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MessagePosté: 12 Jan 2021, 14:17 
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Film-interview de Steve Bannon, une des figures de proue de Breitbart, et qui fut un temps l'une des éminences grises de Trump, Morris reste pas mal en surface, mais les surfaces sont intéressantes dès les premiers plans quoique... superficielles. Ça commence avec des images prises dans Twelve O'Clock High film de guerre de Henry King, référence vers laquelle Bannon ne va cesser de revenir. Un personnage est sur la piste d'un aérodrome, il lève la tête pour scruter le ciel, une menace ou au contraire quelques bons augures, on ne sait pas. Bannon rejoue la scène et Morris met l'accent sur ses yeux d'un bleu limpide et profond. Ensuite le film présente un type a l'air un peu malicieux, qui a l'air de savoir surtout renifler l'esprit du temps, qui vit probablement dans une sorte de réalité alternative façonnée en premier lieu par les films hollywoodiens de son enfance. Le concept de dharma présent dans le titre, pour lequel il exprime un attachement, montre un peu le flair du producteur capable de saisir à la volée deux trois notions pour construire une réalité un peu poétique, sanctionnée par le destin, qui tire l'individu de son train-train dénué de sens. C'est ce qui distingue les complotistes, psychopathes et dictateurs de tout crin et peut-être Morris expose-t-il, de manière assez homéopathique, ce qu'il y a de dangereux chez un type comme Bannon, comme chez, au hasard, un Kémi Séba ou un Alain Soral et leur attrait.
C'est excitant de s'imaginer tirer les ficelles du pays le plus riche du monde, et c'est cette illusion que le film présente, illusion dont on ne sait pas à quel point elle est en partie vraie, ou qui repose sur des manoeuvres minables et spécieuses. C'est en fait le grand thème de Morris, que je ne tiens pas par ailleurs pour un grand documentariste. C'est toujours un peu trop facile.
Morris pointe certains paradoxes, comme le fait que la droite populiste, en prétendant servir les intérêts de la classe laborieuse, favorise en fait un certain establishment. Les arguments sont basiques, le travail de journaliste de Bannon avec Breitbart ou lors de la campagne présidentielle de Trump sont censés témoigner de son génie de publiciste mais le fonds sur lequel il repose est tellement vulgaire, de piètre qualité qu'on regarde ça légèrement blasé.
Ce qui est le plus intéressant, c'est de voir Bannon parler de Falstaff de Welles, de Liberty Valance avec les images des films en regard : il énonce des lieux communs mais l'effet de miroir, avec un Orson Welles, jouant Falstaff, en qui il s'identifie, est intéressant.


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MessagePosté: 12 Jan 2021, 18:33 
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bmntmp a écrit:
Film-interview de Steve Bannon, une des figures de proue de Breitbart, et qui fut un temps l'une des éminences grises de Trump, Morris reste pas mal en surface, mais les surfaces sont intéressantes dès les premiers plans quoique... superficielles. Ça commence avec des images prises dans Twelve O'Clock High film de guerre de Henry King, référence vers laquelle Bannon ne va cesser de revenir. Un personnage est sur la piste d'un aérodrome, il lève la tête pour scruter le ciel, une menace ou au contraire quelques bons augures, on ne sait pas. Bannon rejoue la scène et Morris met l'accent sur ses yeux d'un bleu limpide et profond. Ensuite le film présente un type a l'air un peu malicieux, qui a l'air de savoir surtout renifler l'esprit du temps, qui vit probablement dans une sorte de réalité alternative façonnée en premier lieu par les films hollywoodiens de son enfance. Le concept de dharma présent dans le titre, pour lequel il exprime un attachement, montre un peu le flair du producteur capable de saisir à la volée deux trois notions pour construire une réalité un peu poétique, sanctionnée par le destin, qui tire l'individu de son train-train dénué de sens. C'est ce qui distingue les complotistes, psychopathes et dictateurs de tout crin et peut-être Morris expose-t-il, de manière assez homéopathique, ce qu'il y a de dangereux chez un type comme Bannon, comme chez, au hasard, un Kémi Séba ou un Alain Soral et leur attrait.
C'est excitant de s'imaginer tirer les ficelles du pays le plus riche du monde, et c'est cette illusion que le film présente, illusion dont on ne sait pas à quel point elle est en partie vraie, ou qui repose sur des manoeuvres minables et spécieuses. C'est en fait le grand thème de Morris, que je ne tiens pas par ailleurs pour un grand documentariste. C'est toujours un peu trop facile.
Morris pointe certains paradoxes, comme le fait que la droite populiste, en prétendant servir les intérêts de la classe laborieuse, favorise en fait un certain establishment. Les arguments sont basiques, le travail de journaliste de Bannon avec Breitbart ou lors de la campagne présidentielle de Trump sont censés témoigner de son génie de publiciste mais le fonds sur lequel il repose est tellement vulgaire, de piètre qualité qu'on regarde ça légèrement blasé.
Ce qui est le plus intéressant, c'est de voir Bannon parler de Falstaff de Welles, de Liberty Valance avec les images des films en regard : il énonce des lieux communs mais l'effet de miroir, avec un Orson Welles, jouant Falstaff, en qui il s'identifie, est intéressant.


Je n'ai pas vu ce documentaire, par contre j'ai vu celui sur Roger Stone, Get me Roger Stone, sur Netflix, conseiller officieux de Trump. Je te le conseille si tu ne l'as pas encore vu. Un personnage haut en couleur qui assume d'être une crapule.


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MessagePosté: 12 Jan 2021, 18:50 
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Pas vu celui sur Roger Stone encore, mais le Errol Morris est sympa mais clairement pas sont meilleur. Meme avis que bmntmp, on y apprend pas grand chose sur Bannon mais il y a un truc plutot intéressant qui se passe visuellement (les analogies à certains classiques américains).
Moi c'est Wormwood sur Netflix, de Errol Morris également, qui m'a bien mis un claque. Un complot fou, qui s'étire sur 5 épisodes avant de te remettre les pieds sur terre dans un dernier épisode/twist musclé. Et c'est vraiment classe visuellement, à la The Thin Blue Line.


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MessagePosté: 12 Jan 2021, 18:59 
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Sir Flashball
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Errol Morris avait écrit un chouette article sur les obsessions cinématographiques de Bannon pour The Atlantic :
https://www.theatlantic.com/politics/ar ... es/615787/

_________________
"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
"Je me suis mal exprimé, pardon."


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MessagePosté: 13 Jan 2021, 09:54 
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flatclem a écrit:
Pas vu celui sur Roger Stone encore, mais le Errol Morris est sympa mais clairement pas sont meilleur. Meme avis que bmntmp, on y apprend pas grand chose sur Bannon mais il y a un truc plutot intéressant qui se passe visuellement (les analogies à certains classiques américains).
Moi c'est Wormwood sur Netflix, de Errol Morris également, qui m'a bien mis un claque. Un complot fou, qui s'étire sur 5 épisodes avant de te remettre les pieds sur terre dans un dernier épisode/twist musclé. Et c'est vraiment classe visuellement, à la The Thin Blue Line.


Mais il y a des séquences avec des acteurs. Je déteste en général tous les docu qui comportent des reconstitutions. Là ça passe bien ?


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MessagePosté: 13 Jan 2021, 16:24 
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Castorp a écrit:
Errol Morris avait écrit un chouette article sur les obsessions cinématographiques de Bannon pour The Atlantic :
https://www.theatlantic.com/politics/ar ... es/615787/


Intéressant car ça donne un peu de contexte mais ça confirme que Morris a une vision un peu superficielle, juste un peu moins outrancièrement partisane que la moyenne, que ce soit dans un camp ou dans l'autre.

Citation:
Now that Bannon has been indicted for fraud, it might be worthwhile to provide a short history of his get-rich-quick schemes. They run the whole gamut of entrepreneurial sleaze. Go to where the money is and siphon it off: the biosphere, a self-contained ecosystem supported by oil-rich Texans; cryptocurrencies, a form of digital gold-mining without the Klondike; fantastical multiplayer digital games; Breitbart and right-wing punditry; and ultimately, politics.


Il a un côté escroc, comme tous les types qui font du business sous couvert de faire de la politique mais c'est pas exclusif à l'extrême-droite. Il commence chez Goldman-Sachs à la fin des années 80 (comme un activiste marxiste graphomane, Louis Proyect, qui a un blog consacré à la politique et au cinéma), il fait quelques investissements chanceux comme dans Seinfeld. Son racket qui consistait à merchandiser WOW est quelque chose de monnaie courante aujourd'hui avec Fortnite qui est le plus grand exemple, même si la société, dans laquelle son rôle est sans doute surestimé vu qu'il est arrivé tardivement, fait de la spéculation sur de la valeur qu'il n'a pas originellement produite. Il y a un côté un peu naïf dans sa vision du monde dont un type comme Bannon profite à plein.


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MessagePosté: 14 Jan 2021, 02:25 
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Gnagnagna a écrit:
flatclem a écrit:
Pas vu celui sur Roger Stone encore, mais le Errol Morris est sympa mais clairement pas sont meilleur. Meme avis que bmntmp, on y apprend pas grand chose sur Bannon mais il y a un truc plutot intéressant qui se passe visuellement (les analogies à certains classiques américains).
Moi c'est Wormwood sur Netflix, de Errol Morris également, qui m'a bien mis un claque. Un complot fou, qui s'étire sur 5 épisodes avant de te remettre les pieds sur terre dans un dernier épisode/twist musclé. Et c'est vraiment classe visuellement, à la The Thin Blue Line.


Mais il y a des séquences avec des acteurs. Je déteste en général tous les docu qui comportent des reconstitutions. Là ça passe bien ?

Oui effectivement, les interviewés sont les vrais gens et les reconstitutions sont jouées par des acteurs. D'ailleurs si tu n'aimes pas ce genre de trucs, tu détestera peut être Wormwood parceque Errol Morris n'y va pas avec le dos de la cuillère. On est entre le collage/montage pop et une mise en scène feutrée tout en ralentis étirés, pour l'ambiance.
Généralement j'aime bien les digressions visuelles d'Errol Morris. On est plus dans l'image mentale (différents point de vue par exemple) plutôt que dans l'image vérité des documentaires.

Si tu veux un apercu de ce style, essaie peut être The Thin Blue Line, c'est moins long!


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MessagePosté: 14 Jan 2021, 16:35 
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The Thin Blue Line, c'est pas mal quand même car ça a permis de mettre fin à une erreur judiciaire.
Sinon j'avais bien aimé Tabloid de lui.


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