Je vais faire une infraction à la règle que je m'étais dictée, à savoir me tenir à l'écart de ce forum, dans la mesure où j'avais adoré ce film quand je l'ai vu il y a un ou deux ans;
Gontrand a écrit:
Au début le film m’a agacé par son côté rétro et ses afféteries de mises en scènes. J’ai eu l’impression que les documents d’archives sur la visite d’Hitler servaient juste à conférer une patine vériste au film.
Est-ce un motif d'agacement suffisant? Relax, comme on dit.
Gontrand a écrit:
Au début le film m’a agacé par son côté rétro et ses afféteries de mises en scènes. J’ai eu l’impression que les documents d’archives sur la visite d’Hitler servaient juste à conférer une patine vériste au film, et à faire oublier le contraste avec des psychologies des personnages fortement typées, de manière artificielles et symboliques où
-le père et chacun des enfants ont un âge qui correspond à une attitude moral différentes face au fascisme, et toute la décoration de l’appartement de Sophia Loren est constituée d’accessoires représentatifs étudiés pour restituer une atmosphère, un peu comme une pièce de musée,
La mise en scène m’a semblé trop sophistiquée, donnant l’impression de vouloir donner au spectateur pour son argent (un plaisir voyeuriste de regarder Sophia Loren –il est vrai excellente- jouer à la ménagère lambda et paumée), en monopolisant tous les régimes visuels du cinéma d’auteur : on à la fois un film de Kubrick et de Pialat, ainsi on rentre d’abord dans l’appartement de Loren par un mouvement de caméra venu de la cour qui est la réplique en sens inverse du morceau de bravoure de « Profession Reporter », mais quand plus tard quand elle passera le balais , elle sera suivie caméra à l’épaule, ce qui apparaît alors comme la de fausse simplicité : quelle est alors la nécessite de ce « bougé », qu’essaye t’ il de capturer, vu que ce naturalisme a été conditionné par un mouvement de caméra hyper-sophistiqué et visible? J’étais aussi agacé par le traitement des couleurs : plus le rapport entre Loren et Mastroianni devient intime, plus l’image est sans contraste et sépia, comme s’il s’agissait projeter les personnages dans l’album photo de Loren où le visage de Mussolini remplace celui des membres de sa famille.
Beaucoup de projections encore dans tout ça. Certes Sophia Loren (et Mastroianni) sont à contre-emploi, mais est-ce une raison pour s'en agacer encore une fois? C'est fou ce que la vision d'un film peut être polluée par des considérations extérieures, voire imaginaires et hors de propos.
Énormément de surinterpétation sinon, notamment dans cette manière de raisonner en "régimes visuels".
Gontrand a écrit:
Mais j’ai apprécié la fin du film : alors qu’il aurait été facile de faire du malentendu amoureux une métaphore de l’impuissance et de l’isolement des consciences dans le fascisme
Le film est loin de ça en effet.
Gontrand a écrit:
Le personnage de Loren n’est pas idiote
Je ne me souviens plus assez du film mais pour moi, il est évident que Mastroianni la considère, avec une sorte de condescendance amusée, un peu comme une idiote. Cela n'empêche pas forcément la sympathie, pas plus que ça ne veut dire qu'elle est idiote.
Kael critique la condescendance du film d'ailleurs, alors que pour moi, le film a le mérite de la présenter.
Gontrand a écrit:
Je ne crois pas que Mastroianni est indifférent à elle.
Indifférent à elle, certainement pas, mais disons que l'intérêt qu'il y prend est circonstanciel et contingent (même s'il y entre un peu de la fatalité de son emprisonnement prochain). En d'autres circonstances, il n'aurait pas pris son numéro.
Gontrand a écrit:
- ce n’est pas parce qu’il n’assume pas sa sexualité et une rupture amoureuse comme on le pense d’abord que Mastroianni veut se suicider, mais parce qu’il sait qu’il est finalement condamné lui-même à être déporté (voire sans doute assassiné), et qu’il est finalement plus franchement anti-fasciste et politisé que ne le laisse supposer son attitude de dandy nonchalant.
Pas sûr, après c'est une grande qualité du film de rester finalement assez suggestif, et ce malgré les reproches de lourdeur et de symbolisme qu'on a pu lui faire (Kael n'avait pas beaucoup aimé le film si je me souviens bien mais bon l'avis qu'elle en donne, après relecture, est vraiment con).
Gontrand a écrit:
-Loren est immédiatement tombée amoureuse de Mastroianni, ce n’est pas le décalage et la mise en scène de sa fausse légèreté qui l’ont séduit, mais quelque chose de plus immédiat et physique.
Là encore, je ne serais pas aussi affirmatif. Quand elle couche avec Mastroianni, on voit bien qu'il y entre un peu d'orgueil de la femme qui a su faire bander un homosexuel. Il faut sinon voir comment la scène est filmée (de manière un peu perturbante), entre l'espèce de libération de Loren et la passivité de Mastroianni.
Gontrand a écrit:
A la fin les personnages acquièrent une conscience politique mais leur vie privée est quand-même anéantie, parce que ce qui est de l’ordre du regard, de l’espace intime n’est pas modifié par le fascisme, fonctionne et continuera à fonctionner de la même manière en dehors et à l’extérieur de la discipline et de l’idéologie fasciste. Mais cette lecture psychanalytique ne laisse au personnage la possibilité de refuser le fascisme qu’en en développant le sens, peut-être parce qu’il est pensé comme une forme d’altérité psychologique, et pas comme un système politique.
Bien! Tu finis par expliquer de manière très compliquée des idées très simples