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 Sujet du message: L'Idiot (Akira Kurosawa, 1951)
MessagePosté: 04 Juil 2024, 08:05 
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Dans le Japon d'après-guerre, recouvert par les neiges, un simple d'esprit est plongé dans un univers de passions destructrices.

Après la découverte semi-barbante de Guerre et paix de Bondarchuk l'an dernier, une chose se confirme : la littérature russe, c'est pas mon délire.

Dès le départ, alors qu'on se retrouve bombardé dans une avalanche de noms, relativement similaires qui plus est, surtout pour un français - les trois personnages masculins s'appellent Akama, Kayama et Kameda - il fut difficile de m'accrocher à quelque chose, la narration butant par ailleurs dans l'exposition avec, à deux reprises, des cartons de contexte et même une voix off (qui ne reviendra plus jamais), la faute sans doute à un charcutage du montage initial de 4h25 (aujourd'hui perdu), réduit à 2h46 contre les souhaits du cinéaste.

Le film se divise en deux parties - Amour & Agonie et Amour & Répugnance - et la première m'a paru relativement précipitée, dans les rencontres et les tournants majeurs, ne permettant pas, malgré la durée, d'incarner correctement l'ampleur dramatique intrinsèque (exemple : à peine Taeko choisit-elle Akama que la scène d'après, ce dernier vient dire qu'il la traite mal). Je ne sais pas si c'est dû aux coupes ou au choix d'adopter le point de vue de Kameda, "l'idiot" du titre, mais ça ne m'a pas aidé à m'intéresser à ces sempiternelles histoires de mariage de raison, pour l'argent ou le statut, d'amours contrariées, entre un quintet de protagonistes peu relatable, de l'arriviste au connard en passant par la paumée et le naïf donc.

Pendant la première partie, je luttais pour m'intéresser, pendant la deuxième j'avais complètement décroché. Je ne pouvais donc qu'essayer de me concentrer un peu cliniquement sur la mise en scène de Kurosawa, toujours aussi forte, mais quand c'est au service d'un récit qui ne me passionne aucunement, même ça c'est difficile à apprécier. Surtout sur près de trois heures.

Le film ne m'a pas paru convaincant mais je ne peux nier une importante part de subjectivité et de goût dans mon blocage. C'est vraiment trop loin de ce qui me parle. Mais ce fut un ennui total.

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MessagePosté: 04 Juil 2024, 09:16 
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MessagePosté: 04 Juil 2024, 09:23 
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Je l'ai trouvé magnifique même s'il y a un côté "film malade", tant dans l'histoire avec l'épilepsie, que dans le rythme heurté. On peut aussi saluer le fait que Kurosawa s'aventure hors de son terrain habituel, de manière sensible mais ambitieuse.

Intelligente actualisation du roman dans le contexte du Japon de la défaite (le dialogue sur la guillotine est remplacé par un traumatisme du front), l'esprit du livre est préservé même s'il a forcément fallu tailler. Kurosawa s'est concentré sur la fin du roman, avec Rogojine qui devient un spectre pour Michkine (superbemement rendue dans la scène du pont - le personnage prend le réel, l'irrationalité muette de l'autre, pour une hallucination. Là où l'autre est coupable de sa violence il voudrait être dans la même mesure coupable de sa propre bêtise, pour le laver moralement, la rivalité n'est pas érotique mais morale et ontologique) et le meurtre.

L'actrice qui joue Natasia Philippovna (le même que "Je ne regrette rien de ma jeunesse" et de beaucoup d'Ozu) Setsuko Hara est vibrante (de quoi mettre à mal l'image d'un Kurosawa machiste, d'autant que le personnage d'Aglaé est lui-aussi bien cerné).

Je l'avais aussi trouvé plastiquement superbe, avec ces noirs et blancs expressionistes, mais aussi la neige qui introduit une dimension plus naturaliste voire panthéiste . C'est con à dire mais prendre en compte la neige quand on adapte un roman russe, tout le monde ne l'a pas fait - Kurosawa a d'ailleurs dû décentrer son film à Sapporo.

Il y a quelque-chose qui m'a fait penser aux films de Bertolucci des années 60-80 . Une dimension politiquement épique qui absorbe la névrose des personnages, plutôt chez les hommes. Les femmes sont moins touchées par ce processus car conscientes d'être des enjeux existentiels pour les hommes qui se substituent à cet aspect politique ou historique.

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MessagePosté: 09 Juil 2024, 02:38 
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Dans le Japon d'après-guerre, recouvert par les neiges, un simple d'esprit est plongé dans un univers de passions destructrices.

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Dès le départ, alors qu'on se retrouve bombardé dans une avalanche de noms, relativement similaires qui plus est, surtout pour un français - les trois personnages masculins s'appellent Akama, Kayama et Kameda - il fut difficile de m'accrocher à quelque chose, la narration butant par ailleurs dans l'exposition avec, à deux reprises, des cartons de contexte et même une voix off (qui ne reviendra plus jamais), la faute sans doute à un charcutage du montage initial de 4h25 (aujourd'hui perdu), réduit à 2h46 contre les souhaits du cinéaste.

Le film se divise en deux parties - Amour & Agonie et Amour & Répugnance - et la première m'a paru relativement précipitée, dans les rencontres et les tournants majeurs, ne permettant pas, malgré la durée, d'incarner correctement l'ampleur dramatique intrinsèque (exemple : à peine Taeko choisit-elle Akama que la scène d'après, ce dernier vient dire qu'il la traite mal). Je ne sais pas si c'est dû aux coupes ou au choix d'adopter le point de vue de Kameda, "l'idiot" du titre, mais ça ne m'a pas aidé à m'intéresser à ces sempiternelles histoires de mariage de raison, pour l'argent ou le statut, d'amours contrariées, entre un quintet de protagonistes peu relatable, de l'arriviste au connard en passant par la paumée et le naïf donc.

Pendant la première partie, je luttais pour m'intéresser, pendant la deuxième j'avais complètement décroché. Je ne pouvais donc qu'essayer de me concentrer un peu cliniquement sur la mise en scène de Kurosawa, toujours aussi forte, mais quand c'est au service d'un récit qui ne me passionne aucunement, même ça c'est difficile à apprécier. Surtout sur près de trois heures.

Le film ne m'a pas paru convaincant mais je ne peux nier une importante part de subjectivité et de goût dans mon blocage. C'est vraiment trop loin de ce qui me parle. Mais ce fut un ennui total.


Tu as lu le roman?

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C'est moins la connerie que le côté attention-whore désoeuvrée plutôt pête-couilles et désagréable que l'on relève chez moi, dès lors que l'on me pratique un peu.

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MessagePosté: 09 Juil 2024, 06:16 
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MessagePosté: 11 Juil 2024, 13:50 
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Je demandais ça par rapport à ta remarque sur les adaptations de littérature russe. Je vois ça par rapport aux difficultés déjà de traductions (et là, on est dans du russe traduit puis adapté) et aussi d'adaptation pour deux des littératures les plus hérmétiques, dans deux des cinémas les plus hérmétiques. Là c'est pas ton trip parce que t'es dans une rétro complète Kurosawa, donc c'était en aparté, et j'ai jamais vraiment lu Dostoïevski puisque je ne lis pas le russe (je sais même plus dans quelle traduction je l'ai lu)... Mais adapter l'idiot ça doit ouvrir à un éventail de possibilités assez dément.

Après, une adaptation japonisée d'un roman russe, ca peut être encore plus ennuyeux.

Bref, ce que je dis n'apporte pas grand chose, mais il doit y avoir moyen de plus vivant et faut laisser leur chance à la littérature russe et ses adaptations.

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MessagePosté: 11 Juil 2024, 15:35 
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Kurosawa n'est pas hermétique. Il me semble qu'il expose longuement les situations et concentre le dénouement narratif sur des passages brefs, souvent tout à la fin de ses films.

Dans Dodeskaden, toutes les utopies architecturales du père de l'enfant sont représentées, déclinées et développées. Il y a une chosification de l'imaginaire , qui devient ainsi une norme, extérieure au tragique de la situation (la mort de l'enfant).
L'hallucination de Rogojine sur le pont dans l'Idiot fonctionne un peu de la même manière (peut-être aussi les flashback sur le piano de "Je ne Regrette rien de ma jeunesse) : le fantasme reste despérement extérieur à la tragédie, c'est une explication que le spectateur du film recueille sans que le personnage, lui, ne parvienne à l'emporter avec lui, il meurt sans voir.
Le plus moral est aussi le plus ésotérique, et est à ce titre impossible : le film est toujours trop pédagogue, lent, condamné à s'expliquer et à se justifier.
L'humanisme de Kurosawa est une forme d'impuissance vis-à-vis de l'image. Celle-ci a un sens plein, mais bref, enveloppé et finalement oublié par le film qui la manifeste, le propos moral survit à la mort de son motif visuel, qui n'est pas l'élement du film, mais son rejeton : la morale devient ce qui persiste et ce dont les personnages s'étonnent, une altérité rivale à celle qui existe entre les hommes.



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(quel plan ...)

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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 11 Juil 2024, 16:03, édité 1 fois.

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MessagePosté: 11 Juil 2024, 16:02 
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J'ai pas dit que Kurosawa était hermétique en soi mais je comprends qu'on puisse trouver l'adaptation par Kurosawa de l'idiot ennuyeuse au carré, et ça me semble un peu aller dans le sens de la critique de Freak (alors qu'il ne me le semble le trouver en général ni ennuyeux ni hermétique) et notamment de par, je pense, à un certain hermétisme de la littérature russe en général et d'une adaptation dans un contexte japonais.
Il est vrai qu'il est souvent très didactique, et et même certainement le plus didactique de ses compatriotes de l'époque. Ca ne me semble pas incompatible avec les difficultés que j'énonce concernant l'idiot de Kurosawa.

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MessagePosté: 11 Juil 2024, 16:05 
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C'est un didactisme particulier et masochiste. Ses personnages sont souvent obsédés par le besoin de se justifier.
(la réhabilitation finale du père de Je ne Regrette rien, qui équilibre le martyre masochiste de la fille. Le trajet de Kagemusha - le simulacre qui doit devenir la vérité pour se sauver.

Dans Dodes'kaden la justification est retorse : elle témoigne à la fois de la bonté morale intrinsèque du père, et de sa faute voire de sa lâcheté : il édifie son enfant au lieu de le soigner . Dès lors qu'un interlocuteur comprend et accepte le contenu moral qui lui est présentée, sa souffrance et sa fragilité ne sont plus perçues aux yeux du juste. La valeur devrait se confondre avec le destin, devrait éprouver elle-même une forme de solitude et de besoin de salut.
C'est sur cela que roule aussi le rapport entre Mychkine et Natasia - tant qu'elle reflète sa souffrance, elle ne peut pas, à ses yeux, être à la fois déchue et mortelle.

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