Forum de FilmDeCulte

Chasse à l'homme en VF.



1939, quelques jours avant la seconde guerre mondiale. Thorndyke, un célèbre chasseur de fauves anglais, tient Hitler dans le viseur de son fusil. Il appuie sur la gâchette...


Apparemment un fétiche des puristes Langiens, à ce que j'ai compris... A la vision du film, on comprend un peu pourquoi, tant celui-ci est saturé de saillies glaciales qui font encore et toujours (je trouve) le meilleur de ce réal, ces petites scènes implacables et logiques qui s'échinent à mettre le mal en équation. A commencer par l'ouverture (j'imagine l'effet décuplé qu'elle a pu avoir à l'époque de la sortie), scène qui va fouiller dans le paradoxe-même du cinéma avec autant de puissance que la projection de Furie : Hitler dans le viseur, le doigt sur la détente, et la possibilité, d'une seconde à l'autre, de voir le film passer de fiction crédible à parfaite uchronie, les images de reconstitution à fantasme, pour jouer par ce biais sur notre désir de meurtre... "Tire, change l'Histoire", tu sens toute la salle concentrée qui pense ça très fort, et c'est brillant.

Le nazisme chez Lang est d'autant plus marquant qu'il se fait l'incarnation même de la dimension mathématique qui habite son cinéma : plus de morale, plus d'affect, juste de la pure logique. Cette approche non dénuée de nuances (malgré l'évident rôle patriotique du film, l'ennemi reste un être complexe et élégant) envoie direct Sanders et Carradine aux sommets : toutes leurs scènes sont parfaites, et si le film se permet en renfort de multiples atmosphères séduisantes (l'inquiétant Londres au brouillard), il a déjà réussi son pari de terreur via ces deux là.

L'ensemble qui englobe ces diverses réussites est moins convaincant : très décousu, déséquilibré, parfois un peu vide, ne parvenant pas à faire de la succession de rencontres (le gamin, le fille, le frère) une structure revendiquée et travaillée en ce sens, il plombe l'énorme potentiel d'un héros gentleman-aventurier (très réussi) par la présence constante d'une compagne usante (malgré quelques belles scènes, la séparation cruelle surtout)... Et le final, un peu gras dans la façon d'atterrir dans le film de propagande pur (quand Lang avait jusqu'ici parfaitement réussi à l'éviter), achève de tempérer le charisme du film.


4,5/6

Oui, je n'ai pas pu m'empêcher d'être déçu par ce Man Hunt dont l'ambition de départ est effectivement séduisante. Il y a plusieurs moments d'une pureté de cristal, comme cette scène d'adieu de nuit entre la fille et le héros, ou encore la poursuite orchestrée par Carradine, jusque dans le tunnel du métro (l'image que tu as choisie est splendide). Le duel final est aussi bien vu, une bien belle métaphore de ce que fut la guerre entre Allemands et Anglais, d'ailleurs.
Mais globalement, on a plus l'impression d'asssiter à une succession de péripéties qu'à une histoire aboutie, je trouve ça très mineur à ce niveau-là.

4/6

C'est vraiment une scène horrible, surtout de voir que celle qui trouve cette astuce qui les sauvera est justement la fille que le héros a poussé tout au long du film à ne pas se sous-estimer, à ne pas avoir une sale image d'elle-même... Finir là-dessus, comme un constat d'échec, façon "voilà, tu t'en vas, ça donne ça", je trouve ça super cruel et très bien vu.


Heeeyyy, j'avais pas fait gaffe, tu as tout à fait raison ! Ca redonne encore plus à la scène, tiens...

J'avais trouvé ça... Gentil. Une déception à une époque où je découvrais Lang, le film ne pouvant concurrencer ses meilleurs. Je le reverrais bien, du coup.

_________________
Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)

Découvert ce film il y a peu au ciné.
J'ai beaucoup aimé. Certes, c'est décousu, bancal, pas forcément passionnant, mais c'est mené à un rythme élevé, très bien interprété, et parsemé de scènes très fortes brillamment réalisées. Je ne connais pas assez le cinéma de Lang pour le replacer dans sa filmo mais en l'état je trouve que c'est un très bon thriller qui a bien résisté à l'épreuve du temps (comprenez par là que je pense qu'il est, encore aujourd'hui, susceptible de plaire bien au-delà du cercle cinéphile, ce qui n'est pas le cas de tous les classiques de cette époque)

5/6

Moi je m'étais bêtement endormi.

à revoir/6

_________________
N'écoutez pas Film Freak

Meilleur film américain de Lang avec règlement de compte. Dés le début on sait que ça va être du grand cinéma avec cette intro silencieuse qui nous montre Hitler pris dans la cible d'un sniper, s'en suit des scénes génialement pensée ou on est tout aussi perdu que le personnage principale au milieu d'une population allemande bureaucrate (rien n'est sous titré) qui ne donne pas cher de son sort.
Les deux scénes d'affrontements verbales entre Pidgeon et Sanders c'est du caviar, les deux hommes sont charismatiques au possible et Lang n'est jamais pressé dans les déroulement de ses scénes, il prend bien soin de poser sa situation et de tout montrer, ça s'étire bien sur 15 minutes les deux scénes en question et ces dernières présentent une science du dialogue assez prononcé.

On s'attache assez vite au personnage principale joué par Pidgeon qui campe un pur british casual au possible mais qui ne perds jamais sens de la réalité de sa situation, au début Bennett je voyais pas trop ou voulais en venir Lang en forçant un poil le trait sur l'innocence du personnage mais on comprends trés vite pourquoi.
La réalisation est trés soigné avec un gout bien prononcé pour les ambiances brumeuses mais comme d'habitude avec lui le mélange de ses origines européennes mêlés au cinéma américain fait qu'on obtient le meilleur des deux cinémas en question.
Lang c'est vraiment un mec que j'adore dans sa représentation de la violence, franchement pour du 1941 c'est bien sec, noir et on a même du sang (chose carrément absente dans la production américaine de l'époque) et sans en dire trop on retrouve ce gout très prononcé du réalisateur pour une forme de nihilisme dans les relations homme/Femme qu'on trouvais déjà dans règlement de compte. Bon la fin est pas trop finaude au niveau de la propagande pour buter le moustachu (j'aurais préféré que ca se finisse deux minutes plus tôt) mais ça ne gâche en rien un excellent film.

5/6

Meilleur film américain de Lang = 5/6 ? Damn !

_________________
N'écoutez pas Film Freak

Avec réglements de compte auquel je met 6/6 oui.

Après y a plein de 4,5/6-5/6 dans sa filmo je te rassure, après c'est plus une question de ressentie que de note

Certes. C'est juste que pour moi, certains des films américains de Lang sont parmi les meilleurs films américains tout court, donc bon...

_________________
N'écoutez pas Film Freak

Fury c'est quand même bien meilleur, non? La Rue rouge aussi.

En tout cas bonne critique Cooper, malgré les lacunes en orthographe

Fury et la rue rouge j'aime bien (surtout la rue rouge) mais je les place en dessous personnellement.

(Oui l'orthographe sans écrire en texto j'ai conscience de faire encore pas mal de fautes hélas).

L'écriture de "Fury" est vraiment exceptionnelle, classique et exceptionnelle.
L'accélération finale sent un peu la pression du studio sur Lang.
Visiblement, faut que je me procure "Manhunt".

A chaque film de Lang que je découvre, j'aime son cinéma de plus en plus.
Je comprends, mais ça marche vraiment pour moi et ne me gêne pas. Thorndike est sans cesse happé par le monde qui l'entoure, par des rencontres fortuites et nouvelles, des liens passés qui viennent "interrompre" l'urgence de l'instant. C'est à la fois la force et la faiblesse de "Manhunt", je trouve. Faiblesse parce que la structure et le rythme du film ne parvient pas complètement à s'accommoder de cette idée et à maintenir une tension unique. Force parce qu'elle évoque puissamment et fait vivre cette expérience si humaine qui est l'urgence de fuir et d'échapper à un présent en tant qu'individu isolé, et l'oubli de cette urgence et donc de l'isolement à travers les rencontres humaines qui se font en chemin. L'interruption de cette urgence vient à la fois perturbé la tension primaire de la chasse à l'homme, et donc casser quelque chose, tout en amenant au film et au personnage une dimension humaine commune très singulière.
De plus en plus, j'admire chez Lang, la façon dont son empathie pour ses personnages finit par ne pas les isoler du monde et des autres, mais les renvoie de façon implacable à leur (in)humanité. Et moi, en tant que spectateur, à la mienne. Ce regard sans concession sur des personnages pris dans une logique implacable et qui ne peuvent échapper à leur humanité (tout aussi humains ou inhumains qu'ils soient). Il me semble qu'il y a une tension, propre à Lang, que je ne parviens pas à bien définir mais que j'aime beaucoup dans sa mise en scène de "l'individu" et "les autres".

Et que dire d'une séquence comme celle sur le pont entre Thorndike, Jerry et le policier. Rien que pour cette scène, "Manhunt" est à voir. Comment la magie du cinéma s'opère soudainement dans un regard clair et limpide.... Lang isole soudainement Jerry quelques secondes de dos (quel plan!), elle se retourne, l'éternité en 4 secondes,... puis Lang fait entrer, à nouveau le policier dans le cadre. Le policier repousse Jerry encore plus loin, un peu comme un balayeur de trottoir, achevant la séparation et effaçant ce moment d'éternité. C'est ce que j'aime dans le cinéma, je crois (et chez Lang), la naissance de ces moments d'éternité, balayés comme on balaie un trottoir, jusqu'à ce qu'un nouveau moment éternel apparaisse.

Et Moonfleet ?