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MessagePosté: 02 Oct 2025, 16:29 
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aka Marche ou crève

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Le jeune Garraty va concourir pour "La Longue Marche", une compétition qui compte 50 participants qui doivent marcher sans relâche jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'un.

Dès ses clips, j'étais plutôt séduit par le travail de Francis Lawrence et c'était cool de le voir apporter son style esthétisant à Constantine...et d'autant plus surprenant de le voir changer radicalement sur Je suis une légende, que j'ai toujours trouvé bien meilleur que sa réputation. Alors c'était pas du Dogme 95 non plus mais en troquant l'univers du comic book fantastique pour le roman désespéré de Richard Matheson, Lawrence s'adaptait aux exigences dramatiques du récit. Dire que le reste de sa carrière m'a déçu serait un euphémisme et ce n'est peut-être pas un hasard s'il retrouve du poil de la bête en actant sur son dernier opus propose le même type de réalignement.

Après un premier épisode réalisé par Gary Ross, Lawrence a repris la licence Hunger Games dont il a signé les trois suites ainsi que la préquelle, et qui traitaient déjà d'une jeunesse sacrifiée dans un futur dystopique, mais la nature young adult du récit (ou du moins, le simplisme relatif des versions ciné) empêchait à mes yeux un traitement autre que superficiel de ses thématiques. En portant à l'écran l'ouvrage de Stephen King, Lawrence explore les mêmes questions mais défaites du vernis des blockbusters à destination du grand public, saisissant la pleine noirceur du matériau de base.

Le spectre de la Guerre du Vietnam plane de façon si évidente sur l'histoire, imaginée par l'écrivain à la fin des années 60, que parler d'une métaphore de l'engagement militaire tiendrait d'une lapalissade. C'est limite pas un sous-texte : des jeunes marchent flanqués de tanks sous le commandement d'un officier vers une mort certaine dans l'espoir d'améliorer leur statut social, forgeant des amitiés condamnées le long du chemin. Mais le pire, c'est que le caractère cyclique de l'Histoire continue de donner une résonance actuelle au contexte, accentué ici par les répliques de l'officier en question, paraphrasant par moments le discours MAGA. J'ai cru comprendre que l'adaptation surenchérissait le déclin socio-économique et le décor se fait quasi-post-apocalyptique, les personnages traversant une Amérique moribonde, aux rares habitants spectateurs figés dans le temps.

Un tel postulat ne pouvait qu'être hautement allégorique et Lawrence mine tout le potentiel visuel d'un concept pourtant pas très cinégénique sur le papier. En voyant le film, j'ai saisi pourquoi tant de cinéastes s'étaient cassé les dents sur l'adaptation. C'est quand même 1h48 de gens qui marchent avec pour seuls rebondissements les exécutions régulières, somme toute identiques, des candidats. C'est presque un anti-slasher ou, comme évoqué plus tôt, une distillation du principe de Hunger Games à son essence sans pitié. Pas de "jeux" de gladiateurs modernes ici. C'est jamais kiffant ou spectaculaire ou quoi. C'est froid. Cru. Je ne m'attendais d'ailleurs pas à voir le film montrer aussi frontalement d'autres aspects peu ragoûtants qu'impliquent les règles de la compétition.

En écartant toute distraction et tout apparat, le film se concentre sur ses protagonistes et leurs rapports et c'est là que le film, que j'ai craint un moment répétitif, m'a cueilli, quand l'écriture transcende les scènes de camaraderie plaisantes mais convenues pour tisser une réflexion sur l'existence, la Longue Marche n'étant alors plus simplement analogue de la guerre mais de la vie toute entière. Non seulement ça reste un regard politique, une dénonciation de l'American Dream qui pousse les individus à croire qu'ils ont une chance de gagner le gros lot, notamment s'ils cravachent, mais c'est aussi un résumé déchirant de notre temps limité sur cette planète. Tu vis, tu souffres, tu te fais des amis, et ils crèvent un par un.

Une réalité saisissante qui m'a touché, même si je partage la philosophie de vie de McVries (David Jonsson, une fois de plus excellent après Alien Romulus). Pour continuer à marcher.

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MessagePosté: 05 Oct 2025, 22:48 
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Stephen King c’est, dans les meilleurs des cas, un savant mélange de pathos, de cruauté et de déviance. J’ai déjà développé ce que je pensais des adaptations de ses romans ou nouvelles dans le topic Salem’s Lot, donc je ne me répèterai pas mais en gros : c’est probablement le romancier le plus adapté à l’écran depuis Carrie, et il y a une constance impressionnante dans la médiocrité des résultats décennie après décennie, ce qui tend à indiquer que le problème vient largement du matériau de base.

Très lointain souvenir de ma lecture du roman. Je n'ai plus de mots, phrases ou passages en tête depuis le temps (je devais avoir 12 ou 13 ans) mais je me souviens très distinctement avoir été particulièrement heurté par la noirceur étouffante d’un récit cruel, épuisant, détaillant sans relâche cette longue séance de torture physique et psychologique d’une marche forcée et dégradante au rythme d’exécutions sommaires. J’avais d’ailleurs ressenti peu ou prou la même chose à la lecture de The Running Man à la même époque.

Curieux à présent d’y revenir avec des yeux d’adulte. Le film n’a que vaguement éveillé ce même malaise chez moi, cherchant plutôt à être émouvant dans les liens qui se tissent entre les marcheurs, et ce de manière inégale et lassante même s'il y a de brefs moments poignants vraiment réussis. Mais j’ai déjà commencé à oublier la teneur exacte de leurs échanges quand même largement constitués de poncifs sur l’amitié et le dépassement de soi. Quelques passages glaçants ou de pure tension (la montée, la cheville, les tentatives de fuite) trop rares pour rappeler l’horreur de la marche en elle-même, qui sert surtout de prétexte au rapprochement entre les personnages. J’aurais préféré quelque chose de plus radical dans l'innomable plutôt que l’approche mélo… qui, si ça se trouve, et je verrai bien à la lecture, est déjà présente dans le roman.

Pas mauvais pour autant mais oubliable.

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MessagePosté: 06 Oct 2025, 07:18 
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Apprécié. Déjà la pureté du concept et de l’allégorie n’est pas pour me déplaire. On pense pêle-mêle à Beckett, à un Gerry young adult (et très santien dans son défilé défilé d’éphèbes : on a un mini-Michael Pitt, plusieurs qui ressemblent au fils de Dennis Hopper), à du Sion Sono dont il partage une certaine rage et sentimentalisme adolescents mais sans le côté WTF. Et bien sûr, comment ne pas penser à cette troupe de garçons de Stand By Me, qui continue là sa marche en avant.
Il est étonnant de voir le film s’en tenir à son concept des plus basiques, de même qu’il n’ennuie pas. En effet dans la manière d’exhiber sa mécanique d’office viennent se nicher une belle mise en abyme et un commentaire ou un rappel inopiné sur le spectacle, le suspense. Une des raisons pour lesquelles on ne s’ennuie pas, c’est précisément car on attend toujours que se passe quelque chose qui ne peut pas se passer. A la place, il faut donc se contenter de ce qu’on a, au sein de règles fermement établies.

Très surprenant au début l’espèce de violence verbale, qui est du badinage, qui prévaut entre les personnages.


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MessagePosté: 23 Oct 2025, 21:46 
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Beaucoup aimé pour ma part. Le film m'a saisi dès le départ et ne m'a pas lâché. Chaque mort m'a fait mal. Et le film réussit à tenir en haleine sans chercher le sensationnel sur une idée pourtant minimale. Casting nickel.

Et le film a le bon goût de terminer sur une bonne chanson.


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MessagePosté: 23 Oct 2025, 21:48 
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De loin, le meilleur film de Lawrence.


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MessagePosté: 23 Oct 2025, 21:53 
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Mark Hamill se retrouve finalement dans 2 excellentes surprises de cette année. 2 adaptations de King d'ailleurs.


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MessagePosté: 28 Oct 2025, 17:20 
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Localisation: In the Oniric Quest of the Unknown Kadath
J'adore le roman, gros choc de mon adolescence. Le film est une adaptation carrée qui garde l'essentiel et qui est admirablement sèche comme l'était le roman. Très peu d'explication, très peu de justification, pas de gras inutiles à base de flash-backs ou que sais-je (quasiment), vraiment 2h de mecs qui marchent sur une route dans un décor d'Amérique rurale totalement vide. C'est osé et assumé et globalement ça fonctionne plutôt bien surtout grâce à un excellent casting qui rend cette brève amitié immédiatement palpable et réelle. La violence est cash, le film est sec comme tout. J'aurais aimé moins de blabla et plus de viscéralité mais dans son genre c'est réussi. Après je trouve que le film est limité par son propre concept dont on comprend mal l'absurdité et qui ne dit quasiment rien politiquement (je me souviens plus suffisamment du livre pour savoir si c'est pareil) et je trouve l'aspect survival mal géré, les premiers jours semblant plus dur que les derniers où je n'y crois plus totalement. Mais j'admire cette radicalité jusqu'à la fin sèche et brutale.

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MessagePosté: 28 Oct 2025, 20:35 
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Garçon-veau
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Localisation: FrontierLand
Pour l'avoir lu récemment : oui, c'est pareil, ça ne dit rien du tout du monde autour.
C'est l'un des gros défauts pour moi. Je pige l'intention, mais là c'est vraiment vide.

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MessagePosté: 28 Oct 2025, 21:43 
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Complètement redécouvert également depuis mon intervention ci-dessus, ce qui a confirmé mes sentiments.

Contrairement à Art Core, je ne trouve rien de sec dans le film qui me paraît plutôt sirupeux, notamment dans les liens entre les personnages. Comme si l'objectif était de rejouer la tentative de périple initiatique de Stand By Me tout en grossissant le trait (déjà pas finaud à la base) de la dénonciation d'un système. Celle de l'autoritarisme trumpien dans le film, celle de la voracité de la foule forcément idiote et malveillante dans le livre (symptôme du complexe de superiorité de l'auteur, dont le côté folksy et down to earth est depuis longtemps le camouflage peu efficace d'une immense arrogance de parvenu). Il y a cette obsession lourdingue tout au long du film à avoir absolument quelque chose à dire et à révéler, une intentionalité insistante dans les dialogues qui consiste à vraiment pousser l'amitié "plus forte que tout" face à l'adversité absurde et cruelle de la marche, à surjouer la quête (et la découverte) de sens dans l'épreuve, ainsi que la capacité à trouver la force d'incarner une morale face au mal.

Les dialogues du roman sont plus morcelés, entre plaintes, confessions, bravades et menaces, des moments de gratuité nonsensique et d'incompréhensions, de trucs entamés puis laissés en suspens. Les relations entre personnages sont plus empruntes de mystères, leurs motivations ne sont pas claires, pas même à eux-mêmes, leurs qualités respectives, notamment l'abnégation de McVries, plus ambivalentes. Dans le film, McVries est un saint, et ce depuis son enfance héroïque. Dans le roman, l'histoire de l'origine de sa cicatrice sème le malaise, ainsi que ses avances à Garraty qui sortent de nulle part. Les échanges se teintent également de désespoir et de décrochage de la réalité à mesure que le supplice physique et mental se poursuit sans relâche. Même si forcément plus court et ramassé, le film aurait gagné à conserver cette approche là, cette ambiguité beaucoup plus angoissante, ce délabrement progressif qui rend la solitude plus cruelle encore, plutôt que de tout miser sur du didactisme et du pathos triomphal.

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