C'est le grand soir du palmarès...
Vingt films donc, que du cinéma d'auteur. Déjà deux constats avant d'entrer dans le palmarès tant attendu: j'ai rencontré un certain nombre de difficultés à trouver
les films en VOD - surtout les Français -, ce qui m'a obligé à changer ma liste. Le visionnage de films d'auteur chez soi a sans doute tendance à "lisser" l'avis sur un film "cannois", quand la projection matinale au Grand Theatre Lumière rend les avis plus clivants.*
J'ai donc vu 20 films en compétition
Trois Américains 5 Boyhood de Richard Linklater 4 The Myth Of The American Sleepover de David Robert Mitchell 4 Blue Valentine de Derek Cianfrance
Cinq Asiatiques 4 Train de nuit de Diao Yinan 4 Nuage de mai de Nuri Bilge Ceylan 3 Mekong hotel d'Apichatpong Weerasethakul 4 Pieta de Kim Ki-Duk 4 13 Assassins de Takashi Miike
Deux Sud-Américains 3 Los Bastardos d'Amat Escalante 3 Dans ses yeux de Juan José Campanella
Deux Français
3 Quelque chose d'organique de Bertrand Bonello 3 L'amour est un crime presque parfait des Frères Larrieu
Huit Européens 5 Under the Skin de Jonathan Glazer 2 Corpo Celeste d'Alice Rohrwacher 4 Elena d'Andrey Zvygantiev 3 Johanna de Kornél Mundruczo 4 Ida de Pawel Pawlikowski 4 Bronson de Nicolas Winding Refn 5 Faust d'Alexander Sokourov 5 Le Quattro Volte de Michelangelo Frammartino
Les films non récompensés:
2/6 Corpo Celeste d'Alice Rohrwacher
Je ne comprends pas l'intérêt de son cinéma, ça m'ennuie un peu, beaucoup, passionnément, les seconds rôles sont des archétypes, la photo est volontairement terne, tout est nimbé d'un profond mystère (on remarquera d'ailleurs que les deux films sont très "proches", même ouverture dans la nuit, même perso qui semble débarqué de nulle part et bien sûr une héroïne entre deux âges). Il y a quelques plans réussis (dès qu'on se concentre sur la seule gamine), mais bon, je n'éprouve rien.
3/6
Mekong hotel d'Apichatpong Weerasethakul
Le cinéaste thaï poursuit sa veine fantomatique avec ce film hybride entre documentaire, fiction, film hyper réaliste, film fantastique, le tout sur une ritournelle à la guitare. C'est court (1h), on reste souvent à la surface de l'eau, on s'endort aussi un peu, comme les personnages, mais le sens du cadre reste - certains plans sont magnifiques et Joe parvient toujours à faire naitre de l'abstraction et de l'étrangeité au quotidien le plus "plat".
Los Bastardos d'Amat Escalante
Ah le jeune cinéma d'auteur mexicain, sa joie de vivre, ses notes d'intention hurlées à chaque plan. Amat Escalante récite son petit Haneke illustré, avec quelques belles idées de mise en scène et de gestion du hors-champ, et bien sûr ce besoin d'en mettre plein la gueule au spectateur. J'ai pas détesté - mais je suis masochiste - mais dans le même genre, un Great Ecstasy of Robert Carmichael est beaucoup malaisant et impressionnant.
Dans ses yeux de Juan José Campanella
Polar-romantique argentin tellement sur-vendu - Un Oscar, sérieux ? - que j'ai été plus déçu. Il y a bien une séquence géniale - la poursuite dans le stade de football - mais le film est long pour ce qu'il raconte et assez à l'eau de rose.
Quelque chose d'organique de Bertrand Bonello
Premier film, où l'on ressent déjà le goût de l'auteur pour les ambiances mortifères, les silences et l'utilisation de la zik. Le début dégage une vraie poésie, mais la fin m'a totalement laissé de côté, je pige pas trop la trajectoire du perso joué par Romane Bohringer.
L'amour est un crime presque parfait des Frères Larrieu
Je trouve la première partie catastrophique, entre le sous-sur-jeu permanent, les seconds rôles caricaturaux, les dialogues qui sonnent creux et puis le film trouve un peu son rythme de croisière, avec les deux couples - Maiwenn-Amalric, Poda-Viard, même si l'intrigue est pas très passionnante. Le personnage de Forestier sert à rien par contre, à part montrer son cul qu'elle a joli. Plus qu'Hitchcock, ça m'a rappelé Bonitzer et les Petites Coupures, d'ailleurs Amalric est le nouveau Auteuil-Luchini, dans le rayon mec pas beau censé tomber toutes les filles.
Johanna de Kornél Mundruczo
L'OFNI de la sélection, une version de Jeanne d'Arc en milieu hospitalier chantée en Hongrois ? On a l'impression d'une synthèse de trois films de Lars von Trier en 1: Dancer in the Dark pour le chant et la trajectoire doloriste, L'Hopital et ses fantômes pour la photo verdâtre et le milieu hospitalier et Breaking the Wave pour la sexualité qui guérit le monde. Le début est super intrigant, mais ensuite ça devient assez vite prévisible... Le film dure 1h20 et en parait presque le double, mais il y a aussi de très beaux passages...
4/6
Blue Valentine de Derek Cianfrance
Un deuxième film impressionnant de maîtrise formel et narrative, avec deux acteurs au top et à l'alchimie troublante... Comme Ida, je regrette juste un peu de "sur-maîtrise" un peu étouffante, mais ça reste bien.
The Myth Of The American Sleepover de David Robert Mitchell
Teenage-movie choral et délicat sur un âge finalement assez peu exploité au cinéma, les 11-14 ans - d'ailleurs j'aime moins le personnage plus âgé et sa fixation sur les jumelles. Pour un premier film, la direction d'acteurs est assez bluffante et j'aime beaucoup la petite musique folk qui s'en dégage. Après ça mériterait peut-être un peu plus de nerf.
Ida de Pawel Pawlikowski
Un beau film de festival. Sujet fort, deux partis pris de mise en scène - N&B et format carré -, belles actrices et scénario très construit. Le petit bémol tient que je trouve justement le film presque trop maîtrisé et cadenassé. La fin est très forte.
Train de nuit de Diao Yinan
Dès les premières minutes, un doute... Et bien après vérification du tableau de note, le verdict tombe. Je l'avais vu. Ou plutôt j'avais dormi devant à Cannes, trouvant la mise en scène intéressante mais le rythme trop lent. Le revoir après Black Coal a été plutôt bénéfique. On reconnait la patte de l'auteur, ses obsessions, son goût pour un certain formalisme à l'européenne et la chronique sociale non appuyée. Reste qu'il connait sur ce film d'évidents problèmes de narration - Black Coal aussi, mais je trouve le perso central plus attachant - avec des ellipses parfois brutales.
13 Assassins de Takashi Miike
J'entretiens un rapport amour/haine avec ce réalisateur dont j'ai vu - et pas aimé - de nombreux films. Ici, c'est clairement l'un de ses meilleurs, un vrai et puissant chambarra avec ce qu'il faut de morceaux de bravoure. On regrettera une caractérisation des persos un peu trop rapide et les touches d'humour un peu relou parfois dans les dialogues.
et voici le palmarès, faites entrer le jury.
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