Forum de FilmDeCulte

L'histoire vraie d'Amin, un réfugié afghan qui a fui son pays à la fin des années 1980 pour aller en Russie avant de rejoindre le Danemark. Le jeune homme confie un secret qu'il cachait depuis vingt ans.


Quand Jaime Lannister ne tourne pas avec des dragons, il finance un documentaire d'animation danois qui truste le premier prix à Annecy.

A l'image de Valse avec Bachir, Flee partage un dispositif voisin sur un sujet assez moderne qu'est le destin des réfugiés. A partir d'un témoignage d'une famille afghane, c'est un pan de l'histoire de ce pays que va nous conter Rasmussen en se focalisant sur l'arrivée des talibans. Mais là où le film fait très fort et marque c'est dans sa description de la vie des réfugiés. Le départ de l'Afghanistan n'est que le commencement du vrai sujet du film qui va suivre la famille d'Amin et son périple de plusieurs années pour rejoindre l'Europe via la Russie.

Ce qui frappe c'est l'authenticité des situations. Dans un style totalement différent, j'avais bien aimé Le sommet des dieux qui sortait du lot par ses petits détails réalistes des escalades qui ajoutaient un sacré cachet au résultat. Là c'est un peu pareil, entre la galère et les diverses fortunes de la famille pour quitter la "prison" Russie, la fragmentation de la famille, le film transpire le réalisme. Le style graphique aident bien On s'y croit et on est totalement immergé. Et vu que c'est une histoire vraie, le film n'embellit pas les faits et bénéficie d'une noirceur assez inhabituelle pour un dessin animé. Surtout que la vie d'Amin est loin d'avoir été paisible.

Le film se déroule comme une séance de psychanalyse d'Amin devant le cinéaste. Il va croiser témoignages, flashbacks et vie présente. Ce qui est habile, Rasmussen montrant ainsi l'influence des épreuves d'Amin dans la construction de sa personne et ce destin "déraciné". L'équilibre entre présent, passé et séances psy, est bon et les trois parties s'enrichissent mutuellement. L'osmose entre petite et grande histoire fonctionne bien aussi.

Il y a deux styles d'animation qui opèrent ici : une plus "classique" à la comic adulte style Valse avec Bachir et une expressionniste qui fait ressentir de manière intense le combat psychologique qui touche nos protagonistes. Certains critiques ont pointé cette hétérogénéité graphique, au contraire c'est ce que j'ai apprécié. Chaque style est utilisé dans un contexte et de manière différentes. Le style expressionniste donne un côté quasi abstrait aux situations qu'il illustre, qui n'auraient pas eu le même impact dans le style comics.

Au final, Flee est assez surprenant. Bénéficiant d'un sens de la narration bien rodé, c'est à la énième petite larmichette versée qu'on mesure toute la réussite de Rasmussen. Rarement, au cinéma, ont été aussi bien saisis le déracinement et l'exil forcé des réfugiés. Un gros coup de coeur pour ma part et dans le top de fin d'année.

4,5/6

Le passage sur Veridis quo est magnifique

4/6