ici simplement pour sa survie (ce qui se sent dans le reportage, de plus en plus strident).

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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 16:01 
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Tetsuo a écrit:
Je me suis un peu intéressé au documentaire cette année mais j'avoue que ce n'était pas tellement le genre de sujet abordé. Après, j'aimerais bien te dire que la réponse est peut-être parce que, le patron, en tant qu'entité visible de l'autorité bourgeoise, en tant que représentant officiel de la hiérarchie sociale normative, EST l'ennemi, et qu'aucune esthétique ne peut être conciliante vis-à-vis de cette figure symbolique (ce qui est différent de l'individu).

Ok, je vois. Mais je doute de cette exclusivité, dans le sens où il ne tient qu'au réal de regarder, ou non, le monde de l'entreprise à travers le filtre des questions d'autorité, de pouvoir, et des rapports de classe (même si l'on peut être convaincu, toi comme moi, que ce sont des questions que toute entreprise pose fondamentalement : il reste qu'on est pas seuls sur Terre, et que d'autres façons de penser le monde existent). J'ai pas d'exemple là tout de suite sous la main, mais on ne devrait pas avoir de mal à trouver de fiction américaine où le patron qui monte sa boîte est d'abord un leader (vision alternative qu'on retrouve assez souvent dans la figure ambivalente du général d'armée, par exemple : une figure qui réunit les forces, qui soulève l'énergie, qui entraîne) avant d'être une autorité. En gros, la question n'est pas tant de savoir si un cinéaste de documentaire peut switcher de bord dans sa grille de lecture marxiste, mais de savoir s'il peut avoir une autre grille de lecture tout court.

Citation:
Le réponse tient peut-être dans cette célèbre définition de Deleuze : "Etre de gauche c’est d’abord penser le monde, puis son pays, puis ses proches, puis soi ; être de droite c’est l’inverse."

Je la connaissais pas, et peut-être que je la comprend mal, mais à première vue je t'avoue que je la trouve un peu niaise... Un libéral est profondément convaincu qu'une compétition entre les citoyens d'une société est le meilleur moyen pour que l'ensemble de cette société, par émulsion, s'élève. Il s'agit tout autant de penser le monde, il n'est pas forcément intéressé que par ses fesses.


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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 17:02 
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Oui, mais un libéral n'est pas forcément une personne de droite.


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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 17:06 
Une meilleure question serait plutôt "à qui s'adressent les documentaires de gauche"? Par exemple "Reprise" de le Roux semble s'adresser principalement aux ex-établis qui ont pris conscience de leur échec, et à l'inverse le film de William Klein sur mai 68, fait en live, semble s'adresser à des "générations futures" pour lesquelles le contexte de l'évènement serait perdu, en transformant très tôt les faits en récits.


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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 17:12 
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Tom a écrit:
Je la connaissais pas, et peut-être que je la comprend mal, mais à première vue je t'avoue que je la trouve un peu niaise... Un libéral est profondément convaincu qu'une compétition entre les citoyens d'une société est le meilleur moyen pour que l'ensemble de cette société, par émulsion, s'élève. Il s'agit tout autant de penser le monde, il n'est pas forcément intéressé que par ses fesses.


Non mais tu te doutes bien que quelqu'un comme Deleuze va pas se contenter de dire être de gauche = avoir du coeur. Il s'agit essentiellement de perception, et pas de morale. En gros, être de gauche c'est le fait de spontanément penser le monde à l'échelle globale avec ses tenants et ses aboutissants (de manière plus ou moins réussie, il s'agit pas de dire que ce sont des Superman de la pensée). Le libéral est quelqu'un de droite dans le sens où la défense de la compétition à tous les niveaux se justifie par le bien-être individuel; c'est assez subtil mais le projet libéral n'a pas vocation au bien commun, il estime que l'intérêt général c'est qu'il faut que les plus forts s'élèvent au-dessus des moins forts pourvus que la règle du mérite soit respectée, et que chacun puisse accepter cette règle du jeu s'il ne connaissait pas sa situation (John Rawls et son voile d'ignorance).


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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 17:54 
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Castorp a écrit:
Disons que j'associe plus le bourgeois à une idée de jouissance de la richesse qu'à un effondrement lent et une perte progressive du capital.
Chez le bourgeois, il y a donc cette idée d'ostensible, mais aussi de désir de toujours plus. Je ne crois pas que la période actuelle soit propice à une lecture bourgeoise des habitudes de la classe moyenne, qui lutte ici simplement pour sa survie (ce qui se sent dans le reportage, de plus en plus strident).


Si plusieurs types de bourgeoisies existent et se sont succédés au pouvoir depuis la fin de la monarchie, l’idéologie bourgeoise est à mon sens toujours prégnante, et plus que jamais d'ailleurs vu qu'on ne la nomme plus du tout.

Roland Barthes a écrit:

"Or, il se produit dans la dénomination de ce régime, un phénomène remarquable : comme fait économique, la bourgeoisie est nommée sans difficultés : le capitalisme se professe. Comme fait politique, elle se reconnait mal : il n’y a pas de partis « bourgeois » à la chambre. Comme fait idéologique, elle disparaît complètement : la bourgeoisie a effacé son nom en passant du réel à la représentation, de l’homme économique à l’homme mental : elle s’arrange des faits, mais ne compose pas avec les valeurs, elle fait subir à son statut une opération véritable d’ex-nomination : la bourgeoisie se définit comme la classe sociale qui ne veut pas être nommée. « Bourgeois », « Petits-bourgeois », « capitalisme», « prolétariat», sont les lieux d’une hémorragie incessante : hors d’eux le sens s’écoule, jusqu’à ce que le nom en devienne inutile.
(p.211 – Mythologies)



Le désir de toujours plus est un désir commun à tous, et pas circonscrit à la bourgeoisie à mon sens :) Et je n'évoque pas une lecture bourgeoises des habitudes de la classe moyenne mais indique que les habitudes de la classe moyenne sont des habitudes bourgeoises, et/ou définies par l'idéologie bourgeoise:

Roland Barthes a écrit:

C'est une illusion de réduire la culture dominante à son noyau inventif: il y a aussi une culture bourgeoise de pure consommation. La France tout entière baigne dans cette idéologie anonyme : notre presse, notre cinéma, notre théâtre, notre littérature de grand usage, nos cérémoniaux, notre Justice, notre diplomatie, nos conversations, le temps qu'il fait, le crime que l'on juge, le mariage auquel on s'émeut, la cuisine que l'on rêve, le vêtement que l'on porte, tout, dans notre vie quotidienne, est tributaire de la représentation que la bourgeoisie se fait et nous fait des rapports de l'homme et du monde. Ces formes « normalisées » appellent peu l'attention, à proportion même de leur étendue ; leur origine peut s'y perdre à l'aise : elles jouissent d'une position intermédiaire : n'étant ni directement politiques, ni directement idéologiques, elles vivent paisiblement entre l'action des militants et le contentieux des intellectuels ; plus ou moins abandonnées des uns et des autres, elles rejoignent la masse énorme de l'indifférencié, de l'insignifiant, bref de la nature. C'est pourtant par son éthique que la bourgeoisie pénètre la France : pratiquées nationalement, les normes bourgeoises sont vécues comme les lois évidentes d'un ordre naturel : plus la classe bourgeoise propage ses représentations, plus elles se naturalisent. Le fait bourgeois s'absorbe dans un univers indistinct, dont l'habitant unique est l'Homme Eternel, ni prolétaire, ni bourgeois.

C'est donc en pénétrant dans les classes intermédiaires que l'idéologie bourgeoise peut perdre le plus sûrement son nom. Les normes petites-bourgeoises sont des résidus de la culture bourgeoise, ce sont des vérités bourgeoises dégradées, appauvries, commercialisées, légèrement archaïsantes, ou si l'on préfère: démodées. L'alliance politique de la bourgeoisie et de la petite-bourgeoisie décide depuis plus d'un siècle de l'histoire de la France : elle a été rarement rompue, et chaque fois sans lendemain (1848, 1871, 1936). Cette alliance s'épaissit avec le temps, elle devient peu à peu symbiose ; des réveils provisoires peuvent se produire, mais l'idéologie commune n'est plus jamais mise en cause : une même pâte « naturelle » recouvre toutes les représentations « nationales » : le grand mariage bourgeois, issu d'un rite de classe (la présentation et la consomption des richesses), ne peut avoir aucun rapport avec le statut économique de la petite-bourgeoisie : mais par la presse, les actualités, la littérature, il devient peu à peu la norme même, sinon vécue, du moins rêvée, du couple petit-bourgeois. La bourgeoisie ne cesse d'absorber dans son idéologie toute une humanité qui n'a point son statut profond, et qui ne peut le vivre que dans l'imaginaire, c'est-à-dire dans une fixation et un appauvrissement de la conscience1. En répandant ses représentations à travers tout un catalogue d'images collectives à usage petit bourgeois, la bourgeoisie consacre l'indifférenciation illusoire des classes sociales : c'est à partir du moment où une dactylo à vingt-cinq mille francs par mois se reconnaît dans le grand mariage bourgeois que l'ex-nomination bourgeoise atteint son plein effet.
La défection du nom bourgeois n'est donc pas un phénomène illusoire, accidentel, accessoire, naturel ou insignifiant : il est l'idéologie bourgeoise même, le mouvement par lequel la bourgeoisie transforme la réalité du monde en image du monde, l'Histoire en Nature. Et cette image a ceci de remarquable qu'elle est une image renversée2. Le statut de la bourgeoisie est particulier, historique : l'homme qu'elle représente sera universel, éternel ; la classe bourgeoise a édifié justement son pouvoir sur des progrès techniques, scientifiques, sur une transformation illimitée de la nature : l'idéologie bourgeoise restituera une nature inaltérable : les premiers philosophes bourgeois pénétraient le monde de significations, soumettaient toute chose à une rationalité, les décrétant destinées à l'homme : l'idéologie bourgeoise sera scientiste ou intuitive, elle constatera le fait ou percevra la valeur, mais refusera l'explication: l'ordre du monde sera suffisant ou ineffable, il ne sera jamais signifiant. Enfin, l'idée première d'un monde perfectible, mobile, produira l'image renversée d'une humanité immuable, définie par une identité infiniment recommencée. Bref, en société bourgeoise contemporaine, le passage du réel à l'idéologique se définit comme le passage d'une anti-physis à une pseudo-physis.
(p.212-216 – Mythologies)


Le fait que l'on perçoivent le clivage gauche/droite de façon aussi naturelle m'interroge également.

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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 18:16 
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Sir Flashball
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Baptiste a écrit:
Le libéral est quelqu'un de droite dans le sens où la défense de la compétition à tous les niveaux se justifie par le bien-être individuel;


Tu mélanges libéralisme et néo-libéralisme. Le libéral, à la base, ce qui l'intéresse, ce n'est pas la compétition, mais la responsabilité individuelle. C'est très différent, et tu trouveras des libéraux très attachés à l'idée de bien commun.
Personnellement, j'ai des affinités avec le libéralisme (au sens de responsabilité individuelle, de liberté de pensée, de liberté d'entreprendre), mais absolument aucune avec le capitalisme et les sociétés neo-darwiniennes. Et en tant qu'écolo, le bien commun est absolument central dans ma pensée politique.

Donc voilà, les petites boîtes, c'est bien pratique, mais c'est caricatural à souhait, je trouve.

@Ilouchechka : intéressant, merci pour ces passages.

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MessagePosté: 10 Aoû 2014, 18:24 
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Castorp a écrit:
Tu mélanges libéralisme et néo-libéralisme. Le libéral, à la base, ce qui l'intéresse, ce n'est pas la compétition, mais la responsabilité individuelle.

Ah désolé tous, c'est de ma faute, c'est moi qui ait amené cette confusion.


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