Rapide retour également, vu 12 films en trois jours et demi, j'ai pas chômé :
Compétition officielle :
Les feuilles mortes : Le fim est tellement Kaurismaki, je veux dire, il y a vraiment tout ce qu'on connaît déjà de son cinéma, vraiment aucune surprise. Quand je vois qu'on reproche à Wes Anderson de refaire toujours le même film... Après c'est plutôt touchant, j'ai bien aimé la musique et énorme qualité, ça dure 1h20. Mais c'est un petit film un peu gentillet. Quand je vois des palmes dans les tableaux de notes cannois ça fait quand même peur. 3-4/6
Club Zero : les premiers avis étaient catastrophiques donc vraiment eu peur en entrant dans la salle mais finalement j'ai été plutôt agréablement surpris dans un premier temps par cet objet très conscient de lui-même mais maîtrisé dans son humour glacial, dans sa brutalité que ce soit des décors, des costumes et de cette improbable BO au tam tam qui vrille les oreilles. Cependant, une fois les cartes étalées, je trouve que le film cale totalement et s'avère très prévisible et "petit". Si on rajoute à ça une scène choc gratos pour choquer le festivalier, ça fait baisser la note. Mais pas mal. 3/6
La passion de Dodin-Bouffant : je pensais aller voir la daube de la compétition et bien je me suis fait cueillir par ce film assez radical dans l'exploration de son sujet, la cuisine filmé amoureusement et surtout dans la durée. La première partie du film c'est vraiment 45mn de cuisine et de dégustation, il n'y a quasiment pas de récit. Puis dans la seconde partie, intervient donc un récit très simple d'amour entre maître et cuisinière qui m'a moins emballé Mais le film est visuellement beau, il a quelque chose de chaleureux dans son amour de la nourriture comme élégie de la vie. Des fautes de goût, des dialogues un peu raides mais beau film franchement. 4/6
Vers un avenir radieux : j'en suis sorti plus enthousiaste que je le suis maintenant, ça vieillit assez mal (pas aidé par ce que je lis sur le film). On est dans du Moretti pur jus entre Journal Intime et Mia madre, film totalement autoreflexif, autoportrait déguisé. Ca part un peu dans tous les sens ce qui est sa plus grande qualité, il y a à boire et à manger et c'est très rythmé donc quand une scène ne plaît pas, on passe vite à autre chose. Mais c'est vrai qu'il y a un petit fumet de film de vieux con qui reste en bouche à la fin et qui gâche un peu le truc (une scène avec Netflix d'une ringardise totale et surtout d'une rare hypocrisie), en plus d'être un égotrip vraiment pas possible (le dernier plan est abusé de prétention). Mais c'est souvent drôle, touchant, plus profond que ça en a l'air, avec cette approche de la culture très large, sans jugement... 4/6
Asteroid City : miracle cannois, je suis arrivé devant la salle sans billet à 14h28 pour un début de séance à 14h30 et je suis rentré. Heureusement car c'est tout simplement ce que j'ai vu de mieux à Cannes cette année. Comment faire la fine bouche devant ce cinéma total, plaisir absolu de l'image et de la narration où Anderson semble sans cesse dans l'anxiété de pas pouvoir en mettre plus jouant avec les récits gigognes et les régimes d'images. Du coup le film est d'une générosité totale se moulant parfaitement dans son univers et en étant d'une mélancolie assez bouleversante. Toujours des petits problèmes de rythme ici ou là ou des moments un peu en-dessous mais je suis vraiment admiratif devant ce cinéma à la fois de l'intime et du grand spectacle. C'est marrant, j'ai revu Rushmore dans le train du retour et les parallèles entre les deux films (tout deux interprétés par Schwartzmann en perso principal) sont énormes. Comme une boucle bouclée. 5/6
Rapito : pas grand-chose à en dire. C'est bien fait, souvent très beau et pictural mais le film a un côté un peu Wikipédia, c'est très """classique""" malgré quelques tentatives de Bellochio (là une petite animation, là une scène de rêve). Et si l'histoire est véritablement scandaleuse, l'Eglise a tellement fait pire dans l'horreur et l'ignominie que j'ai un peu du mal à être horrifié. D'ailleurs je trouve que Bellochio passe un peu à côté de l'aspect le plus intéressant de cette histoire
UCRLa fleur de Buriti : film ethnographique sur une population indigène brésilienne (les Kraho Kanela), comment ils vivent, quel est leur rapport au Brésil de Bolsonaro, leur histoire aussi. La démarche du film est plus intéressante que le film elle même parce que le couple de cinéastes ne se prétend pas artistes mais uniquement passeurs, offrant une plateforme à cette population pour s'exprimer. Il y a quelque chose d'assez beau dans l'effacement total de leur ego pour simplement être là auprès d'eux. Ils n'ont d'ailleurs pas parlé lors de la présentation du film et ont laissé s'exprimer leur personnage/acteur. Après le film en lui-même n'est pas facile, le montage est trop lâche, c'est assez long et l'hybridation fiction/docu est par moment maladroite (pourquoi ce gros tronçon historique a ce moment là ?). Je n'aurais jamais vu ce film ailleurs qu'à Cannes. 3/6
Cannes Première :
Cerrar los ojos : j'ai vraiment eu l'effet Cannes avec celui-là. Je suis là en train de me dire pendant le film (et on a le temps ça dure 3h, "
merde Erice a raté son retour, c'est super moyen", je sors de la salle et je vois des tweets hurlant au chef-d’œuvre absolu
. Alors vraiment je pense que c'est un délire de critiques parce que le film est très loin de L'esprit de la ruche et de la simplicité magnifique du Songe de la lumière. Là on est dans quelque chose d'assez vulgaire au premier abord, drame psychologique/vague enquête autour d'un acteur ayant disparu des années auparavant. C'est quand même bien trop long, souvent assez laid avec une facture pas loin d'être téléfilm honnêtement et pour l'originalité du scénario on repassera. Mais là où le film fait mouche c'est par des instants suspendus, soudain le film se pose et propose quelque chose d'un peu singulier. Le tout culmine dans une dernière scène pourtant presque clichée sur le pouvoir du cinema assez bouleversante et un dernier plan magistral qui résume tout. 3-4/6
L'amour et les forêts : je déteste le roman et j'ai pas du tout aimé le film. J'aime pas le cinéma de Donzelli et je trouve que le sujet lui sied particulièrement mal. Tout est très artificiel, sa mise en scène est trop clinquante et toc, puérile, tout est trop évident dans le film tellement c'est appuyé grossièrement par la mise en scène (il y a un zoom hyper violent sur un téléphone a un moment j'ai pouffé de rire). On comprend l'idée, faire de ce drame conjugal un film d'horreur mais c'est pas du tout original. Sur le même sujet Mon roi était bien meilleur et pour le côté horreur thriller Jusqu'à la garde est aussi largement au dessus. Efira c'est fascinant on dirait qu'elle joue le même personnage de film en film. 2/6
Quinzaine :
The grace : le "film de festival" pour les nuls. Road trip taiseux et triste au fin fond de la Russie entre un père et sa fille uniquement composé de panoramiques extrêmement lents. Du film dispositif à la Sharunas Bartas, tout ça pour une histoire d'une confondante banalité (deuil, fin de l'adolescence...). Alors il ne faut pas se méprenre, le film est très beau, il y a des plans dingues mais c'est tellement dévitalisé et parodique d'un certain cinéma d'auteur que bon... Quand je repense à l'interview de Julien Rejl qui parlait de chercher des nouvelles formes de cinéma mdr on est là dans le pur cinéma d'auteur Europe de l'Est années 90 début 2000. Finalement je déteste pas, c'est un peu ma came après tout (on peut penser aussi à Bela Tarr) mais c'est vieillot et figé. 2-3/6
Légua : film portugais sur une femme qui doit s'occuper de sa collègue malade dans une maison de maître où elles sont domestiques. C'est humble et ça se suit sans déplaisir avec une belle humanité et des personnages attachants. Seulement ça cale totalement dans la deuxième heure où ça devient répétitif et assez ennuyeux jusqu'à une fin qui tente une percée auteurisante limite expérimentale sortie de nulle part qui jure totalement avec le reste. Dommage. 2-3/6
Semaine de la critique :
Levante : présentation ultra longue de l'équipe de film. Ils sont venus du Brésil à 25 à Cannes
. Ils présentent le film comme une oeuvre politique queer et engagé. Je m'attends pas du tout à ce que ce soit un film d'une banalité assez lénifiante... Mix film de sport le plus basique possible (le championnat à la fin) et film sur l’avortement interdit au Brésil c'est vraiment du scénario clichetonneux paresseux et, bien pire, gentillet. Alors oui les filles sont sympas, il y a une vraie énergie dans la mise en scène (de certaines séquences) mais c'est très moyen. 2/6
Acid :
Caiti Blues : docu sur une jeune serveuse paumée au fin fond du Nouveau-Mexique. C'est plutôt touchant, le personnage incarne parfaitement ces illusions perdues (elle voulait être chanteuse à Broadway) et il y a une vraie vision d'une Amérique contemporaine très rurale et fermée sur sa communauté. Cependant ça reste un peu superficiel, ça m'a pas passionné plus que ça. 3/6