Forum de FilmDeCulte

21 mars 2010. Georges Frêche est réélu dans son fauteuil. En Languedoc, il est le Président. Six mois durant, au fil d’une campagne ébouriffante et captivante, la caméra d’Yves Jeuland ne l’a pas quitté. Partout, dans le secret des conciliabules et les fins de banquet, face aux ténors des médias, dans son bureau, dans sa voiture, au saut du lit comme au bord de sa piscine.

Je me souviens d'un cours de documentaire où François Niney commentait certaines séquences de 1974, Une partie de campagne, un peu trop farcies de plans de coupe, ou certains plans-discours qu'il soupçonnait très fortement d'être trop longuement de dos afin de dissimuler des coupes au son ; et Niney, de cela, disait qu'il ne pardonnerait jamais à Depardon, car il mettait dès lors le reste de son film (et pourquoi pas de son cinéma) en crise, en doute.

Devant Le Président, Niney hurlerait. Il n'est pas un raccord, de ces plans métronomiques de 10 secondes maximum, qui ne soit un mensonge éhonté, pas un son entendu au sujet duquel on ne puisse émettre des doutes de montage, pas un contre-champ qu'on sache être vrai.

Toutes les constructions sont dès lors possibles, et l'on peut voir le vieillard Frèche manger froidement sans réaction un yaourt en pyjama (oui car la caméra est là pour filmer un vieil homme malade, impudique tant que moqueuse, minable) tandis que ses collaborateurs se poilent dans le hors-champ, alors qu'en observant le point de montage, n'importe quel œil tant soit peu attentif sait que ce raccord n'existe pas.

De là, de cette malhonnêteté sidérante, tout le film est non-avenu, impossible à discuter, impossible à regarder, du mensonge, du coin-coin-rigolo-manipulation-flèche-qui-clignote (sic pour ladite flèche sur Frèche, c'est dire le niveau), et de fait de rien d'autre on n'a le droit de parler face à ce film, il y a un scandale complet de mise en scène, il crève les yeux, évidemment ça ne se retrouve sous la plume d'aucun critique, parce qu'il y a un "fond", parce qu'il y a un personnage, parce qu'on peut faire mine de parler politique (alors qu'en ramener encore et toujours à une ultra-personnalisation du politique, ce n'est jamais parler politique). Mais ne pas mentionner, ne pas critiquer cela du film, ce qui le fait tenir et qui est une colle indigne, pour se concentrer sur les mensonges vus et entendus (mensonges par le fait, puisque montrés et dits ainsi, il faut, moralement, tout considérer dans ce film comme mensonger, on ne peut pas prétendre aimer le cinéma et laisser passer cette pratique-là pour normale, pour incritiquable), c'est propager aussi le mensonge, c'est autoriser, en la prolongeant, la propagande.

Peut-être la pire chose "vue" cette année.

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Niney in da houze.


C'est con, j'avais presque envie de le voir (plus pour rigoler qu'autre chose, je l'avoue).

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dans ça balance à Paris, un chroniqueur avait mollement critiqué la même chose que toi.

Oui on peut aussi le regarder comme ça, on peut rigoler devant, hein, vraiment, se dire que c'est Le Petit Journal sur 1h38. Mais c'est justement là le degré de malhonnêteté.

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ah ça m'intéresse, je peux voir ou entendre ça qqpart? C'était qui?

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Oui c'est exactement ce que j'en attendais.

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tu l'auras! (en vachement moins efficace dans la manipulation, hein)

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alors là aucun souvenir par contre, tu peux avoir ça sur le site de paris première, je pense

là-dedans?

http://www.paris-premiere.fr/cms/displa ... r1_1119854

(je connais pas l'émission, je sais pas où ni quoi regarder)

(Eric Naulleau, ça fait peur quand même...)

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l'un des pires émissions critiques au monde, mais je sais pas pourquoi je suis tombé dessus pile poil.

et je trouve pas non plus...

bon tant pis, merci mec

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Ca, je crois que c'est un différent qu'il y aura toujours entre Zad et moi, cette sanctification de la "mise en scène". Ca me rappelle le cas du film sur Godard réalisé par l'autre débile là : c'était malhonnête et mal foutu mais le personnage Godard, une certaine vérité du personnage Godard, apposait une sorte de résistance au montage racoleur. C'est un peu pareil ici. Zad a raison de soulever les effets de montage un peu pervers et bien présents, il n'empêche que le personnage de Georges Frêche est bien là : fascinant dans son alternance entre mutisme et représentation, son cynisme de vieux dinosaure politique qui n'a honte de rien et son sens de la provocation. Complètement fou en fait, ce qui me confirme bien des choses sur la classe politique.
C'est difficile de se planter en le filmant un tel individu. On peut faire n'importe quoi (et c'est le cas ici, mais ça ne me semble pas tant le fait d'une horreur propagandiste que d'un réflexe mollement télévisuel. En gros Jeuland, il est pas plus malhonnête que n'importe quel journal de 20h, il est juste indexé sur leur médiocrité), y'aura toujours quelque chose qui ressort, un peu comme une mauvaise comédie interprétée par un grand comique, qui fait lui-même sa propre mise en scène, qui gère son rôle tout seul, sans l'aide d'un réalisateur.

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mais son mutisme est complètement organisé par le montage, quand Jeuland te fait croire qu'il mange silencieusement son putain de yaourt alors que c'est complètement faux, que le chevauchement du son est complètement fabriqué, complètement faux, je ne veux, ne peux pas regarder le film.

et le film sur godard était affreux, mensonger, dégoûtant, renforçait les débiles soupçons d'antisémitisme de JLG, c'est vraiment un exemple terrible.

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